Quel fonctionnement et quel devenir ?
Pierre Chevallier et Bernard Pouyaud (1)
La question des glaciers continentaux revient très souvent dans la discussion sur le changement climatique. Ils servent tour à tour d’argumentaires ou de témoins pour des questions aussi diverses que la montée du niveau des mers, l’accélération de la croissance de la température, la diminution, voire la disparition, des réservoirs d’eau douce qu’ils constituent, les risques qu’ils induisent, etc. Ils sont même parfois utilisés comme contre-arguments par les climato-sceptiques, constatant leur avancement dans certaines, mais très rares, régions du globe.
Glacier de la Cordillère Royale (Bolivie) et sa lagune terminale – 2000
Cette note n’abordera pas toutes ces questions, mais s’attachera à expliquer schématiquement comment fonctionne un glacier ; elle éclairera les principaux concepts utilisés par les scientifiques à la base de l’information diffusée dans les médias ; enfin elle discutera de leur contribution aux ressources en eau disponibles pour les usages sociétaux et ce qu’il faut en attendre pour le futur.
Certains de ces points sont à rapprocher de questions évoquées dans les deux ouvrages du Club des Argonautes, en particulier dans la section «Que devient une goutte d’eau ?» de «Climat, une planète et des hommes» (2) et dans la section «L’eau va-t-elle manquer ?» de «Climat, le temps d’agir». (3)
Deux FAQ du Club peuvent également être consultées en complément du propos tenu ici :
- Quelle est l’influence des montagnes sur la circulation générale de l’atmosphère? par Jean Labrousse
- Quelle est l'estimation des masses d’eau des principaux réservoirs terrestres? par Bernard Pouyaud
Enfin, cette note est restreinte aux systèmes glaciaires continentaux des régions tempérées et tropicales, c’est à dire comprises entre les deux cercles polaires arctique et antarctique ; de plus, elle ne détaillera pas les spécificités des nombreux types de glaciers. Les lecteurs qui veulent explorer plus avant le sujet pourront consulter, entre autres, l’ouvrage de Francou et Vincent (2007) (4). Ceux qui sont à la recherche de données pourront consulter le site du "World Glacier Monitoring Service".
1. Comment fonctionne un glacier ?
Température et précipitation
De manière schématique, un glacier naît d’un stock de neige qui en vieillissant se densifie et se transforme en glace, laquelle s’écoule par gravité selon la pente du substratum sur lequel il s’est déposé.
Il y a donc deux grandeurs climatiques qui conditionnent son existence : d’une part, les précipitations et, d’autre part, les températures de l’air suffisamment basses pour que :
- les précipitations soient sous forme solide (neige), et
- le couvert neigeux se maintienne suffisamment longtemps pour se constituer progressivement en masse de glace se perpétuant au - delà du cycle climatique annuel.
Températures et précipitations sont au cœur des questionnements liés au changement climatique. Et c’est pour cela que les glaciers, qui en sont très étroitement dépendants, constituent des témoins privilégiés de ces changements.
Les glaciers sont présents le plus souvent sur des chaînes montagneuses pour la raison simple que les altitudes plus élevées favorisent les températures basses pendant des périodes longues du cycle climatique et donc la présence d’eau sous forme solide, neige ou glace. Sur les glaciers continentaux, et en particulier sur les régions tropicales, le profil de température présente une variation verticale d'environ 6°C/km. La température est en sus le paramètre que les modèles de circulation générale ou régionale représentent le mieux, et, par conséquent, il est le paramètre sur lesquels les différents modèles s’appuient et s’accordent le plus généralement.
Il n’en est pas de même des précipitations qui sont beaucoup plus sensibles aux conditions locales de circulation atmosphérique et où l’équilibre des phases solide, liquide et gazeuse de l’eau suit les principes de la thermodynamique (Voir article Wikipedia). En très haute montagne en particulier, les différences d’altitudes se traduisent par des différences significatives de pression atmosphérique qui interfèrent avec cet équilibre (5). On ne peut pas dégager de loi générale de la distribution altitudinale des précipitations, même si localement des résultats existent (6). Les modèles de circulation générale et régionale sont plus incertains sur la distribution des précipitations et leurs tendances que pour la température (7) ; ils présentent souvent des différences notables entre eux.
Figure 1: Schéma simplifié de fonctionnement d'un glacier
Accumulation et ablation
La partie gauche de la Figure 1 présente un schéma simplifié du fonctionnement d’un glacier considéré comme une masse d’eau sous la forme solide s’inscrivant dans un bassin versant collectant les précipitations, et restituant l’eau sous une forme liquide à son exutoire. On distingue deux zones qui correspondent à deux dynamiques différentes :
- une zone d’accumulation dans la partie amont et donc la plus froide du bassin versant. Les précipitations s’y produisent sous forme de neige qui s’accumule et évolue vers de la glace en se densifiant (8) ;
- une zone d’ablation à l’aval où les températures plus élevées, et plus généralement les échanges radiatifs, entraînent la fonte de l’eau solide (neige et glace) sous la forme d’écoulements que l’on retrouve à l’exutoire du bassin versant.
Schématiquement, la permanence d’un glacier résulte de l’équilibre entre ces deux «réservoirs» d’accumulation et d’ablation. On qualifie d’ailleurs la limite entre ces deux zones de ligne d’équilibre. Il est alors facile de comprendre que, toutes autres choses égales par ailleurs, lorsque la température augmente cette ligne remonte, la zone d’accumulation diminue et la zone d’ablation augmente : le glacier perd alors plus d’eau qu’il n’en reçoit et sa masse globale diminue, ce qui se traduit par une diminution de son épaisseur et le recul de son front (flèche rouge de la Figure 1). Le phénomène inverse se produit lorsque la température diminue.
Il faut alors cependant distinguer ce qui se passe selon les régimes de précipitation : c’est, en particulier, ce qui distingue les glaciers tempérés des glaciers tropicaux.
Glaciers tempérés et tropicaux
La partie droite de la Figure 1 schématise les différences de fonctionnement entre glaciers tempérés et tropicaux :
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Sous les Tropiques (9), la plus grande part des précipitations se produit pendant la saison chaude estivale. Cela entraîne un mécanisme simultané d’accumulation et d’ablation pendant l’été, alors que pendant l’hiver sec et froid en altitude, il ne se passe quasiment rien. La ligne d’équilibre s’établit à une altitude qui est assez peu différente de la limite entre la précipitation neigeuse et la précipitation pluvieuse.
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En régions tempérées, on observe des précipitations neigeuses abondantes pendant la saison froide hivernale et le glacier va se mettre en position d’accumulation sur la plus grande partie, voire la totalité de sa surface, la ligne d’équilibre théorique pouvant alors s’établir plus bas que le front du glacier. Pendant la saison estivale chaude, les précipitations neigeuses deviennent rares, même à haute altitude, et c’est l’inverse qui se produit, le glacier se mettant en position généralisée d’ablation et la ligne d’équilibre pouvant passer plus haut que le sommet du glacier.
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Des situations intermédiaires combinent les deux schémas, par exemple dans la chaîne himalayenne, orientée sud-est/nord-ouest, où l’influence de la mousson asiatique s’affaiblit progressivement d’est en ouest laissant les flux tempérés d’ouest prendre une influence grandissante (10).
2. Bilans, observation et modélisation
Avec l’explication du fonctionnement des glaciers, il est nécessaire de fournir aussi quelques indications sur les concepts de bilans et de modélisations qui constituent le plus souvent la forme de diffusion de l’information sur les environnements glaciaires, aussi bien dans le cercle scientifique que dans les médias et les débats.
Bilan de masse, bilan d’énergie et bilan hydrologique
Trois sortes de bilan sont le plus souvent étudiées et utilisées (11) :
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Le bilan de masse d’un glacier. C’est la différence de masse d’un glacier entre deux dates. La valeur généralement présentée est le bilan spécifique annuel net. C’est à dire la différence annuelle de masse du glacier, observée d’une année à l’autre, au moment où la masse glaciaire est la plus faible (fin de la saison d’ablation). Elle est exprimée par une lame équivalente en eau (unités : m ou mm), uniformément distribuée sur la totalité de la surface du glacier ; elle peut être positive lorsque le glacier gagne de la masse ou négative lorsqu’il en perd.
Dans le paysage, les fluctuations du bilan de masse, représenté par le volume de glace, se traduisent visuellement à la fois par une variation de l’épaisseur du glacier, d’abord dans la zone aval où l’ablation est prépondérante, et par un déplacement (recul ou avancée) du front du glacier. Ce sont souvent ces deux types d’observation qui sont mises en avant, mais il faut garder à l’esprit que ce ne sont que des indicateurs (ou proxys) de la variation de masse.
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Le bilan d’énergie en un point du glacier ; on parle aussi de bilan radiatif. Il s’agit sur une période donnée de quantifier les flux radiatifs exprimés en flux d’énergie par unité de surface (unité : W/m²) nécessaires à l’eau stockée pour, soit sous forme solide passer à un état liquide (fonte) ou gazeux (sublimation), soit sous forme liquide passer à un état solide (gel) ou gazeux (évaporation). Physiquement, il s’agit d’une application des principes de la thermodynamique, déjà évoqués plus haut.
L’énergie est fournie au glacier ou à la neige à la fois par le rayonnement solaire de courte longueur d’onde et par le rayonnement atmosphérique de grande longueur d’onde. Un paramètre explicatif intermédiaire, largement utilisé, est l’albédo qui est le rapport entre les rayonnements solaires réfléchi et incident et qui dépend de la nature de la surface.
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Le bilan hydrologique à l’exutoire du bassin versant du glacier. Il exprime la conservation de la masse d’eau, sur un intervalle de temps fixe, entre ce qui entre dans le bassin glaciaire (précipitations solide et liquide) et ce qui en sort (évaporation, sublimation, écoulement des précipitations liquides, fonte de la glace et fonte de la neige).
Lorsqu’on s’intéresse à la ressource en eau délivrée par un bassin versant incluant des glaciers, on prend en compte les écoulements sous la forme du débit moyen sur la période étudiée (unité : m³/s) ou du volume total cumulé (unités : m³, millions de m³, km³). Ces écoulements incluent aussi bien les écoulements délivrés par les glaciers, que ceux délivrés par les parties non englacées des bassins versants, lesquelles peuvent comporter des surfaces enneigées.
Observation
Ces différents bilans sont basés sur des données d’observation sur des périodes aussi longues que possible, d’autant plus complexes à acquérir qu’elles se situent dans des conditions d’accès et de maintenance technique difficiles.
À cela s’ajoute que les observations de terrain sont des observations ponctuelles, qu’il s’agit ensuite d’étendre à l’ensemble du domaine glaciaire étudié. À cette fin, les scientifiques ont recours à différentes approches : statistiques ou géostatistiques, produits issus de l’imagerie satellitaire, données spatiales issues de modèles de réanalyses. Il a déjà été souligné plus haut que, s’agissant des deux variables primaires que sont la température et la précipitation, si les données locales et spatiales sur la première sont relativement fiables, celles sur la seconde sont sujettes à d’importantes incertitudes.
Modélisation
Outre les hypothèses et techniques de spatialisation évoquées dans la section précédente, qui constituent dans la plupart des cas un premier niveau de modélisation, les modélisations utilisées par les hydro-glaciologues afin de quantifier les différentes grandeurs intervenant dans le cycle de l’eau atmosphérique (vapeur, précipitations), cryosphérique (neige et glace) et hydrosphérique (eau liquide continentale) relèvent aujourd’hui de trois familles :
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Une approche simplifiée basée sur des relations statistiques simples, généralement des régressions.
Cette approche est souvent associée :
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aux sorties des modèles de circulation générale de l’atmosphère
(voir les FAQ : «Que sont les modèles numériques de circulation de l’atmosphère et de l’océan?» et «Les modèles climatiques ont-ils une valeur prédictive?», -
aux données de réanalyses (voir article Wikipedia Réanalyse météorologique) et,
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pour ce qui est des projections futures, aux scénarios climatiques standards (voir le site "Climat en question", Comment les scénarios climatiques prennent-ils en compte les options économiques de nos sociétés ? .
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Une approche physique basée sur le bilan d’énergie : c’est notamment celle qui est utilisée par le Centre National de Recherche Météorologique (Météo-France, CNRS) avec le schéma de surface ISBA et le modèle nival CROCUS. Elle est basée sur l’application des lois de la physique à une unité de surface considérée homogène au sein du système étudié, puis à sa spatialisation à l’ensemble de la surface, le plus souvent au travers d’un découpage en mailles régulières.
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Une approche conceptuelle dite du degré-jour : c’est actuellement la plus utilisée (12). Elle est basée sur l’idée que, pour une unité de temps donnée (13), et au dessus d’un seuil fixé de température, le volume de fonte de l’eau solide est directement proportionnel à l’élévation de la température. Le facteur de proportionnalité (DDF pour : degree-day factor) n’est pas fixé a priori, mais il est calibré et validé pour un modèle et pour une application ; il peut varier selon le type de surface (neige ou glace) et/ou selon la saison.
Par exemple, avec le modèle conceptuel distribué HDSM appliqué au bassin versant de Pheriche (144 km² sur le versant sud de l’Everest au Népal) (14), on considère qu’au dessus d’un seuil de température moyenne journalière de (-2,8°C), le volume de fonte de la neige est de 14 mm/jour chaque fois que la température de l’air s’élève de 1°C. La valeur du seuil de température et celle du DDF sont fixées par une procédure de calibration/validation utilisant les débits écoulés à l’exutoire du bassin et la variation de l’extension de la couverture neigeuse observée par satellite.
3. Ressource en eau délivrée par un bassin glaciaire en réponse au réchauffement global
La cryosphère constitue-t-elle des châteaux d’eau ?
Les hautes chaînes de montagnes de la planète couronnées de glaciers sont régulièrement qualifiées de châteaux d’eau de la terre. Il est vrai que la plupart des grands fleuves et des grands bassins qui leur correspondent en sont issus ; pour citer quelques exemples : le Rhône, le Rhin, le Pô, le Danube ont tous leurs têtes de bassin dans les Alpes, il en est de même pour l’Amazone avec la Cordillère des Andes, ou pour le trio Indus - Gange - Brahmapoutre avec le versant sud de l’Himalaya.
Cette appellation de châteaux d’eau laisse souvent entendre qu’une éventuelle disparition des glaciers et du couvert neigeux menacerait les ressources en eau disponibles pour les populations de ces grands bassins. C’est à la fois vrai et faux.
Prenons deux exemples en Himalaya et dans les Andes :
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En Himalaya (15), on estime que la fonte de la cryosphère représente entre 10 et 15% du total écoulé par le Gange et le Brahmapoutre. Il faut ajouter que la disparition de la cryosphère ne fera pas disparaître les précipitations liquides, dans une région où 80% des précipitations interviennent sous forme de pluie de mousson, pour l’essentiel dans des zones de plaines ou de piémont. À contrario, l’Indus, dont le haut-bassin couvre une surface importante du plateau du Tibet en altitude et dont les différentes chaînes montagneuses (Hindu-Kush, Karakoram) sont soumises à une alternance climatique plus complexe que celle de la mousson asiatique, dépend pour environ 50% de ses écoulements de la cryosphère. Sachant qu’une grande partie de la sécurité alimentaire du Pakistan, mais aussi d’une partie de l’Inde, dépend de l’irrigation dans les plaines du Pendjab et du Sindh, on conçoit que cette question est cruciale.
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Dans les Andes Tropicales, la situation est contrastée entre le versant Ouest (Pacifique) très sec et le versant Est (Atlantique) très humide. Au Pérou, la grande majorité de la population, y compris celle de la capitale Lima, plus de 8 millions d’habitants, vit sur le versant Pacifique qui est actuellement quasi totalement tributaire de la ressource en eau cryosphérique, dont les réserves (voir plus loin) sont limitées et, à court terme, insuffisantes. Toutefois, sur le versant Atlantique opposé, les précipitations liquides sont abondantes et des transferts d’eau d’un versant vers l’autre sont techniquement possibles, bien que nécessitant des investissements considérables. En Bolivie, l’alimentation électrique de la métropole de La Paz – El Alto provient d’un ensemble de barrages hydroélectriques, tous situés sur le versant amazonien.
La fonte des glaciers va-t-elle augmenter la ressource en eau disponible ?
En revenant sur ce qui est expliqué plus haut, la question est légitime. Si les réservoirs glaciaires fondent, ils relâchent plus d’eau qu’ils n’en accumulent. Cela conduit toutefois à une diminution progressive du stock et, avec la diminution de l’épaisseur du glacier, il arrive un moment où non seulement le front recule, mais où l’ensemble de la surface du glacier se réduit (surimpressions vertes sur la Figure 1), entraînant un rétrécissement de la zone d’accumulation et, par conséquent de la zone d’ablation. Cette situation générale conduit donc dans un premier temps à une augmentation de la masse d’eau libérée par le glacier, puis dans un deuxième temps, après un passage par un maximum, à une diminution des débits jusqu’à la disparition des réservoirs glaciaires.
Dans l’article déjà cité, Pouyaud et al. (2005) proposent un modèle simple pour simuler à long terme cette évolution. La Figure 2 en donne une illustration. Sous l’hypothèse d’un scénario SRES B2 (16), elle représente pour la période allant de 2000 à 2400 une simulation des débits spécifiques (17) à l’exutoire de quatre bassins versants diversement englacés de la Cordillère Blanche au Pérou : Arteson (79% de couverture glaciaire en 2000), Llanganuco (39%), Paron (48%), Yanamarey (73%).
Figure 2 : Simulation à long terme du débit spécifique annuel pour quatre bassins de la Cordillère Blanche (Pérou) comportant des glaciers, sous l'hypothèse du scénario SRES B2. Graphe adapté de Pouyaud et al., 2005
Dans cette simulation, le pic de débit moyen intervient pour les quatre bassins dans le courant du XXIème Siècle et la disparition des glaciers avant la fin du XXIIème Siècle. On observe que pour les bassins d’Arteson et de Yanamarey, les plus englacés, c’est dès avant 2050 que l’on se trouve dans des conditions d’eau délivrée plus faibles qu’en 2000.
Dans le cas général, quand on ne dispose que d’une information partielle ou inexistante, les questions qui se posent sont :
Se trouve-t-on encore dans la phase ascendante et si oui, quand le maximum interviendra-t-il ?
À quel moment faut-il envisager la disparition des glaciers ?
Pourquoi observe-t-on parfois une avancée des glaciers ?
Les climato-sceptiques avancent fréquemment comme argument qu’il existe des glaciers qui actuellement avancent. Cette observation est décrite dans quelques endroits de la Planète, en particulier dans le Karakoram au Pakistan et dans la Cordillère de Darwin au sud de la Patagonie. Ce n’est toutefois pas un argument valable : ces cas sont aussi soumis au changement climatique. On se trouve dans des régions où les températures sont particulièrement basses, soit à cause de l’altitude, soit à cause de la latitude et, malgré le réchauffement, les températures restent négatives. Par contre le changement climatique induit une augmentation des précipitations qui vont tomber sous forme de neige. Conséquence : les glaciers accumulent et avancent. Un autre phénomène peut se produire : l’abondance de précipitations augmente la quantité d’eau liquide à la base du glacier favorisant son avancement par glissement sur son substratum.
Les mêmes causes produisent des effets contraires.
(1) Ce texte est partiellement inspiré des articles :
- Pouyaud, B., Zapata, M., Yerren, J., Gomez, J., Rosas, G., Suarez, W., Ribstein, P., 2005. Avenir des ressources en eau glaciaire de la Cordillère Blanche / On the future of the water resources from glacier melting in the Cordillera Blanca, Peru. Hydrological Sciences Journal 50, null-1022.
- et Chevallier, P., Pouyaud, B., Suarez, W., Condom, T., 2011. Climate change threats to environment in the tropical Andes: glaciers and water resources. Regional Environmental Change 11, 179-187–187. Retour
(2) Texte de Bernard Pouyaud, pages 124-131, dans : Orsenna, E., Petit, M. (Eds.), 2011. Climat : une planète et des hommes. Le Cherche-Midi, Paris. ISBN 978-2-7491-1979-3. Retour
(3) Texte de Bernard Pouyaud, pages 155-161, dans : Petit, M. (Ed.), 2015. Climat : le temps d’agir, Le Cherche Midi, Paris. ISBN 978-2-7491-4344-6. Retour
(4) Francou, B., Vincent, C., 2007. Les glaciers à l’épreuve du climat. 274 p. IRD Editions, Belin, Paris. ISBN 978-2-7099-1604-2 et 978-2-7011-4641-6. Retour
(5) Voir par exemple : Anders, A.M., Roe, G.H., Hallet, B., Montgomery, D.R., Finnegan, N.J., Putkonen, J., 2006. Spatial patterns of precipitation and topography in the Himalaya. Tectonics, Climate, and Landscape Evolution 398, 39–53. Retour
(6) Voir par exemple : Valéry, A., Andreassian, V., Perrin, C., 2010. Regionalization of precipitation and air temperature over highaltitude catchments – learning from outliers. Hydrological Sciences Journal 55, 928–940.
Ou bien : Eeckman, J., Chevallier, P., Boone, A., Neppel, L., De Rouw, A., Delclaux, F., Koirala, D., 2017. Providing a non-deterministic representation of spatial variability of precipitation in the Everest region. Hydrol. Earth Syst. Sci. 21, 4879–4893. Retour
(7) Voir les chapitres 12 et 14 du 5ème rapport du GIEC : IPCC, 2013 : Climate Change 2013 : The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Stocker, T.F., D. Qin, G.-K. Plattner, M. Tignor, S.K. Allen, J. Boschung, A. Nauels, Y. Xia, V. Bex and P.M. Midgley (eds.)]. Cambridge University Press, Cambridge, United Kingdom and New York, NY, USA, 1535 pp. Retour
(8)La densité de la neige est de manière générale lors de sa chute inférieure à 0,2, alors que celle de la glace compacte est de l’ordre de 0,9. Retour
(9)La recherche française a commencé à s’intéresser aux glaciers tropicaux dès le début des années 90 à l’initiative de Bernard Francou et de Pierre Ribstein dans le cadre du projet NGT (Neige et Glaciers Tropicaux) soutenu par l’IRD. Retour
(10) Voir par exemple : Bookhagen, B., Burbank, D.W., 2010. Toward a complete Himalayan hydrological budget : Spatiotemporal distribution of snowmelt and rainfall and their impact on river discharge. Journal of Geophysical Research-Earth Surface 115. Retour
(11) Les explications données dans cette section et dans les deux suivantes sont réduites au minimum utile. Il existe de nombreux ouvrages, thèses et articles dans le domaine de l’hydro-glaciologie détaillant ces différents aspects, y compris des résultats récents de recherches en cours. Pour une information générale en français, le lecteur peut consulter la troisième partie du livre de Francou et Vincent (2007) cité plus haut et/ou les chapitres 2 et 7 du livre : Hingray, B., Picouet, C., Musy, A., 2009. Hydrologie. 2. Une science pour l’ingénieur, Science et ingénierie de l’Environnement. 602p + 1 CD. Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne. ISBN 978-2-88074-798-5. Retour
(12) Voir par exemple : Martinec, J., Rango, A., 1986. Parameter values for snowmelt runoff modelling. Journal of Hydrology 84, 197–219. https://doi.org/10.1016/0022-1694(86)90123-X ou Hock, R., 2003. Temperature index melt modelling in mountain areas. Journal of Hydrology 282, 104–115. Retour
(13) L’intervalle de temps du facteur utilisé est celui du pas de temps de calcul du modèle. C’est généralement le jour, d’où l’expression degré-jour. Mais des applications existent avec des pas de temps infra-journaliers. Retour
(14) Données issues de : Bouchard, B., Eeckman, J., Dedieu, J.-P., Delclaux, F., Chevallier, P., Gascoin, S., Arnaud, Y., 2019. On the Interest of Optical Remote Sensing for Seasonal Snowmelt Parameterization, Applied to the Everest Region (Nepal). Remote Sensing 11, 2598. Retour
(15) La population des trois bassins de l’Indus, du Gange et du Brahmapoutre approche le milliard d’individus. Retour
(16) Scénario standard du GIEC, plutôt optimiste, d’un «monde où l’accent est placé sur des solutions locales dans le sens de la viabilité économique, sociale et environnementale» Voir article Wikipedia. Voir aussi la référence donnée plus haut sur les scénarios climatiques du GIEC. Retour
(17) Le débit spécifique annuel permet de comparer les volumes annuels issus de bassins versants de tailles différentes. Il s’exprime en m (parfois en mm) et résulte du rapport entre le volume annuel écoulé et la surface du bassin versant à son exutoire. Retour