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L’implication de nouveaux acteurs : Nations Unies, Public, Média, politiques

Jacques Merle, Bruno Voituriez, Yves Dandonneau, Club des ArgonautesSeptembre 2014

Un historien des sciences américain, connu dans le domaine des sciences de l’environnement, Spencer WEART, situe la prise de conscience du changement climatique par le public au début des années 1980, lorsque cette question fut, pour la première fois, soumise à une enquête d’opinion aux États-Unis.

En 1981 un sondage a montré qu’un tiers des américains avaient entendu parler de l’effet de serre et que deux tiers pensaient que l’accroissement des émissions de gaz carbonique dans l’atmosphère était susceptible d’avoir une influence sur le temps et changer le climat ; l’influence de l’homme sur l’environnement devenait ainsi un problème sérieux.

En 1989, moins de dix ans après, ces proportions avaient considérablement augmenté ; une large majorité d’américains (79%) affirmaient qu’ils avaient eu connaissance de l’effet de serre.

 Mais avant cette prise de conscience des opinions publiques de la question climatique et bien après l’éveil progressif des scientifiques à ces problèmes à partir des années 1960 comme on l’a vu, se situe une période de mise en place progressive d’organisations mixtes, scientifiques et gouvernementales, de plus en plus proches du monde politique, impliquant des grandes institutions scientifiques internationales, des agences des Nations Unies (OMMPNUE,…) et aussi des organisations représentant la société civile (ONG diverses…). Ces instances se sont manifestées sous forme de grandes conférences internationales associant des scientifiques, des représentants nationaux, des ONG, des groupements humanitaires et culturels divers, jusqu’à des chefs de gouvernements. C’est ainsi qu’à partir des années 1980, les gouvernements entreprirent de prendre en main eux-mêmes la question au niveau qui était le leur, celui des assemblées ou des sommets intergouvernementaux, des conventions et des traités ….

Ces grandes conférences internationales sur l’environnement et le climat sont donc des marqueurs significatifs de l’histoire qui s’est jouée à cette époque, jalonnant assez précisément l’évolution de la prise de conscience des questions environnementales et du climat par l’humanité.

 Il est cependant difficile de catégoriser précisément et d’établir toutes les filiations et les interrelations, lorsqu’elles existent, parmi ces rassemblements et ces conférences, entre les mains d’organisations gouvernementales, intergouvernementales, non-gouvernementales et immergées dans un maquis d’innombrables dispositifs :

  • comités,

  • groupes de travail,

  • assemblées,

  • sommets,

  • jusqu’aux conventions internationales et aux traités …etc.

On peut cependant tenter de procéder à une catégorisation de ces instances internationales sur le climat pour en extraire, plus ou moins arbitrairement, trois catégories qui ne sont d’ailleurs pas entièrement indépendantes les unes des autres :

  1. Des conférences relevant de la mouvance écologique et socio-humanitaire qui d’ailleurs quelquefois précédèrent l’alerte climatique des scientifiques et se manifestèrent dès les années 1960. Ces courants de pensée généralistes environnementaux, que l’on peut qualifier d’«environnementalistes», manifestaient une défiance générale vis à vis du pouvoir de l’homme sur la nature et traduisaient une forme de désenchantement face aux progrès de la science qui contrastait avec le scientisme euphorique de la fin du XIXème siècle. Et, lorsque la question climatique vint à l’ordre du jour, ce pessimisme ambiant fut un terreau favorable pour s’inquiéter des impacts possibles d’un dérèglement climatique sur l’humanité, ce qui donna lieu à des manifestations diverses : rassemblements, conférences et organisations qui eurent un impact sur la dimension politique future de la question climatique et pesèrent sur les gouvernements.
     

  2. Des conférences à caractère fondamentalement scientifique, mais impliquant aussi des représentations nationales, mises en œuvre par des agences des Nations Unies telles que l’OMM, le PNUE, et aussi fréquemment avec le concours de l’ICSU, cette ONG scientifique. En effet l’OMM, qui rassemblait les services météorologiques nationaux dédiés au recueil des données météorologiques et à la prévision du temps, traitait aussi de sujets qui dépassaient les préoccupations purement scientifiques de ses membres. De ce fait cette agence de l’ONU organisait des conférences internationales qui touchaient à la fois un public de scientifiques mais aussi et surtout des responsables nationaux, chargés de la météorologie dans leur pays et de ce fait proches des niveaux gouvernementaux. C’est ainsi que des conférences internationales ayant pour objet principal le climat virent le jour progressivement à partir des années 1970 à l’intérieur même des instances scientifiques spécialisées de l’OMM, tel que le GARP (voir Chapitre IV) souvent avec le soutien de l’ICSU. Ces conférences jouèrent un rôle majeur à la charnière du monde scientifique, du public et des media qui en rendaient compte déjà abondamment.
     

  3. Des organisations et des conférences intergouvernementales marquant la prise en charge par les politiques des inquiétudes manifestées par les scientifiques, les agences des Nations Unies : OMMPNUEetc, et progressivement les mouvements écologiques et environnementalistes les plus divers relayés par les medias et le public. Ces conférences, assemblées, sommets, jusqu’aux traités…. intergouvernementaux font aujourd’hui l’actualité traduisant l’emprise de la sphère politique sur la question climatique après la phase de prise de conscience à l’intérieur de la sphère scientifique et sa diffusion progressive dans la société.

1- Les conférences généralistes sur l’environnement

La préoccupation climatique a eu ses précurseurs et ses pionniers scientifiques présentés Chapitre III, mais la société civile –qui signifie ici non scientifique– sensible aux problèmes touchant à l’environnement et appartenant à une certaine élite intellectuelle a eu aussi ses précurseurs opérant cependant dans un registre de réflexion plus étendu que celui du climat et touchant aux rapports de l’homme avec la nature et son environnement.

Autour des années 1968, un vent de contestation souffla sur le monde développé mettant en cause nos sociétés jugées trop soumises à la technologie et à l’industrialisation. Il fallait se libérer des carcans étatiques et replacer la nature à sa place au centre du monde. On peut rappeler ici James Lovelock et son étonnante hypothèse faisant de la Terre un système complexe d’interactions entre ses composantes physiques et vivantes lui conférant ainsi les caractères d’un être vivant : Gaïa.

Ou encore «le club de Rome», créé en avril 1968 à la suite d’une conférence rassemblant à Rome des universitaires, des chercheurs, des économistes et des industriels, appartenant à plusieurs dizaines de pays. Les réflexions de ce club donnèrent lieu à un fameux rapport, connu sous le nom de «rapport du club de Rome», prédisant la fin inéluctable, tôt ou tard mais avant la fin du XXIème siècle, de la croissance économique par épuisement des ressources de la Terre et proposant que pour enrayer ce pillage imprudent, on envisage maintenant une «croissance zéro».

On voit donc que lorsque la question climatique se posa réellement, les élites des opinions publiques étaient déjà préoccupées par les questions environnementales et prêtes à voir dans l’évolution possible du climat une nouvelle menace à laquelle l’humanité aurait à faire face de façon d’autant plus responsable qu’elle était probablement elle-même à l’origine de cette perturbation.

1-1 La première conférence de Stockholm en juillet 1971 : «Climate effects of man’s activities»

C’est dans ce climat intellectuel de responsabilité, voire de culpabilité, de l’homme face à la nature, qu’une conférence fut organisée en 1971 par des scientifiques connus, soucieux des questions environnementales. Par son retentissement, au-delà même de ses aspects purement scientifiques, elle peut être considérée comme la première manifestation d’une inquiétude de l'homme concernant le climat. Trente scientifiques de haut niveau appartenant à 14 pays se sont retrouvé à Stockholm, en juillet 1971, à l’invitation du MIT américain et de l’académie royale des sciences de Suède, pour se pencher sur les impacts des modifications possibles du climat sous l’effet de l’activité humaine. Connue aussi sous l’appellation de «Study of Man’s Impact on Climate - SMIC», cette conférence s’efforça de dégager un consensus sur l’ampleur de la perturbation générée par les activités humaines actuelles et passées, susceptible de modifier les températures et d’une façon générale l’équilibre thermique de la planète. En corollaire, il fut débattu de l’évaluation du niveau de perturbation engendré par l’activité humaine susceptible de causer un changement climatique à l’échelle globale ou régionale. Une conclusion s’imposa : L’homme, par l’ensemble de ses activités, est effectivement en mesure d’affecter durablement le climat aux échelles locales, régionales ou globales. Mais les connaissances sont encore trop fragmentaires et il convient de mettre au point rapidement un plan d’action précis dans le but de mettre en route des recherches approfondies sur ce sujet.
Cette conférence de Stockholm de 1971 est restée dans les esprits comme la première manifestation d’une nouvelle attitude de l’homme vis-à-vis de la nature et fut à l’origine de différents mouvements et courants de pensée qualifiés à l’époque d’«environnementalistes». Peut-être plus important encore, les recommandations de cette conférence, cautionnées par des scientifiques de haut rang, attirèrent l’attention des organisations internationales sur la nécessité de prendre au sérieux les problèmes posés par les atteintes à l’environnement. C’est ce qui conduisit l’Organisation des Nations Unies à proposer, l’année suivante, en 1972, une grande conférence internationale sur l’environnement.

1-2 La conférence de l’ONU sur l’environnement à Stockholm en juin 1972

La «Conférence des Nations Unies sur l’Environnement Humain» (CNUEH), qui s’est tenue à Stockholm en juin 1972, fut la première d’une série du même type qui se succédèrent ultérieurement à une période de 10 ans :

  • Nairobi en 1982,

  • Rio en 1992 (la plus célèbre qui fut qualifiée de « sommet de la Terre »),

  • Johannesburg en 2002

  • et de nouveau Rio (+20) en 2012.

La conférence de Stockholm de 1972 mérite d’être classée dans la catégorie des conférences marquant l’évolution de la pensée écologique car elle était la première et initiait la liste des «Sommets de la Terre». De plus elle plaçait pour la première fois aussi les questions écologiques au rang des préoccupations internationales majeures. Les participants à la conférence, principalement des représentants gouvernementaux, adoptèrent une déclaration énonçant une liste de principes à respecter dans le domaine de l’environnement et proposèrent un vaste plan d’actions pour lutter contre toutes les pollutions. Mais surtout la conférence décida de la création du «Programme des Nations Unies pour l’Environnement – PNUE» (En anglais UNEP pour «United Nations Environmental Programme») qui devint avec l’OMM, on l’a vu, l’une des agences techniques de l’ONU parmi les plus actives dans le domaine du climat et de l’environnement au sens large.

1-3 La commission mondiale sur l’environnement et le développement : «Le rapport Brundtland»

L’assemblée générale des Nations Unies décida en 1983 de mandater une commission de 22 membres, principalement des chefs d’États, sous la présidence de Madame Gro Harlem Brundtland, premier ministre de Norvège, pour se pencher sur l’apparente et embarrassante incompatibilité entre développement et protection de l’environnement.

La commission, composée de représentants gouvernementaux de pays de l’ouest et de l’est, du nord et du sud, s’est réunie une première fois en octobre 1984 et a publié en 1987 un rapport : «Our common future» (en français «Notre avenir à tous»), sous la signature de Madame Brundtland, d’où l’appellation plus courante de ce document : «Rapport Brundtland». Ce rapport est à l’origine du concept de «développement durable» qui par la suite a envahi le vocabulaire des organisations internationales, des medias et des politiques pour désigner un développement qui n’aliènerait pas les ressources de la planète, nécessairement limitées, mais au contraire les préserverait pour les générations futures.
Mais l’élaboration du concept de développement durable n’est pas le seul mérite du rapport Brundtland. Bien qu’il n’apporte pas d’éléments foncièrement nouveaux dans le débat sur l’environnement, ce rapport analyse l’articulation des facteurs qui lient la problématique de l’environnement à celle du développement et, en tire une conclusion forte s’exprimant par la nécessité d’inscrire la préoccupation environnementale dans toutes les politiques sectorielles des gouvernements. Le rapport Brundtland, par la diversité des experts qui l’ont conçu, issus des quatre coins de la planète, par leur qualité et leur indépendance ainsi que par la caution des Nations Unies, a donné de la respectabilité et du poids aux diagnostics et aux actions proposées. C’est ce qui a conduit certains pays à prendre des mesures très fortes ; en particulier la Communauté Européenne est allée jusqu’à modifier le traité de Rome par un «acte unique» entré en vigueur en 1987 pour l’adapter aux recommandations du rapport Brundtland, qui spécifie que l’environnement doit s’inscrire dans toutes les politiques menées par la Communauté Européenne. Á travers la portée de cet exemple européen, on mesure l’étendue du rayonnement du rapport Brundtland et son influence sur les développements politiques ultérieurs. Cette commission Brundtland et son rapport resteront pour l’histoire comme un des piliers fondateurs sur lequel se sont construites des avancées politiques majeures dans les domaines du développement, de l’environnement et du climat, à la charnière des XXème et XXIème siècles.

2- Les conférences scientifiques fondatrices

Ces conférences furent des émanations des agences des Nations Unies telles que l’OMM et le PNUE, souvent associées à des organisations scientifiques non gouvernementales telles que l'ICSU. Elles jetèrent les bases scientifiques indispensables à l’étude des questions touchant au climat en créant et en s’appuyant sur des mécanismes appropriés comme le Programme Mondial sur le Climat (PMC) et le Programme Mondial de Recherche sur le Climat (PRMC), créés notamment par l’OMM. Les progrès dans la connaissance furent évalués par les représentants des gouvernements à l’occasion de conférences rituelles particulières appelées «conférences mondiales sur le climat». Il y en eu trois de 1979 à 2009. D’autres : Stockholm (1974), Villach (1980, 1985), Toronto (1988), de nature plus scientifique et plus spécialisée, s’ajoutèrent à ces conférences mondiales sur le climat.

2-1 La conférence internationale de Stockholm de juillet 1974 : «The physical basis of Climate and climate modelling»

On peut faire débuter l’histoire de ces tentatives de structuration de l’étude de la question climatique par les agences des Nations Unies avec l’implication de responsables gouvernementaux, à la conférence internationale de Stockholm qui s’est tenue en juillet-aout 1974 et fut organisée conjointement par l’OMM, le PNUE et l'ICSU avec comme sujet : «La physique du climat et sa modélisation».

Par ses participants, c’est avant tout une conférence scientifique, mais pour la première fois la question du climat, de sa variabilité et de sa modélisation était posée et débattue à l’initiative d’une agence technique spécialisée des Nations Unies, l’OMM, devant des responsables nationaux. Elle se tenait dans le cadre du GARP et était organisée par le «Joint Organizing Committee - JOC» précurseur du «Joint Scientific Committee – JSC» (Voir Chapitre VI) L’objectif de la conférence, qui rassembla la fine fleur des atmosphériciens de l’époque -70 participants principalement américains et européens- était de jeter les bases de l’étude des fondements physiques de la dynamique du climat et de sa modélisation à l’aide des outils numériques que les ordinateurs, récemment arrivés dans les laboratoires, permettaient maintenant de réaliser. Ces outils numériques ouvraient en effet de nouvelles perspectives aux physiciens pour simuler le comportement des fluides, gazeux et liquides, entourant la Terre (voir Chapitre V ) La conclusion principale de cette conférence, sous forme de recommandation, fut de charger l’OMM et le PNUE, avec l’aide de l’ICSU, de mettre sur pied un «Programme Mondial sur le Climat –PMC». En anglais «World Climate Programme –WCP» qui élaborerait plus tard, en son sein, une composante spécifiquement dédiée à la recherche : le «Programme Mondial de Recherche sur le Climat – PMRC» ou «World Climate Research Programme - WCRP». Le climat venait de prendre sa place dans le concert international des grands problèmes traités par les agences des Nations Unies.

 2-2 La première conférence mondiale sur le climat à Genève - 1979

La première conférence mondiale sur le climat se tint à Genève en février 1979. Organisée conjointement par l’OMM et le PNUE toujours avec le soutien scientifique de l'ICSU. Ce fut la première fois que la presque totalité des représentants des nations membres de l’OMM fut alertée par l’urgence de la prise en compte du problème climatique. Les organisateurs appelèrent toutes les nations à coordonner leurs efforts pour comprendre le changement climatique et établir des plans pour son étude. Concrètement, c’est au cours de cette conférence qu’à la suite des propositions de la conférence précédente de Stockholm, il fut officiellement décidé de créer au sein du WCP une composante recherche qui devint le WCRP pour «World Climate Research Programme», en français PMRC.

2-3 Les conférences de Villach en 1980 et 1985

En écho à la prise de conscience scientifique de la gravité des conséquences d’un changement climatique possible, qui prenait de l’ampleur, une grande conférence internationale fut organisée toujours conjointement par l’OMM, le PNUE et l’ICSU à Villach en Autriche en octobre 1985. Elle était centrée sur «l’effet de serre, le changement climatique et les écosystèmes». Cette conférence qui rassembla une centaine de participants, scientifiques et représentants des gouvernements de 29 pays, succédait à une première conférence plus strictement scientifique qui s’était tenue aussi à Villach mais en 1980 dans le prolongement de la première conférence mondiale sur le climat de Genève en 1979. Ce rassemblement de chercheurs spécialistes du climat en 1980 était arrivé à la conclusion que la menace climatique était suffisamment présente pour justifier l’organisation rapide d’un programme international d’étude sur le sujet sans pour autant mettre prématurément sur pied un programme de restriction des émissions de CO2, tant les incertitudes scientifiques étaient encore grandes. Pour ce groupe réuni en 1980 la priorité était la connaissance et la nécessité de faire le diagnostic le plus précis possible de la situation actuelle. Ce premier rassemblement scientifique de Villach en 1980 appela la tenue de la grande conférence de 1985.
On attribue à la conférence de Villach de 1985 le mérite d’avoir placé la question du changement climatique sur le devant de la scène et pour la première fois sur les agendas des politiques. En effet les participants conclurent à la nécessité d’actions immédiates par les gouvernements. Pour certains scientifiques la situation apparaissait beaucoup plus urgente qu’ils ne l’avaient perçu précédemment, notamment lors de cette précédente conférence scientifique restreinte de 1980. La conclusion de la conférence est sans appel : «Le résultat de l’accroissement des concentrations de gaz à effet de serre observé conduit à penser qu’au cours de la première moitié du prochain siècle (le XXIème) l’élévation de la température globale moyenne pourrait être plus grande qu’elle ne l’a jamais été au cours de l’histoire de l’humanité». et aussi : «Tandis que le réchauffement climatique apparaît aujourd’hui inévitable du fait des agissements passés, le taux et le niveau du réchauffement futur pourraient être profondément dépendants de politiques gouvernementales appropriées sur la conservation de l’énergie, l’utilisation des énergie fossiles et les émissions de gaz à effet de serre».
Il faut noter ici que sur ce point délicat des actions de nature politico-économique à entreprendre immédiatement, la communauté scientifique internationale et ses représentants gouvernementaux commençaient à se diviser. Il y avait en effet ceux qui prônaient des restrictions immédiates d’émissions de gaz à effet de serre et ceux, en particulier les États Unis, qui rejetaient cette perspective dans l’immédiat, arguant que les inconnues étaient encore très importantes et qu’il fallait privilégier la recherche pour réduire les plages d’incertitudes avant toutes actions contraignantes visant les politiques énergétiques.

2-4 La conférence de Toronto – Juin 1988

La dimension politique de la conférence de Villach de 1985, déclencha de nombreuses réunions scientifiques, à caractère plus ou moins intergouvernemental, qui se succédèrent et s’enchaînèrent sur les questions soulevées par le changement climatique et les mesures à prendre pour y faire face.

Il y eut, en particulier, des ateliers de travail notamment à Villach encore, et à Bellagio en Italie, en 1987, qui conduisirent l’OMM et le PNUE à organiser de nouveau une grande conférence mondiale sur le climat à Toronto en juin 1988. Le titre en était : «L’atmosphère en évolution : implication pour la sécurité du globe».

 

Une nouvelle étape dans la médiatisation et la politisation de l’actualité du sujet climatique fut franchie au cours de cette conférence. Il y avait près de 400 délégués appartenant à une cinquantaine de pays. Parmi eux une centaine de scientifiques, entourés de membres de gouvernements et d’ambassadeurs, de juristes et de conseillers divers, de représentants de l’industrie, de personnalités plus ou moins médiatiques appartenant ou non à des ONG environnementalistes. Tout ce monde était noyé dans une nuée de journalistes pour lesquels il fallut aménager à la hâte de nouveaux bureaux et des équipements leur permettant de rendre compte de l’événement au monde entier. Plusieurs personnalités scientifiques furent les vedettes de cette agitation médiatique. La plus connue de ces «stars» était l’américain Jim Hansen, scientifique rigoureux mais farouche propagandiste du désastre climatique qui eut beau jeu de prédire des vagues de chaleur prochaines fréquentes -si le monde ne prenait pas immédiatement les mesures qui s’imposaient- car l’été de cette même année 1988 fut très chaud, ne démentant pas ces prévisions pessimistes !
Au-delà de son atmosphère surchauffée, cette conférence de Toronto fut cependant marquée par des résultats concrets. Outre son exposition médiatique, son principal acquit fut l’engagement de réduire de 20%, par rapport à 1988, les émissions de CO2, d’ici 2005. C’était un chiffre modeste très inférieur à ceux annoncés antérieurement (66%) mais c’était, pour la première fois, un pas décisif vers un engagement, devant le monde et ses caméras, des principaux responsables gouvernementaux présents, engagement qui restera dans les mémoires sous le nom d’ «Objectif de Toronto». L’autre importante contribution de la conférence de Toronto concerne l’engagement de l’OMM et du PNUE de mettre en place un mécanisme intergouvernemental pour l’étude du changement climatique, ses impacts et les mesures à prendre pour s’y adapter. C’était la concrétisation d’une demande déjà ancienne de la communauté scientifique et de certains décideurs nationaux, principalement américains, qui allait voir le jour officiellement sous le nom de : «Intergovernmental Panel on Climate Change – IPCC». En français : «Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat – GIEC».

2-5 Création du GIEC en 1988

Le «Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat – GIEC», ou IPCC en anglais, a été crée en 1988, conjointement par l’OMM et le PNUE, à la demande du groupe des sept pays les plus industrialisés de l’époque, le G7, devenu depuis le G8. Le GIEC regroupe tous les états membres de l’une ou de l’autre de ces deux organisations des Nations Unies que sont l’OMM et le PNUE. Sa mission est d’évaluer l’état des connaissances sur le changement du climat, de proposer des adaptations aux perturbations climatiques prévues et des mesures pour atténuer ces changements. Le GIEC réunit plus de 1 000 experts qui valident les travaux de leurs pairs et se répartissent en trois groupes de travail sur les sujets suivants :

  • Les données scientifiques du changement climatique (Groupe 1)

  • Les impacts économiques, sanitaires, humains de ce changement (Groupe 2)

  • Comment s’y adapter et les atténuer ? (Groupe 3)

 L’organisation du GIEC tend à établir la parité la plus équitable possible entre pays développés et pays en développement. Chaque groupe de travail est coprésidé par un représentant des pays développés et un représentant des pays en développement. Le GIEC tient une séance plénière annuelle, regroupant plusieurs centaines de représentants des gouvernements et des associations, ainsi que des ateliers sur des questions particulières. Ces experts sont ouverts à l’expression des ONG d’obédience écologique ou au contraire aux lobbies opposés, comme ceux des pétroliers. Les expertises des scientifiques sont soumises aux gouvernements des pays avant d’être publiées et ces rapports font l’objet de « résumé à l’intention des décideurs » dont les termes sont âprement discutés. Ce processus rigoureux et lourd garanti l’expression fidèle d’un consensus minimal de la communauté scientifique et de tous les pays sans exception. Le GIEC publie ses rapports à intervalles réguliers. Depuis sa création cinq rapports ont été publiés, en 1990, 1995, 2001, 2007 et 2014 (Encart). Dans ces rapports on trouve un état des connaissances sur le changement climatique, une estimation des liens de causalité entre ce changement et l’activité humaine, des prévisions des changements à venir en fonction de différents scénarios d’émission de gaz à effet de serre, une estimation des impacts de ces changements ainsi que les actions à envisager pour en tempérer les effets.

Comptes rendus sommaires des rapports du GIEC

En 1990, le premier rapport a essentiellement produit un diagnostic du réchauffement et de ses causes possibles parmi lesquelles l’augmentation de l’effet de serre par l’activité humaine était reconnue comme étant très probablement l’une des principales, sans que la démonstration puisse encore en être faite. C’est ce diagnostic qui a servi de base scientifique à la préparation de la convention-cadre sur le changement climatique qui fut présentée et débattue à la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement – CNUED- à Rio en juin 1992 ( Voir paragraphes et chapitre suivants.

En 1995, le deuxième rapport présente un faisceau d’éléments suggérant qu’il existe bien une influence perceptible de l’activité humaine sur le climat de la Terre ; et les progrès réalisés dans le diagnostic scientifique permettent maintenant d'identifier la cause humaine parmi les autres causes naturelles possibles.. Cependant cette part anthropique est encore difficile à évaluer précisément. Le deuxième rapport prévoit un réchauffement moyen à l’échelle de la planète de 1 à 3,5°C et une élévation du niveau de la mer de 15 à 95 centimètres d’ici 2100. Ces prévisions sont établies à l’aide de modèles numériques en plein développement grâce à la disponibilité d’ordinateurs de plus en plus puissants. Ces simulations du climat et la prévision de son évolution sont de plus en plus réalistes car elles incluent maintenant l’océan et les glaces dont les comportements dynamiques sont couplés avec ceux de l’atmosphère.
En 2001, le troisième rapport insiste sur la fiabilité encore plus grande des prévisions des modèles de climat ainsi que sur les sources de données encore plus nombreuses incluant les données issues des observations depuis l’espace par des instruments placés sur des satellites artificiels de la Terre. Ces progrès permettent de quantifier avec plus de précision les caractéristiques du changement climatique. Le réchauffement moyen est estimé être de 0,6 °C depuis 1881, date des premières observations physiques fiables. Le niveau de la mer s’est élevé de 17 centimètres depuis le début du XXème siècle. L’étendue des couvertures neigeuses et des glaces de mer s’est réduite. Les émissions de gaz à effet de serre et d’aérosols anthropiques continuent de modifier la composition chimique de l’atmosphère et les termes du bilan radiatif de la Terre, perturbant ainsi le climat. Il existe maintenant un faisceau de preuves beaucoup mieux étayées qu’antérieurement confirmant que l’essentiel du réchauffement est bien dû aux activités humaines avec une probabilité estimée à 60%. Les modèles climatiques, encore peu précis, prévoient cependant que la température moyenne de la Terre devrait s’élever de 1,4°C à 5,8°C en fonction des scénarios d’émission retenus et le niveau moyen des océans s’élever de 10 à 90 centimètres entre 1990 et 2100.
En 2007, le quatrième rapport a été rendu public et ouvert à la discussion à partir de janvier avant d’être définitivement publié en plusieurs volumes au cours de l’année. Le rapport du groupe 1 confirme, avec encore plus de certitude, estimée maintenant à 90%, que les émissions de gaz à effet de serre anthropiques sont responsables du changement climatique en cours. Celui-ci se manifeste de plus en plus clairement notamment dans les hautes latitudes où un réchauffement de 2°C est constaté depuis une dizaine d’années dans l’arctique, divisant par 2 l’étendue des glaces de mer en été et livrant ainsi cette mer polaire, longtemps inaccessible, à la navigation et à l’exploitation de ses ressources, mais en perturbant dramatiquement la faune et le mode de vie de ses habitants. Les modèles annoncent, pour 2100, en fonction des différents scénarios d’émission, une hausse prévisible des températures moyennes de la planète de 1,1°C à 6,4°C avec une fourchette plus probable de 1,8°C à 4°C ainsi qu’une élévation du niveau moyen des océans comprise encore entre 10 et 90 centimètres. Les modèles prévoient encore, bien que moins sûrs d’eux en ce qui concerne l’évolution du cycle de l’eau, des précipitations accrues dans les hautes latitudes et au contraire un déficit de pluviométrie dans les régions subtropicales ainsi que sur le pourtour méditerranéen.
En ce qui concerne les impacts et les conséquences du changement climatique, le rapport du groupe 2 indique que les régions affectées par la sécheresse vont s’étendre et au contraire des précipitations violentes et des inondations frapperont d’autres régions. Les écosystèmes seront aussi très perturbés et subiront des migrations, principalement en latitude ; des extinctions sont aussi à prévoir pour les espèces, plus fragiles, qui ne pourront pas s’adapter au changement. 20 à 30 % des espèces végétales et animales pourraient disparaître. D’autres impacts du changement climatique aux conséquences socio-économiques cruciales pour tous les pays, développés ou non, sont aussi anticipés dans les domaines de la forêt, de la pêche, des zones côtières, de l’habitat et de la santé. Le groupe 3 dont le rapport est principalement destiné aux décideurs préconise d’agir vite, à un coût acceptable pour nos économies en investissant dans les énergies nouvelles créatrices d’emplois et de richesses.

En 2014, bien que le rapport de synthèse (prévu pour octobre) ne soit pas encore disponible, des éléments scientifiques traitant du changement climatique ont été publiés dans le cadre du 5ème rapport du GIEC dès septembre 2013. En mars 2014, publication du rapport sur les impacts, l'adaptation et la vulnérabilité. Enfin, en avril 2014, publication d’un rapport sur l'atténuation du changement climatique.
Les apports nouveaux de ce 5ème rapport du GIEC, comparativement aux précédents et vus à travers ces publications, peuvent être résumés ainsi :

  • Le lien entre les activités humaines et l'accroissement des températures constaté est passé du niveau « très probable » en 2007 dans le 4ème rapport au niveau « extrêmement probable (probabilité de 95 %) » en 2014.

  • De nouveaux scénarios et une nouvelle méthodologie ont été utilisés dans le 5ème rapport pour réaliser des prévisions avec des modèles d’évolution climatique. Antérieurement les scénarios envisagés étaient basés sur différents niveaux d'émissions de GES. Les nouveaux scénarios au contraire prennent comme base différents niveaux d'équilibre énergétique et en déduisent les niveaux de concentration de GES correspondant à des scénarios socio-économiques qui seraient compatibles.

  • Alors que les précédents rapports proposaient uniquement des prévisions pour la fin du XXIème siècle, le 5ème rapport fait état de prévisions décennales couvrant la période 2012-2035. Des prévisions à très long terme, à l'horizon 2300, sont également proposées.

  • Les émissions humaines d'aérosol, qui réduisent le flux solaire incident et atténuent ainsi le réchauffement climatique, sont revues à la baisse.

  • La hausse du niveau moyen des océans serait plus importante que prévu antérieurement. Elle serait située entre 29 et 82 cm d'ici la fin du 21ème siècle et serait due principalement à la fonte du Groenland qui avait été sous-estimée précédemment.

  • Les événements climatiques extrêmes seront plus intenses et plus fréquents. Cela se marquera principalement dans les précipitations qui pourraient devenir diluviennes dans les régions normalement humides actuellement. En revanche les régions sèches deviendraient encore plus sèches

  • Le «hiatus thermique», ou ralentissement apparent du réchauffement, observé ces deux dernières décennies, ne remet pas en cause le réchauffement anthropique qui affecte la Terre depuis environ 1850.

Concrètement, les groupes de travail II et III réaffirment que seul un scénario de réduction des émissions de GES est en mesure de maintenir la hausse des températures sous le seuil de 2°C. Et ce seuil de 2°C ne sera contenu que si les trajectoires des émissions de GES sont parmi les plus favorables envisagées, ce qui nécessiteraient de réduire les émissions de 10 % environ par décennie jusqu'à la fin du siècle.

 

2-6 La seconde conférence mondiale sur le climat à Genève en octobre 1990

Á la fin des années 1980 et après la création du GIEC, la tenue d’une seconde conférence mondiale sur le climat fut recommandée par le conseil exécutif de l’OMM. En effet l’intérêt du public pour le changement du climat, la prise de conscience politique, la sortie prochaine du premier rapport du GIEC sur l’état des connaissances, appelait une mise au point justifiant la tenue de cette conférence. Elle fut organisée à Genève du 29 octobre au 9 novembre 1990 par l’OMM assistée encore du PNUE  et de l'ICSU.

La conférence rassembla les représentants de 137 pays ainsi que la communauté européenne. S’appuyant sur les premières conclusions des rapports des trois groupes de travail du GIEC, la déclaration finale réaffirma que le changement climatique est une préoccupation sérieuse touchant l’humanité toute entière et que devant la menace de dommages irréversibles considérables, le manque de certitudes scientifiques ne doit pas être une excuse à l’absence d’actions immédiates pour prévenir une dégradation majeure de notre environnement.
C’est ce qui fit que cette seconde conférence mondiale sur le climat affirma un caractère beaucoup plus politique que la première, 11 ans plus tôt. Ainsi, après une semaine de présentations scientifiques sur tous les aspects du changement climatique, la conférence élabora une «déclaration ministérielle» sur la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Issue de difficiles négociations entre les représentants des gouvernements des 137 États représentés, cette déclaration ministérielle fut cependant une déception pour la majorité des participants car elle ne donnait pas d’objectifs précis quantitatifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ni ne désignait le gaz carbonique comme le principal gaz polluant.
Cependant la conférence peut être créditée de plusieurs avancées significatives. Parmi celles-ci la proposition d’instaurer une convention cadre sur les changements climatiques. Cette convention appelée : «United Nations Framework Convention on Climate Change – UNFCCC», sera mise sur pied en 1992 par le sommet de Rio (Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement – CNUED – UNCED en anglais) et engendrera le «protocole de Kyoto» dont on verra plus loin l’importance. Enfin la conférence proposa la création d’un «Système Mondial d’Observation du Climat – SMOC» ; en anglais «Global Climate Observing System - GCOS» qui fut officiellement établi en 1992 conjointement par l’OMM, le PNUE, l’ICSU et la COI dépendant de l’UNESCO. (voir Chapitre IV).

2-7 La troisième conférence mondiale sur le climat à Genève en Septembre 2009

Les décennies 1990 et 2000 furent riches en développements politiques autour de la question climatique. On examinera plus en détail, dans les chapitres suivants, ces développements qui tournent autour de plusieurs événements dont les principaux sont :

  • les rapports successifs du GIEC,

  • les conférences décennales appelées quelquefois les «Sommets de la Terre» dont la plus marquante fut la «Conférence des Nations unies sur l’Environnement et le Développement – CNUED» qui s’est tenue à Rio en 1992,

  • la conférence de Kyoto et son protocole signé avec difficulté en 1997… etc.

L’ampleur de ces événements et leurs impacts sur le public et les gouvernements incita l’OMM à proposer une troisième conférence mondiale sur le climat qui s’est tenue à Genève la première semaine de septembre 2009. Cette troisième conférence n’ambitionnait pas, comme les deux précédentes, une avancée marquante de la cause climatique par la création ou la proposition de dispositifs nouveaux et spectaculaires. Ceux-ci étaient déjà en place avec le GIEC, la convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique et ses développements, les engagements politiques découlant du protocole de Kyoto et les sommets qui avaient rassemblé plusieurs chefs d’état et donné un retentissement considérable aux problèmes environnementaux et climatiques. Tous ces événements étaient enveloppés par une très intense agitation médiatique autour de partisans convaincus de l’urgence de mesures à prendre pour limiter l’usage de carbone fossile et de sceptiques – appelés climato-sceptiques - mettant en cause la réalité même de l’origine humaine du changement climatique.
Plus modestement l’objectif de cette troisième conférence mondiale sur le climat était de faire progresser le développement des services climatologiques et leurs applications dans l’intérêt des sociétés. Autrement dit créer un cadre général qui lierait, en prise directe, l’avancée des connaissances scientifiques dans la prévision du climat et les besoins des usagers potentiels de ces informations, décideurs et aménageurs divers, services de santé, agriculteurs, bref ! La société dans son ensemble. Aussi cette troisième conférence battit des records de participants tant par leur nombre - plus de 2500 appartenant à 163 pays - que par leur diversité et leur qualité :

  • huit chefs d’États et 80 ministres,

  • 59 organisations internationales,

  • des centaines de scientifiques de différentes disciplines,

  • mais aussi des fournisseurs de services météo et climatiques publics et privés,

  • des décideurs économiques et politiques de tous niveaux accompagnant les chefs d’États….

La conférence s’est déroulée en deux parties (appelées segments) :

  1. Un segment «experts» durant les trois premières journées réunissait des climatologues et des spécialistes provenant de divers secteurs touchés par le changement climatique.

  2. Un segment dit de «haut niveau» rassemblant pendant deux jours des chefs d’États et de gouvernements pour mettre sur pied un «cadre mondial pour les services climatologiques» Le résultat principal de la conférence fut donc la proposition, examinée par les représentants gouvernementaux, de créer un cadre mondial pour les services climatologiques destiné à faire face au défi climatique sur deux fronts :

    • l’ «atténuation» des impacts du changement climatique

    • et l’«adaptation» des sociétés à ce changement.

Les rapports du GIEC, les conférences mondiales sur le climat et les grandes conférences scientifiques des années 1980- 2000 constituent la partie émergée de l’iceberg dont le cœur est constitué de la gigantesque mobilisation des scientifiques qui, après les travaux pionniers de quelques personnalités ayant, avant d’autres, perçu la gravité et l’importance du sujet climatique, s’est organisée autour des agences techniques des Nations Unies, comme l’OMM et le PNUE. Cette mobilisation sans précédent a fait faire un bond considérable à la connaissance du climat, sa variabilité naturelle et son changement sous l’effet des activités humaines. Le travail des scientifiques et les progrès de la connaissance sont difficiles à évaluer et à traduire au public, d’autant que par nature l’activité scientifique est souvent individuelle, compétitive et contradictoire, chaque scientifique voulant montrer à ses pairs l’originalité et la pertinence de ses idées et de ses travaux. Les grands programmes scientifiques internationaux présentés précédemment ont contribué à resserrer les liens entre les acteurs de la recherche et à faire converger des disciplines scientifiques qui à l’origine n’avaient pas, ou peu, de points communs. Mais, compte tenu de l’implication sociétale et humaine sans précédent de la question climatique, il était indispensable d’assurer la visibilité extérieure des résultats de cet énorme effort de recherche, qui a mobilisé des milliers d’acteurs scientifiques et aussi de gestionnaires de la science à des degrés divers. C’est cette tâche que les conférences mondiales sur le climat, les grandes conférences scientifiques généralistes ou spécialisées ainsi que le GIEC ont assurée auprès des représentants gouvernementaux et du public sous l’œil des medias et des militants des multiples associations civiles soucieuses de l’environnement. L’échelon véritablement politique, traité dans ce qui suit, s’est ancré sur cette prise de conscience publique faite de débats, parfois agités, initiés par ces grandes et moins grandes conférences des années 1980-2000, bien relayées par les medias.

3 - Les conférences intergouvernementales et les organisations  politiques

On a noté antérieurement que les décennies 1990 et 2000 ont été particulièrement riches en développements politiques dans les domaines de l’environnement et du climat. Mais l’enchaînement et l’entrecroisement des conférences et autres manifestations et institutions autour de la question climatique, depuis le pôle scientifique jusqu’au pôle politique, est très complexe et difficile à décrire. Dans les sous-chapitres précédents on a tenté d’isoler les manifestations qui touchaient à la généralité des problèmes environnementaux ainsi que *+celles qui avaient un caractère plus spécifiquement scientifique mais néanmoins intergouvernemental sous l’égide des agences techniques des Nations Unies telles que l’OMM, le PNUE…. Dans ce sous-chapitre nous allons tenter de montrer comment s’est enraciné, puis construit, le pôle politique jusqu’à l’implication des chefs d’États dans des rassemblements intergouvernementaux de type G8, G20... à partir du consensus scientifique.
On peut situer le début de l’implication effective des politiques dans la question climatique à la «convention-cadre sur le changement climatique» proposée à Rio en 1992 et se servir de ses développements, conduisant au protocole de Kyoto et à ses suites, comme fil conducteur pour tracer l’évolution de l’implication de la politique internationale dans le dossier climatique. Mais il est nécessaire de positionner cette convention-cadre dans le contexte plus large des manifestations multiples qui se sont tenues au cours de ces années. Pour cela on peut considérer que deux catégories de conférences, en partie évoquées et décrites précédemment, opérèrent la transition entre le pôle scientifique et le pôle strictement politique du dossier climatique :

  1. Les «conférences mondiales sur le climat», organisées principalement par l’OMM à Genève. Il y en eut trois (exposées dans le chapitre précédent) :

    • la première en février 1979,

    • la seconde en novembre 1990

    • et la troisième en septembre 2009.

    C’est au cours de la deuxième conférence mondiale sur le climat de 1990 que l’idée d’une convention internationale sur le changement climatique est née. Elle s’est traduite par une mention particulière dans sa déclaration finale : invitant les pays participants à travailler à l’instauration d’une convention sur le climat, dont les principes directeurs seraient fixés par un «Comité Intergouvernemental de Négociation», et qui devait être prête pour être présentée au «sommet de la Terre» prévu 3 ans plus tard à Rio en 1992.
     

  2. D’autres conférences des Nations Unies rassemblant des dirigeants mondiaux et visant à démontrer une capacité collective de gestion des problèmes planétaires virent le jour durant cette période. De nature politique et plus communément appelées «sommets de la Terre», ces conférences se réunirent tous les 10 ans ; le premier de ces sommets s’est tenu à Stockholm en 1972 (voir paragraphe précédent) ; les suivantes se sont tenues :

    • à Nairobi en 1982,

    • à Rio en 1992, *

    • à Johannesburg en 2002

    • et de nouveau en 2012 à Rio (Rio plus 20) pour le vingtième anniversaire de celle de 1992.

    C’est la conférence qui s’est tenue à Rio en 1992, appelée «Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement - CNUED» qui a vu la signature de la convention sur le changement climatique qui ultérieurement a conduit au «protocole de Kyoto»  et qui peut être considérée comme l’entrée du politique dans la question du changement climatique.

Ces conférences intergouvernementales marquèrent la prise en charge par les politiques des inquiétudes manifestées par différentes catégories de citoyens :

  • scientifiques,

  • mouvements écologiques et environnementalistes divers relayés par les media

  • et le grand public.

Ces conférences, assemblées, sommets, jusqu’aux traités intergouvernementaux font aujourd’hui l’actualité, traduisant l’emprise de la sphère politique sur la question climatique après la phase de prise de conscience intérieure qui s’est faite au sein de la sphère scientifique et sa diffusion progressive dans la société.

3-1 La Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement (CNUED)Rio de Janeiro, 1992

Plus connue sous son vocable anglais : «United Nations Conference on Environnement and Development - UNCED», cette conférence de Rio, dite du «sommet de la Terre», fut une réussite et un événement d’envergure mondiale qui marqua la globalisation des préoccupations environnementales et climatiques par un niveau de médiatisation encore inconnu sur un tel sujet. Plus d’une centaine de chefs d’États et de gouvernements y participèrent -ce qui représentait le plus grand rassemblement de dirigeants mondiaux jamais réuni- ainsi que plus de 1 500 ONG. Le sommet de Rio fut marqué par l’annonce d’un programme ambitieux de lutte mondiale contre les changements climatiques, au moins sur le papier. La conférence de clôture du sommet fut conclue par «La déclaration de Rio» qui fixe des lignes d’actions pour assurer une meilleure gestion de la planète et faire progresser les concepts régissant les droits et les responsabilités des États. Quatre documents furent signés par tous les chefs d’États et de gouvernements présents :

  • l’«Agenda 21» qui comprenait plus de 2 500 recommandations dont beaucoup n’ont pas été suivies d’effet et ont sombré dans l’oubli ;

  • Une convention sur la protection de la biodiversité biologique ;

  • Une convention sur la lutte contre la désertification, associée à une déclaration sur la gestion, la conservation et le développement durable des forêts ;

  • Enfin, une convention-cadre sur le changement climatique.

Cette conférence de Rio en 1992, la troisième depuis Stockholm en 1972, à intervalles de 10 ans, appelées après coup les «sommets de la Terre», fut suivie de celle de Johannesburg en 2002 et de nouveau Rio (appelée Rio + 20) en 2012.

La conférence de Johannesburg en 2002 eut un certain poids politique dû à la présence d’une centaine de chefs d’État, dont Jacques Chirac, invités à réitérer leur engagement politique en faveur du développement durable et du partenariat Nord-Sud. Cependant, bien que l’événement avec plus de 40 000 délégués, fut, parait-il, le plus grand rassemblement jamais organisé par les Nations Unies, il est aujourd’hui presque totalement oublié.

La conférence Rio + 20, à l’incitation de l’Organisation des Nations Unies, devait commémorer le vingtième anniversaire de la CNUED de Rio en 1992. Cette «Conférence des Nations Unies sur le Développement Durable - CNUDD» était le cinquième «sommet de la Terre» et se voulait être un approfondissement des engagements des sommets antérieurs. Convoquée par la 64ème Assemblée Générale des Nations Unies, la conférence avait deux objectifs principaux :

  1. Expliciter l’économie verte dans le développement durable ;

  2. Donner un contenu au cadre institutionnel du développement durable.

Annoncée par une série de réunions préparatoire à partir de 2010 (New York en mai 2010 et en mars 2011, Rio en juin 2012) et abondamment médiatisée, la conférence, qui s’est tenue du 20 au 22 juin 2012, s’est terminé par la ratification d’un texte par les chefs d’États des 188 pays représentés. En fait ce texte de 49 pages, intitulé : «L’avenir que nous voulons» a été diversement jugé :

  • négativement par une majorité de participants, notamment les nombreuses ONG, le trouvant seulement déclaratif et sans aucune contrainte ni rupture avec le monde actuel ;

  • positivement au contraire, comme un bon point de départ, par le pays organisateur, le Brésil, et sa présidente, Dilma Rousseff, soucieuse de donner une bonne image des capacités d’organisation de son pays.

Les promoteurs de la conférence étaient également soucieux de gommer l’impression générale de confusion et d’irrésolution qui se dégageait des prises de position irréconciliables de groupes de pays aux intérêts divergents. De fait les leaders de nombreux grands pays, notamment États UnisAllemagneRoyaume Unis, étaient absents. Le président français, François Hollande qui s’était déplacé, se déclara déçu.
Au final cette assemblée a fait couler beaucoup d’encre, suscité des espoirs, mais engendré aussi beaucoup de déceptions et de frustrations. Force était de constater que la maîtrise de la croissance verte, objectif affiché de cette manifestation d’échelle planétaire, n’a pas encore réussie à se forger une place solide et durable dans l’espace de la pensée politique mondiale du début du XXIème siècle.

3-2 La convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique

Plus connue sous son vocable anglais : «United Nations Framework Convention on Climate Change - UNFCCC», la «Convention-cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique - CCNUCC» en français - fut signée à la fin de la conférence de Rio, et ratifiée plus tard, par plus de 160 pays incluant individuellement la Communauté Européenne.

La Convention-cadre est entrée en vigueur en mars 1994. Elle stipule dans son article 2 que :

«son objectif ultime est de stabiliser les concentrations de gaz à effet- de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropiques dangereuse du système climatique… dans un délai suffisant pour que l’adaptation aux changements climatiques des écosystèmes et des sociétés humaines soit possible».

D’autres engagements ont été pris notamment sur les taux d’émission des pays développés et sur l’aide à apporter aux pays émergents et aux pays en développement. Ainsi les pays développés, les pays émergents et la Communauté Européenne se sont engagés à adopter des mesures pour, d’ici l’an 2000, stabiliser leurs émissions de gaz à effet de serre à leur niveau de 1990. Par ailleurs, les pays développés et la Communauté Européenne se sont engagés à financer les coûts des aménagements structurels des pays émergents et en développement pour qu’ils puissent aussi respecter leurs engagements. Au final ces objectifs sont apparus assez «volatils» car peu contraignants, le Nord voulant protéger son industrie et le Sud garder sa liberté d’exploiter ses forêts comme bon lui semble tout en ne freinant pas son industrialisation naissante.
Pour appliquer concrètement ses résolutions, la convention-cadre s’est dotée d’un organe directeur appelé «la Conférence des Parties» ; en anglais «Conference Of Parties – COP» qui doit se réunir annuellement et rassembler les États signataires pour mettre en pratique les engagements pris. C’est au cours des réunions successives de ces premières Conférences des Parties (COP 1, 2, 3) , à partir de 1995, que des négociations, parfois très difficiles, ont permis de franchir les obstacles conduisant finalement à la mise en œuvre d’un traité international, appelé le «Protocole de Kyoto», du nom de la ville où s’est réunie la COP 3, en 1997, pour signer ce traité visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

 3-3 Le Protocole de Kyoto

On peut distinguer dans le protocole de Kyoto un triple contenu : les objectifs de réduction des gaz à effet de serre, les mécanismes de flexibilité s’appliquant à ces réductions, les conditions d’entrée en vigueur du traité :

  1. Les objectifs de réduction sont individualisés par pays ou par groupe de pays. Pour les pays développés la réduction moyenne imposée est de - 5,2% par rapport au nivaux atteints en 1990, pour une échéance située entre 2008 et 2012. Les pays en développement, y compris les pays émergents (Chine, Brésil,…) sont exemptés de contraintes chiffrées mais invités à limiter leurs émissions. Ces objectifs de réduction prennent en compte six gaz à effet de serre : dioxyde de carbone, méthane, oxyde nitreux et trois composés carbonatés complexes substituts aux CFC interdits par le protocole de Montréal.
     

  2. Les mécanismes de flexibilité ont également trois objectifs :

    • Faciliter les efforts des pays développés pour limiter leur usage de systèmes de production parmi les plus polluants et les moins efficaces ; pour cela il leur est proposé un mécanisme de permis négociables sur un marché de permis d’émission.

    • Promouvoir des mécanismes de développement propres en permettant aux pays développés de réaliser leurs objectifs tout en investissant dans des projets initiés par des pays en développement. C’est, en partie, une réponse à la demande d’aide de ces pays en développement pour qu’ils puissent assurer un développement le plus propre possible.

    • Mettre en œuvre conjointement des financements de projets visant à développer le stockage de carbone et la réduction des émissions.
       

  3. Les conditions d’entrée en vigueur du traité sont strictes et assez complexes dans leurs détails. Il faut qu’au moins 55 pays signataires du traité l’aient ratifié (cette condition a été satisfaite en mai 2002) ; il faut aussi que le nombre et l’importance (en terme de quantité d’émission de dioxyde de carbone) des pays ayant ratifié le traité représente au total au moins 55% des émission de dioxyde de carbone du monde entier rapporté à l’année 1990 (cette condition a été satisfaite en novembre 2004 avec la ratification de la Russie). Le traité est validé et son application nationale est possible dans chaque pays signataire 90 jours après la ratification du dernier pays nécessaire au quorum validant le traité. La date d’entrée en vigueur du traité par les pays l’ayant ratifié est intervenue le 16 février 2005. En France il a fait l’objet d’un décret daté du 22 mars 2005.

Le protocole de Kyoto a fait l’objet d’innombrables commentaires négatifs et positifs. Parmi les commentaires négatifs il y a ceux qui soulignent la modestie des objectifs envisagés face aux menaces d’un bouleversement climatique et qui mettent en avant les énormes difficultés rencontrées au cours des négociations, chaque catégorie d’intervenants défendant pied à pied ses intérêts avant celui de la planète.

Mais une autre faiblesse plus fondamentale du traité apparaît en contrepoint dans l’évitement d’un problème de fond, à peine esquissé bien qu’au cœur des débats : celui des rapports entre le Nord et le Sud et l’opposition entre développement et environnement. Le traité n’oblige que les pays développés du Nord à réduire leurs émissions de gaz polluants. Or les émissions des pays émergents et des pays pauvres croissent rapidement et dépasseront bientôt celle des pays du Nord. Face à cette situation grevant lourdement le futur, certains pays développés, principalement les américains, insistent pour que les pays émergents et pauvres contribuent aussi aux réductions des émissions. Ces pays refusent de se soumettre à ces contraintes environnementales qui freineraient leur développement. Ils mettent en avant le fait historique que le Nord a assuré son développement depuis plus de deux siècles en puisant sans restrictions dans les ressources naturelles et en émettant des pollutions de tous ordres sans se soucier de leurs conséquences. Le Nord est responsable de la situation actuelle. Le Sud demande donc au Nord des compensations pour lui permettre un développement propre ; mais ces compensations, principalement financières, lui sont refusées sans des garanties solides, ce qui alimente d’interminables débats sur les conditions d’allocation de ces soutiens financiers à presque toutes les réunions annuelles des COP depuis 1992.
Le coté positif du dossier est à trouver dans l’éveil de la communauté internationale, et la prise de conscience au niveau des chefs d’États, d’un problème de dimension planétaire qui pour la première fois dépasse de loin les conflits antérieurs liés à des affrontements d’intérêts nationaux ou à des oppositions, chaudes ou froides, entre blocs relevant de la géopolitique. En dépit de la modestie de ses objectifs, de l’étalage des égoïsmes nationaux, des doutes sur son efficacité, un tel traité représente un tournant politique majeur aux conséquences économiques encore difficilement imaginables. Pour la première fois des pays industrialisés se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, en acceptant de compliquer ainsi sciemment leur approvisionnement énergétique. Les sources d’énergie du monde développé devront se diversifier, obligeant ces pays à reconsidérer les principes sur lesquels est fondé leur développement économique, ouvrant peut-être ainsi la porte à un autre monde.

 3-4 Les conférences des parties (COP) de la Convention-Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC)

La première Conférence des Parties (COP 1) s’est tenue à Berlin en mars 1995, un an après l’entrée en vigueur de la convention-cadre sur le changement climatique. Elle marque un certain désenchantement après l’euphorie qui avait marqué la conférence de Rio trois ans plus tôt. Les participants constatent qu’il est très difficile d’appliquer les engagements pris par la convention-cadre qui par ailleurs est assez floue sur bien des points. Il est alors décidé d’élaborer un instrument nouveau appelé le «Mandat de Berlin» qui reconnaît l’inadéquation des engagements actuels de la convention, notamment ceux concernant l’aide des pays développés aux pays du sud, pour atteindre les objectifs généraux de la conférence de Rio. Le «Mandat de Berlin» étend et contraint plus rigoureusement les engagements des pays développés et initie un cycle de négociations pour mettre au point de nouveaux engagements pour la période au-delà de l’an 2000. Il est également donné mandat aux pays développés de mettre en place des engagements précis destinés à ramener leurs émissions au niveau de 1990 comme ils s’y sont engagés. Ce nouveau cycle de négociation aboutira à des propositions chiffrées de réduction par pays (ou groupes de pays), qui feront l’objet du protocole de Kyoto (voir plus loin).

La COP 2 s’est tenue à Genève en juillet 1996. Elle a été principalement marquée par ce qui a été appelé la «Déclaration de Genève» précisant les orientations des négociations en cours et approuvant le deuxième rapport du GIEC en considérant qu’il apporte une base de connaissance scientifique suffisamment solide pour justifier un renforcement immédiat des actions de lutte contre le réchauffement climatique. La «déclaration de Genève» approfondit aussi le «mandat de Berlin» en invitant les participants à fixer des objectifs de réduction d’émissions chiffrés et contraints juridiquement.

La COP 3 s’est tenue à Kyoto en décembre 1997, surtout connue pour avoir initié et signé le célèbre protocole de Kyoto (voir paragraphe précédent). En fait, les modalités de ce traité étaient discutées depuis plusieurs années et avaient été à l’ordre du jour de toutes les réunions qui s’étaient tenues depuis la conférence de Rio en 1992 pour tenter de donner un contenu à la Convention-cadre sur le changement climatique.

Au cours de cette COP 3, qui aboutit au protocole de Kyoto, quatre groupes de pays se sont opposés :

  1. la Communauté Européenne,

  2. un regroupement de 130 pays en développement,

  3. les pays actuellement les plus directement menacés comme les petits États insulaires se déclarant les «victimes non coupables du réchauffement climatique»,

  4. enfin, des opposants à l’instauration de quotas appelés un peu ironiquement les «membres du carbon Club» regroupant de nombreux pays développés incluant l’Amérique du nord, le Japon, l’Australie et les pays producteurs de pétrole du Moyen Orient.

Néanmoins, un protocole fut signé, rassemblant les représentants des 160 pays présents sur une position commune. Ce fut un événement de portée mondiale, largement médiatisé, qui restera dans l’histoire sous l’appellation de «Protocole de Kyoto».

La COP 4, à Buenos Aires en décembre 1998, était destinée à définir les modalités pratiques des décisions prises à Kyoto concernant la signature du Protocole de Kyoto.

Cette conférence fut un échec, les 180 pays participants se divisèrent en trois groupes irréductibles :

  • Certains pays du Nord autour des américains réaffirmèrent leur volonté d’obliger les pays en voie de développement à participer eux aussi aux réductions d’émissions arguant que la Chine, par exemple, allait bientôt dépasser l’occident par le taux d’émission de gaz carbonique de ses innombrables centrales à charbon.

  • Mais les pays en développement refusèrent par principe de céder quoi que ce soit à des pays qui polluent 20 fois plus qu’eux par tête d’habitants.

  • Les Européens tentant de trouver une issue au conflit demandèrent un geste aux américains en leur proposant de s’engager à réduire leurs permis négociables de droits à émettre, et les poussant ainsi à réduire concrètement leur émissions ; ils refusèrent obstinément tant que les pays en développement n’acceptaient pas le principe de leur participation aux réductions des émissions.

La situation était bloquée et elle le resta durant toute la durée de la conférence qui se termina misérablement par un accord sur un calendrier de travail.

La COP 5 à Bonn en novembre 1999 fut aussi un demi- échec comme la précédente. Les américains restèrent sur leur position refusant de s’engager sur des réductions d’émissions si les pays en développement ne participaient pas eux-mêmes à ces réductions. Les pays pétroliers du Moyen Orient tentèrent de tirer avantage de ces conflits pour faire capoter l’ensemble du processus de mise en pratique du traité. La Communauté Européenne, le Japon et les pays en développement durcirent leur position. Au final aucun consensus majeur sur le contenu pratique du traité, notamment en terme d’engagement sur des taux de réduction d’émission, ne fut atteint. Quelques résultats cependant sur la précision de la mesure des émissions et les moyens de contrainte sur les pays émetteurs qui ne respectent pas leurs engagements. Face à ce nouvel échec, une organisation de petits pays insulaires, premières victimes potentielles de l’élévation du niveau de l’océan et menacées de disparition : «Alliance Of Small Islands States - AOSIS» émit une protestation solennelle qui eu un large écho médiatique.

La COP 6 à La Haye en novembre 2000 est également à oublier ; ce fut un échec total qui nécessita la tenue d’une COP 6 bis six mois plus tard. Devant des exigences américaines nouvelles, les pays européens, mal préparés et divisés, ont refusé le texte de l’accord final. Il fut alors décidé de poursuivre les négociations au cours d’une nouvelle conférence (COP 6 bis) qui se tint à Bonn six mois plus tard en juillet 2001. En l’absence des américains, les 180 pays présents se sont enfin mis d’accord sur un texte explicitant l’application du protocole de Kyoto. Des compromis ont été trouvés sur l’usage du marché des droits à émettre et sur la création d’un fond destiné à aider les pays en voie de développement à faire face aux dérèglements climatiques.

La COP 7 à Marrakech en novembre 2001, marquée par la sortie de crise trouvée in extremis au cours de la COP 6 bis de Bonn, s’est tenue sans les américains. Ils maintinrent leur position de retrait adoptée en 2001 au cours de la COP 6 bis de Bonn, se contentant d’un siège d’observateur et refusant toute participation active dans les négociations en dépit des pressions de certains pays amis du Nord. Les négociateurs des pays représentés s’attachèrent à finaliser les détails opérationnels du protocole de Kyoto ouvrant la voie à sa ratification par le plus grand nombre possible de pays, sachant qu’au moins 55 pays représentant plus de 55% des émissions de gaz à effet de serre devaient le ratifier pour le rendre effectif. Le principal résultat de la conférence se traduisit par un document : «Les accords de Marrakech», qui propose une traduction juridique des règles de mise en œuvre du Protocole de Kyoto.

La COP 8 à New Delhi en octobre 2002 a été principalement marquée par une «Déclaration ministérielle» dite de Delhi appelant les pays développés à intensifier leurs efforts pour le transfert vers les pays pauvres des technologies modernes de façon à atténuer l’impact du changement climatique sur ces pays en voie de développement. Les États Unis, à la suite de l’élection de George W. Bush, et l’annonce de leur refus de signer le protocole de Kyoto, apportèrent paradoxalement leur soutien aux pays du Sud pour privilégier le thème de l’adaptation et de la réduction de la vulnérabilité opposé à celui de la réduction (ou atténuation) des émissions soutenu par les européens et constituant le noyau dur du protocole de Kyoto.

La COP 9 à Milan en décembre 2003 s’est principalement attachée à adapter le «Fond pour l’Environnement Mondial - FED», créé depuis 1991 par la banque mondiale, et deux agences techniques des Nations Unies : le PNUE pour l’environnement et le PNUD pour le développement, pour aider les pays en voie de développement à mieux s’adapter au changement climatique. Le fond sera également utilisé pour le renforcement des capacités de transfert technologique du Nord vers le SUD.

La COP 10 à Buenos Aires en décembre 2004 s’est penchée sur les dimensions éthiques du changement climatique et a analysé les progrès accomplis depuis la première Conférence des Parties près de 10 ans plus tôt à Berlin. La COP 10 s’est aussi intéressée à la double question de l’atténuation et de l’adaptation aux changements climatiques. Un plan d’action, «Buenos Aires Action Plan», pour aider les pays en voie de développement à faire face à ces problèmes d’atténuation et d’adaptation, a été mis en place. Les délégués ont également commencé à discuter des mécanismes de répartition des réductions d’émission de gaz à effet de serre du post-Kyoto, lorsque, après 2012, les engagements du protocole de Kyoto seront devenus caduques.

La COP 11 et la MOP à Montréal en décembre 2005 réunirent une COP et la première «MOP 1 - Meeting Of Parties» du protocole de Kyoto qui venait d’être entré en vigueur le 16 février 2005. C’est cette première réunion des «Parties» du protocole de Kyoto enfin en action qui donne une importance particulière à ce rassemblement de Montréal dont le sigle officiel devient : COP 11/MOP 1. Ce fut une conférence gigantesque qui battit tous les records de participation avec plus de 10 000 délégués et une couverture médiatique considérable. Le principal résultat commun aux deux conférences, ainsi jointes pour l’occasion, est inclus dans un document appelé le «Processus de Montréal». Il indique les pistes possibles de recherche pour de nouveaux accords pour la période post 2012, date de la fin des accords du protocole de Kyoto. A l’époque où le protocole de Kyoto avait été conclu, les négociateurs pensaient que les engagements post Kyoto (après 2012) se placeraient dans le prolongement des engagements de Kyoto. Mais en 2005, lorsque l’on commença à penser à la période post Kyoto, la situation internationale et le monde en général avait changé vis-à-vis de ce qu’ils étaient en 1997 lorsque avait été lancé le protocole de Kyoto. Il était donc essentiel de se remettre au travail dès 2005 pour penser et construire de nouveaux accords, plus ambitieux, tenant compte de l’avancée des connaissances synthétisées dans le troisième rapport du GIEC et en profitant de l’expérience des difficultés, finalement surmontées, de la mise en route du protocole de Kyoto.

La COP 12/MOP 2 à Nairobi en novembre 2006 fut marquée par des communiqués de presse assez désobligeants à l’égard de certains congressistes qualifiés de «touristes climatiques», dont le train de vie lié aux indemnités de mission et aux coûts des déplacements, coûts à la fois financiers et écologiques en terme d’émission de carbone, fut jugé exorbitant par certains au regard des restrictions et des problèmes des pays pauvres dont ces congressistes débattaient. La conférence prit ces remarques en compte et s’engagea à réduire ses frais de fonctionnement. Néanmoins, au-delà de ces polémiques et à l’issue des débats, des progrès furent enregistrés dans les domaines du soutien aux pays en développement et dans les mécanismes favorisant un développement propre. Ces résultats cependant n’effacèrent pas totalement un certain malaise, suscité par les critiques de certains journalistes mentionnées plus haut et les photos publiées dans la presse locale montrant des milliers de congressistes au travail mais aussi s’égaillant dans les parcs animaliers du Kenya.

La COP 13/MOP 3 à Bali en décembre 2007 a eu pour principal résultat un accord des participants sur un calendrier de négociations pour la période post-2012 (fin de la première période d’engagement du protocole de Kyoto). Un nouvel organe subsidiaire a été créé pour mener à bien de toute urgence les négociations destinées à renforcer la mise en œuvre de la Convention-cadre au-delà de 2012. Ces négociations se poursuivront en 2008 et jusqu’à la Conférence des Parties de Copenhague en décembre 2009 qui s’avère être une date clé pour la mise au point d’un accord prolongeant et/ou se substituant au protocole de Kyoto au-delà de 2012.

La COP 14/MOP 4 à Poznan en décembre 2008 a obtenu peu de résultats. La conférence a été dominée par les négociations en cours pour le post-2012. La préparation de la prochaine COP 15/MOP 5 à Copenhague en décembre 2009, accapare les esprits. Cependant les délégués se sont mis d’accord sur les modalités de financement d’un fond spécial destiné au soutien des nations les plus pauvres. Par ailleurs un projet a été approuvé pour incorporer la protection des forêts dans les différents mécanismes déjà en mis œuvre par la communauté internationale pour lutter contre le changement climatique.

La COP 15/MOP 5 à Copenhague en décembre 2009, qui avait suscité tous les espoirs, se solda par un grand désappointement. Son objectif était de renégocier un accord international sur le climat remplaçant ou prolongeant le protocole de Kyoto qui arrivait à son terme en décembre 2012. Les 192 pays ayant ratifié cette convention-cadre sur le changement climatique étaient présents. Depuis plusieurs années et au cours des précédentes réunions des COP la suite du protocole de Kyoto après 2012 était dans tous les esprits.
Des groupes de travail avaient été mis sur pied pour préparer cette échéance et élaborer des textes qui seraient soumis aux délégués de la conférence de Copenhague de 2009.

Il y eut plusieurs réunions préparatoires de ces groupes de travail, au cours de l’année 2009 :

  • En juin le «groupe de travail ad hoc du protocole de Kyoto, AWG-KP» chargé des négociations sur les objectifs de réduction des émissions s’est réuni à Bonn sans résultat tangible ni sur un objectif global de réduction des émissions ni sur des objectifs individuels pour chaque pays. Le groupe de travail s’en est remis à la conférence de Copenhague elle-même pour éventuellement trouver une issue.

  • En septembre le «groupe de travail ad hoc sur la coopération à long terme, AWG-LCA», chargé de tracer des perspectives pour des accords futurs dans le but de maîtriser le changement climatique en fonction de son évolution et des connaissances scientifiques que l’on en aura (fournies, entre autre, par le GIEC), s’est réuni à Bangkok, puis à Barcelone sans résultats concrets. Pourtant certains pays étaient venus avec des chiffres de réduction d’émission sur lesquels ils étaient prêts à s’engager sous certaines conditions, principalement celle qu’un accord contraignant se dégage de la conférence, ce qui ne fut pas le cas.

L’organisation et le déroulement de la conférence fut «chaotique» aux dires de certains. La tâche était peut-être démesurée pour plusieurs raisons :

  • Des dizaines de milliers de participants à des titres divers : représentants nationaux, journalistes, ONG, scientifiques et au final, chefs d’États.

  • L’échec des travaux préparatoires et l'absence d’accord préalable sur les points essentiels a aussi pesé.

  • Les objectifs étaient peut-être démesurément ambitieux et une certaine naïveté, ou légèreté, de certains responsables et organisateurs - démission en cours de travaux de la présidente danoise de la conférence, par ailleurs ministre de l’environnement de son pays – a aussi compliqué les choses au regard des enjeux du «premier accord réellement mondial» selon le secrétaire général de l’ONU.

La première semaine fut consacrée à la prise de parole des nombreux participants représentant, à des titres divers : leur pays, des organisations gouvernementales, intergouvernementales et non gouvernementales.

Les derniers jours, à partir du 16 décembre, devaient être consacrés à la négociation finale des textes de l’accord devant être soumis aux chefs d’États dont l’arrivée était prévue le 18 décembre. En principe l’intervention des chefs d’États devait se limiter à quelques ajustements de détail sur les accords, la raison de leur rassemblement à Copenhague ce jour là étant la signature de ces accords, assortis de leurs discours de clôture. Mais les choses ne se déroulèrent pas comme prévu, le 18 décembre aucun texte n’avait réussi à obtenir un accord même seulement majoritaire, des groupes de pays poursuivaient leurs affrontements et une certaine nervosité commençait à s’emparer des délégués. On parla de situation «confuse», voire «désespérée» ; un vent de pessimisme et d’échec souffla sur l’assemblée. Cependant, pour beaucoup de participants il fallait tout faire pour sortir de cette impasse et certains délégués s’y employèrent loyalement au-delà de l’heure prévue, 18 heures, pour la fin régulière de la conférence. Les débats se prolongèrent ainsi durant la soirée qui suivit, et au cours de la nuit, un texte se limitant à des intentions peu ambitieuses et très imprécises fut soumis à l’approbation de la trentaine de délégués représentants leur pays, encore présents à cette heure. Une nouvelle difficulté fut surmontée de justesse : pour être valide le texte nécessitait l’unanimité des pays présents lors de son élaboration. Mais quel est le contenu et la portée de ce texte ?
L’objectif général souhaité était d’arriver à un accord réduisant les émissions de gaz à effet de serre des pays développés de moitié en 2050 par rapport à ce qu’elles étaient en 1990. Ces chiffres, concernant les mesures à prendre en terme de limitation d’émissions, étaient issus de calculs proposés par les scientifiques, et confirmés par le GIEC, pour satisfaire la demande sociale de ne pas dépasser un seuil de réchauffement moyen de la planète en 2100 de 2°C par rapport à ce qu’il était à l’aube de l’ère industrielle, vers 1850. Ce qui était également souhaité et espéré tenait à des engagements de réductions des émissions par pays, certes négociés mais relevant d’accords juridiquement contraignants. Enfin des engagements de soutien et d’aménagements financiers à l’égard des pays en développement, pour leur permettre de s’engager dans ces accords de restriction d’émissions de carbone, faisaient également partie du catalogue des souhaits des plus optimistes. Presque aucun de ces objectifs n’a été atteint ni n’est inclus dans le texte signé dans la nuit du 18 au 19 décembre.
Ce texte est une simple déclaration d’intention qualifiée d’ «accord» dans laquelle aucun objectif quantitatif de réduction des émissions de gaz à effet de serre n’est inscrit. L’«accord» renvoie à une annexe ouverte où les pays peuvent déclarer des chiffres précis d’intentions de réduction d’émission. Sur le plan financier on en reste également au stade des promesses avec, jusqu’en 2012, 10 milliards de dollars par an à verser à un «fond vert pour le climat» en principe destiné à aider les pays en voie de développement. D’ici 2020, l’«accord» vise 70 milliards de dollars d’aide annuelle. Et après 2020 les pays riches devraient contribuer à ces financements à hauteur de 100 milliards de Dollars par an.

La COP 16/MOP 6 appelée maintenant CMP 6, pour «6ème Conférence Meeting of the Parties» s’est tenue à Cancun en décembre 2010. Après l’échec cuisant de la conférence de Copenhague, cette conférence de Cancún avait des ambitions limitées et raisonnables. Plusieurs sessions de préparation des négociations de Cancún s’étaient tenues au cours de l’année 2010 notamment à Bonn en Allemagne et à Tiendjin en Chine. Ces sessions préparatoires furent des échecs partiels notamment la dernière à Tiendjin qui se solda par une rupture entre la Chine et les USA. Cette conférence de Cancún ne s’annonçait donc pas sous les meilleurs auspices bien que le Secrétaire Général des Nations UniesBan Ki-moon, ait ouvert la voie à une nouvelle approche des États membres pour parvenir à un accord ; à savoir, plutôt que de rechercher un accord global par le haut, le Secrétaire Général des Nations Unies proposa que l’on commence par ce qui est faisable et rentable individuellement pour chaque pays.
En fait la conférence de Cancún fut un demi-succès.

Coté succès, elle donna partiellement corps à des engagements restés jusqu’ici non chiffrés, sans accords signés, ni contraintes, et qui étaient issus de la précédente conférence de Copenhague. Parmi ces avancées notons le «Fond vert mondial» permettant aux pays en développement d’engager des actions d’adaptation au changement climatique à l’aide de contributions financières substantielles obtenues des pays développés. Une autre avancée concerne la mise au point d’un processus destiné à endiguer l’exploitation forestière opérée par les pays en voie de développement en les aidant financièrement à mettre en œuvre des actions d’atténuation dans la gestion de leur secteur forestier.

Le coté négatif de cette conférence a été marqué par l’impuissance des pays à mettre en place la poursuite ou le remplacement du protocole de Kyoto, au-delà de sa fin normale en 2012, par un nouveau protocole plus contraignant pour les pays développés. La perspective de limiter les émissions pour contenir le réchauffement moyen dans une limite de température inférieure à 2°C a été jugée d’ores et déjà comme difficilement accessible.
Notons cependant qu’au-delà de l’expression de profonds désaccords entre pays développés et pays en voie de développement, la conférence de Cancún a atteint un accord global a minima qui a été ratifié par tous les pays participants à l’exception de la Bolivie. Cet accord réaffirme que le changement climatique représente une menace urgente et potentiellement irréversible pour l’ensemble de l’espèce humaine et qui doit être prise en considération par l’ensemble des parties en présence. Cet accord marque une avancée incontestable bien que l’avenir du protocole post-Kyoto soit renvoyé au prochain sommet de Durban en décembre 2012.

La COP 17/CMP 7 s’est tenu à Durban en Afrique du Sud du 28 novembre au 9 décembre 2011. La conférence de Durban s’est ouverte dans une atmosphère d’optimisme mitigé. La mise en place d’un accord faisant suite au protocole de Kyoto semble encore lointain bien que des progrès aient été enregistrés au cours de la conférence précédente de Cancun (COP 16/MOP 6) en décembre 2010. Mais Cancun avait été marqué avant tout par l’abandon provisoire d’un accord global au sommet au profit d’accords locaux par secteurs et d’actions à la carte non contraignantes, chaque pays décidant de sa contribution. Cancun fut le basculement d’une approche «top-down» vers une approche «Bottom-up» chaque pays décidant de ce qu’il mettait sur la table. L’Union Européenne, convaincue qu’une telle attitude mettait en péril le protocole de Kyoto et sa suite ainsi que l’objectif de limiter le réchauffement global moyen à seulement 2°C pour la fin du XXIème siècle, a voulu réagir contre cette orientation stratégique nouvelle. D’un commun accord les 27 pays qui composent l’Union Européenne avaient décidé de replacer la question de l’avenir du protocole de Kyoto au centre des débats avec comme objectif d’atteindre un accord a minima pour une majorité des 193 pays présents à Durban susceptible de donner une suite ou de remplacer le protocole de Kyoto qui arrivait à échéance en décembre 2012.
Pendant les deux semaines de la conférence les discussions furent très vives et les oppositions blocs à blocs : Europe, États Unis, pays émergents (Chine, Brésil, Afrique du sud), pays pauvres, semblaient irréductibles jusqu’au dernier jour, le vendredi 9 décembre, où la salle plénière de la conférence commença à se vider, les congressistes cherchant à attraper au plus vite leur avion, sans qu’aucun accord ne soit discuté et n’ait été approuvé. Le pire semblait inévitable lorsque la présidente de la conférence, Maite Nkoana-Mashaban, ministre sud-africaine des affaires étrangères, décida de poursuivre les discussions durant le week end avec les délégués encore présents et de tenter de trouver coûte que coûte un accord exprimable par un texte. C’est à la suite d’un marathon de plus de 60 heures de discussions incluant le samedi, la nuit qui suivit et le dimanche qu’un accord engageant une partie des 193 pays participants fut finalement atteint. Cet accord n’est pas aussi précis ni contraignant que ce que les européens avaient proposé. Néanmoins il trace une stratégie et une feuille de route possible pour les années à venir esquissant une suite au protocole de Kyoto. Mais ce qui est capital c’est que pour la première fois et à l’inverse du protocole de Kyoto, qui n’engageait que les pays riches à l’exception des États Unis et de quelques autres non signataires, cet accord engage un ensemble de pays représentant la diversité des niveaux de développement, y compris certains pays riches non signataires du protocole de Kyoto comme les États Unis, le Japon, la Russie, mais aussi des pays émergents comme la Chine et l’Inde. L’accord, dénommé «Plateforme de Durban», stipule que les termes d’un nouveau traité doivent être définis pour 2015 et entrer en vigueur en 2020. L’accord précise également qu’à la fin (décembre 2012) du protocole de Kyoto, celui-ci doit assurer l’ intérim jusqu’au nouveau traité en 2020.
Enfin la conférence de Durban a fait avancer le «fond vert pour le climat» destiné à aider les pays en développement à s’adapter au changement climatique par une dotation des pays riches en argent et en transfert de technologies, s’élevant à 100 milliards de dollars par an. Des mécanismes destinés à abonder et gérer ces fonds ont été discutés et mis au point sans que les «payeurs» aient été formellement identifiés, le fond étant prévu pour être effectivement distribué seulement en 2020.

La COP 18/CMP 8 s’est tenu à Doha au Qatar du 26 novembre au 7 décembre 2012. Cette conférence de Doha était très attendue car elle devait, coûte que coûte, donner une suite au protocole de Kyoto dont la première phase allait se terminer officiellement le 31 décembre 2012, une vingtaine de jours seulement après la fin de cette réunion.
En fait la conférence de Doha avait deux objectifs principaux :

  • prolonger le protocole de Kyoto (Kyoto 1) au-delà du 31 décembre pour une deuxième période d’engagement (Kyoto 2)

  • amorcer les négociations devant donner un contenu à la «Plateforme de Durban» mise en place au cours de la COP 17 en 2011.

Le vide juridique dans lequel on entrait inexorablement après la fin du protocole de Kyoto, appelé maintenant Kyoto 1, le 31 décembre 2012, fut évité de justesse et se traduisit par un engagement a minima sur une prolongation du protocole jusqu’au 31 décembre 2020. Ce texte prolongeant Kyoto 1, appelé Kyoto 2, concerne un groupe de pays industrialisés, incluant les pays de l’Union Européenne, soit seulement 15 % des émissions de GES. Il est dit que chaque pays impliqué réexaminera ses objectifs chiffrés de réduction des GES au plus tard en 2014.
Á coté de ce prolongement du protocole de Kyoto il est fait mention d’un «Accord de Doha» qui reprend la «plateforme de Durban» obtenue au dernier moment lors de la COP de Durban, pour limiter les émissions de GES et maintenir le réchauffement sous la barre des 2°C. Contrairement à Kyoto 1 et 2 ce texte concernerait tous les pays y compris les grands émergents et devrait constituer le socle d’une conférence de l’ONU prévue en 2015 où un accord ayant force juridique devrait être signé pour remplacer le prolongement du protocole de Kyoto, à partir de 2020.
Par ailleurs la conférence de Doha, s’est prononcée en faveur de la réparation des dommages causés aux pays du Sud par le réchauffement. Les discussions ont été très vives entre les pays pauvres du Sud, s’estimant victimes des actions du Nord ayant déréglé le climat et ces pays développés du Nord, principalement les États-Unis craignant des actions juridiques en cascade dans les années à venir. «L’accord de Doha» invite les pays développés à annoncer de nouvelles aides aux pays du Sud lorsque les circonstances financières (la crise) le permettront. L’objectif est de mobiliser pour le Sud des fonds atteignant 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 !

La COP 19/CMP 9 qui s’est tenue à Varsovie en Pologne du 11 au 23 novembre 2013, a été une COP de transition principalement destinée à préparer la COP de Paris qui se tiendra en novembre, décembre 2015 et qui doit accoucher d’un accord, juridiquement contraignant, prenant la suite du protocole de Kyoto à partir de 2020, et spécifiant les engagements individuels chiffrés de chaque pays pour leurs émissions de GES.
Au-delà de cet objectif central, cette COP de Varsovie s’est déroulé suivant la dramaturgie habituelle de ce type de réunions qui a vu certaines ONG se retirer de la conférence avant sa fin pour protester contre la tenue parallèle d’un «sommet du charbon» jugée provocatrice ; et aussi de l’absence de résultat dans les discussions sur les «financements publics et le fond vert : GCF (Green Climate Fund )» !
Cependant un résultat positif peut être mis au crédit de cette conférence, c’est la reconnaissance du rôle des villes et des régions pour réduire les émissions de GES. C’est une orientation nouvelle qui devra être confirmée et prolongée à la COP de Paris et qui pourrait représenter une approche concrète plus efficace pour maîtriser les émissions.
Un participant à cette conférence, élu municipal de Nantes, Ronan Dantec résume bien l’atmosphère et le contenu de cette conférence de Varsovie :

« ….Si les compromis de Varsovie ouvrent la route de Paris, les difficultés restent très nombreuses. Peu d'engagement sur les financements de la part des pays industrialisés, opposition systématique du nouveau gouvernement australien, repli du Japon, fortes réticences des grands émergents à s'engager sur leurs propres réductions d'émissions, lobbyings des industriels du charbon….. Varsovie a aussi mis en scène les opposants et les obstacles à un décor ambitieux. La route pour Paris 2015 reste donc, plus que jamais, pavée d'embûches, mais l'étape piège de la COP polonaise est désormais derrière nous. En trouvant les moyens de créer des dynamiques nouvelles, en mettant en avant les réalisations positives qui se multiplient, en s'appuyant sur la volonté de la société civile, et en faisant mieux le lien avec l'agenda 2015 du développement, très absent à Varsovie, la France peut réussir à trouver à Paris un accord permettant de s'éloigner d'un climato-fatalisme, qui condamnerait le XXIe siècle à un terrible désastre humain….».

La COP 20/CMP 10 se tiendra à Lima au Pérou du 1 au 12 décembre 2014. Elle fera le point sur l’état d’avancement des projets d’accord qui doivent constituer le nouveau protocole à soumettre à la COP 21 à Paris

La COP 21/CMP 11 se tiendra à Paris en France du 30 novembre au 11 décembre 2015. Cette COP est particulièrement importante puisqu’elle doit définir le nouvel accord qui prendra la suite du protocole de Kyoto en 2020. Et il y a urgence car pendant ce temps la vie continue : par rapport à 1990 l’année de référence du protocole de Kyoto et 19 COP plus tard les émissions de CO2, loin de diminuer , augmentent toujours ( 56% par rapport à 1990) et de plus en plus (plus 2.6% en 2012 ,….)

Les informations sur ces réunions des COP sont extraites de plusieurs articles de Wikipédia recoupées avec d’autres sources du WEB. Pour une documentation complète, mais volumineuse et difficilement lisible, voir  cite.org 

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