Danièle Hauser septembre 2023.
Source NASA
Après 17 ans de mesures en continu, la mission scientifique spatiale CALIPSO (NASA, CNES) a pris fin le 1er août 2023 (Calipso tire sa révérence, CNES - Official end of Calipso science mission, NASA). Ce satellite faisait partie depuis 2006, d’une «constellation» dénommée «A-Train» comprenant, dans le cadre d’une coopération américano-franco-japonaise, les satellites Aqua, Parasol, Cloudsat, Aura, puis GCOM-W1 et OCO-2. La particularité de cette constellation est d’avoir choisi une orbite commune à tous ces satellites, ce qui permet d’obtenir des observations colocalisées et quasiment simultanées sur les nuages, les aérosols, la chimie atmosphérique et d’autres éléments intervenant sur le cycle de l’eau et le bilan radiatif de la terre.
Cette constellation a permis pour la première fois une synergie directe entre instruments actifs (lidar porté par CALIPSO et radar porté par Cloudsat) et passifs (radiométrie), qui a ouvert de nouvelles voies dans l’observation de l’atmosphère depuis l’espace.
Le rôle plus particulier de CALIPSO était de fournir, grâce à son lidar (CALIOP), à son radiomètre imageur infra-rouge (IIR) complété par sa caméra dans le visible (WFC), les observations quantitatives sur les aérosols et les nuages.
Avec des observations inédites à l’échelle globale sur la structure verticale des nuages et des aérosols, et sur la phase de l’eau nuageuse (liquide, glace ou mixte), les observations apportées depuis 2006 par CALIPSO jouent un rôle clef pour la caractérisation et la représentation dans les modèles numériques, des nuages, des aérosols et de leur couplage. Cette mission a ainsi conduit à de très nombreuses avancées scientifiques, valorisées par plus de 4000 publications incluant des domaines initialement non ciblés (océan, cryosphère, biosphère, ...).
Voir :
- le bilan en 2018 par Stephens et al., https://doi.org/10.1175/BAMS-D-16-0324.1,
- la liste bibliographique, https://www-calipso.larc.nasa.gov/resources/bibliographies.php,
- l’apport identifié de CALIPSO et Cloudsat dans le 5ème rapport du GIEC, https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2018/02/WG1AR5_Chapter07_FINAL-1.pdf).
Le CNES et les laboratoires de recherche français fédérés au sein d’un Groupement de Recherche (GDR) regroupant treize laboratoires et instituts ont joué un rôle majeur dans ce succès, d’une part par les responsabilités françaises sur les éléments de la mission (plateforme PROTEUS du CNES, imageur infra-rouge conçu en partenariat avec la société Sodern, centre de données national ICARE puis AERIS), d’autre part par la mise au point de méthodes nouvelles d’estimation des paramètres nuageux et des aérosols depuis l’espace, ou par les travaux de recherche sur les interactions nuages/aérosols/rayonnement et l’analyse des forçages radiatif.
Rappelons également que la compétence française dans le domaine des lidars pour la mesure atmosphérique a été cruciale pour les travaux algorithmiques et les activités de validation des données et des produits CALIPSO, grâce à la mise en œuvre depuis le sol ou des avions de recherche, de lidars similaires à celui embarqué sur le satellite.
La longue série de mesures de CALIPSO est devenue une référence pour le suivi à long terme des nuages et des aérosols ou l’étude de phénomènes remarquables ou extrêmes (éruptions volcaniques, incendies, …). Elle a servi et va servir de série de références aux missions plus récentes (Aeolus) ou à venir telles que la mission spatiale EarthCare (ESA/JAXA) dont le lancement est prévu en 2024 ou AOS, pilotée par la NASA en collaboration avec plusieurs agences spatiales, et dont le lancement n’est pas prévu avant 2030.
L’héritage laissé par les observations de CALIPSO enrichi par ces nouvelles missions permettra de faire progresser encore les connaissances scientifiques sur les interactions et rétroactions entre nuages, aérosols et rayonnement, et de prendre en compte l’avancée de ces connaissances dans les modèles climatiques.