Enjeu Terre, un nouvel enjeu majeur. Les systèmes spatiaux : une contribution décisive
Michel Lefebvre
UN DEMI-SIÈCLE "D'ERE SPATIALE" ?
LA TERRE PLANÈTE UN NOUVEL ENJEU ? UN AUTRE DÉFI
Les mesures spatiales sont indispensables pour améliorer nos connaissances sur la planète Terre.
Elles sont un élément essentiel pour prendre, si cela s'avère nécessaire, des décisions "en connaissance de causes".
On s'accorde sur l’objectif "développement durable".
On peut ajouter sans hésiter :
"pas de développement durable sans connaissance durable".
UN DEMI-SIÈCLE "D'ERE SPATIALE" ?
1957 : l’année où tout a commencé.
Les chercheurs en sciences de la Terre prennent conscience que l’absence de mesures sur 90% de la planète devient un obstacle à tout progrès. C’est le début de l’Année Géophysique Internationale (IGY), un programme de mesures en coopération internationale à partir de sites mieux répartis. Dans certaines disciplines c’est la première fois qu’une coopération est entreprise à cette échelle.
1957 : c'est aussi l’année de la mise en orbite de Spoutnik, le premier satellite artificiel de la Terre.
L'URSS annonce que Spoutnik fait partie de sa contribution à l'IGY.
Janvier 2004 : la recherche spatiale a moins de 50 ans mais en ce demi-siècle
elle a bouleversé totalement la vision de notre univers :
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les satellites et sondes ont exploré l'ensemble du système solaire - avec au passage les séjours de plusieurs équipages d’astronautes sur la lune,
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les instruments en orbite ont effectué des mesures dans tous les domaines d'énergie, dans toutes les gammes de fréquences, et ont permis une astrophysique et une cosmologie nouvelles, élargissant les échelles, inventoriant des astres, suivant ou devinant leur histoire.
Ce n’est pas seulement sémantique si l’INAG (Institut National d'Astronomie et de Géophysique) est devenu l'INSU (Institut National des Sciences de l'Univers):
L'astronomie et la géophysique font maintenant partie d'un domaine plus vaste "les sciences de l'univers" qui utilise très largement les mesures des systèmes spatiaux.
Un seul corps n'a pas fait l'objet de la même sollicitude c’est la planète Terre ! Vous protestez, vous contestez ?
Bien sûr, de nombreux systèmes d'observation de la Terre ont été développés et mis en œuvre; on ne conçoit plus qu'on puisse faire des prévisions météorologiques sans les mesures effectuées par des satellites opérationnels dédiés.
Bien sûr, l’imagerie quantitative des terres émergées en optique ou en radio fréquence a été mise en œuvre et sans cesse améliorée dans sa performance. Le programme SPOT, pour n'en citer qu'un, conçu en 1977 et faisant ses preuves avec SPOT 1 lancé en 1986, a été poursuivi depuis, améliorant performances instrumentales, analyse des données et est utilisé pour des applications civiles et militaires.
On n’oublie pas non plus les systèmes de collecte, localisation, sauvetage, navigation, positionnement : d'Argos à GPS (Global Positioning System), bientôt Galileo (projet Européen de navigation par satellite) et bien sûr l’apport aux communications.
Mais la Terre n'avait pas, jusqu’il y a peu, été étudiée en tant que planète. Bien sûr, les chercheurs ont saisi toutes les occasions pour utiliser les données disponibles et en tirer le meilleur parti. On peut à ce sujet relire l'article d'Anny Cazenave dans la Lettre n°16 de l'ANAE (Académie Nationale de l'Air et de l'Espace). Mais il n’y avait pas de programme spécifique destiné à l’étude de la Terre.
LA TERRE PLANÈTE UN NOUVEL ENJEU ? UN AUTRE DÉFI
Cette situation paradoxale a alors changé; c’est ainsi que la NASA a initialisé, mais seulement en 1999 un programme complet consacré à l’étude de la Terre. Le nom du programme «Destination Earth» montre bien ses objectifs et sa spécificité. Daniel Goldin, administrateur de la NASA, en avait su trouver les motifs pour lui assigner une priorité élevée.
Du côté de l'ESA, c'est par «construction» que la Terre était explicitement exclue des objectifs du programme scientifique obligatoire. Cette situation a perduré et ce n'est qu'au début des années 2000 qu'un programme « Living Earth » a été esquissé puis désigné.
Pourquoi cette absence? Une des raisons est que l’intérêt d’une recherche spécifique n’apparaissait pas essentiel.
Nous avons maintenant pris conscience que les phénomènes terrestres, ceux que nous vivons, ont des échelles d’espace et de temps qui nécessitent un programme nouveau.
Le système Terre est complexe. Il est composé de plusieurs éléments qui ont chacun leur dynamique propre mais qui, de plus, interagissent entre eux. L’élément humain est, du reste, une des composantes.
C’est l'ensemble de l'humanité qui va vivre sur cette Terre qui change. C’est aussi cette société humaine qui par son activité constitue maintenant un acteur des changements.