Article d'actualités sur les satellites
Rentrée atmosphérique assistée du satellite Aeolus de mesure du vent.
Raymond Zaharia
La rentrée atmosphérique assistée du satellite expérimental Aeolus (Voir : Aeolus et son lidar-vent enfin dans l'espace de Jean Pailleux) est intervenue le 28 juillet.
Lancé le 22 août 2018 depuis Kourou en Guyane par un lanceur Vega, ce satellite de l'Agence Spatiale Européenne a réalisé au moins 2 "premières" :
- L'une concernait la mesure du vent jusqu'à une altitude de 30 à 40 km à l'aide d'un lidar. En effet, ce dispositif de mesure sophistiqué, à l'aide d'un faisceau laser ultraviolet, (plus adapté à la mesure du vent par effet Doppler), n'a pu être mis en oeuvre qu'après des années de travaux en laboratoire et plusieurs percées technologiques. (Notamment l'utilisation d'un léger flux d'oxygène - à la pression de 40 Pascal - afin de protéger les optiques d'un effet de noircissement dû aux rayons ultraviolet.)
L'objectif principal de la mission ADM-Aeolus était de valider le recours à un lidar pour mesurer les profils de vent depuis l'espace.L'objectif secondaire était de fournir des données exploitables permettant d'améliorer les modèles numériques servant à la prévision du temps et à la simulation du climat. La compréhension de l'évolution des vents sur une période de quelques jours contribue en effet à améliorer les connaissances sur la dynamique de l'atmosphère et les processus globaux de transport ainsi que les cycles de l'énergie, de l'eau, des aérosols et des produits chimiques.
Compte tenu de la faiblesse des échos Doppler reçus des couches atmosphériques sondées, l'altitude du satellite a été fixée à 320 km seulement, alors que la valeur initialement prévue était de 400 km. En effet, le signal utile diminue fortement lorsque la distance à laquelle la mesure est effectuée, augmente.
- La "seconde première", (si l'on peut dire !), concerne la "fin de vie assistée" de ce satellite !
En raison du frottement atmosphérique à l'altitude de l'orbite héliosynchrone choisie, le satellite "tomberait" rapidement, (par exemple, une perte d'altitude de ~40 km en moins d'un mois), s'il n'était pas maintenu "à poste"... par ses moteurs d'entretien d'orbite.C'est ainsi qu'Aeolus emportait près de 300 kg d'ergols permettant de garantir sur au moins 36 mois les corrections d'orbite indispensables. (Il emportait aussi 15 kg d'oxygène, masse jugée suffisante pour au moins 36 mois de fonctionnement de son instrument "Aladin").
En dépit d'une manœuvre d'évitement [1] d'un satellite de la constellation Starlink entraînant une consommation supplémentaire d'ergols, les 36 mois de bon fonctionnement ont été largement dépassés.
Cependant, en raison d'un regain d'activité solaire ayant pour effet d'accélérer l'usure d'orbite (et la consommation d'ergols), l'ESA a annoncé le 8 mai [2] avoir mis fin à la mission Aeolus le 30 avril.
En réalité, Aeolus a pu continuer à fonctionner en mode dégradé jusques fin juin. Les enseignements issus de l'observation pendant ces 2 mois du comportement de cet "Explorer" en fin de vie, seront mis à profit pour la réalisation d'un 1er héritier opérationnel ! Longtemps attendu, Aeolus nous a offert en définitive une impressionnante réussite !
La phase de "rentrée assistée" est intervenue début juillet [3] avec l'interruption définitive des corrections quasi quotidiennes en vue de maintenir l'altitude de 320 km.
Le 24 juillet, alors que l'altitude n'était plus que de ~280 km, le système d'entretien d'orbite a été utilisé en système de "démolition contrôlée d'orbite". Deux mises à feu successives de ses moteurs ont été effectuées, la seconde durant presque 40 minutes.
3 jours plus tard, alors qu'Aeolus ne se trouvait plus qu'à 250 km au dessus du globe, 4 allumages successifs des moteurs de contrôle d'orbite l'ont fait à nouveau chuter d'une centaine de km.Le vendredi 28 juillet, une ultime manœuvre de freinage, a produit, comme désiré, une "rentrée assistée" au dessus de l'océan qui borde le continent Antarctique.
De la sorte, les quelques dizaines de kg de matière qui ne se sont sans doute pas consumés dans l'atmosphère, sont tombés sur une zone océanique peu parcourue, en plein hiver austral, minimisant ainsi le risque de dégâts.
On ne peut que saluer la maîtrise des équipes ESA impliquées dans la réalisation de cette première: elle préfigure la future politique "Zéro débris" des agences spatiales, qu'avec d'autres notre pays a résolument soutenu.
En effet, si l’ESA vient de se montrer effectivement en pointe sur la gestion des débris spatiaux, la France est un des premiers pays à s’être doté d’un cadre législatif, avec sa loi sur les Opérations Spatiales, destinée en particulier à la prévention des dégâts éventuels causés par les débris spatiaux.Sur la base du retour d’expérience positif de cette loi, il est maintenant proposé que l’Union Européenne se dote d’un outil équivalent.
[1] Extrait de https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_afetr/l15b4991_rapport-information (paragraphe 4):
" le 2 septembre 2019, ADM-Aeolus, un satellite météorologique de l’ESA, a dû manœuvrer pour éviter une collision avec un satellite de Starlink, après que l’entreprise SpaceX, propriétaire de ce dernier, a indiqué à l’ESA qu’elle ne comptait pas dévier son satellite." Retour
[2] Cf. https://www.esa.int/Applications/Observing_the_Earth/FutureEO/Aeolus/Aeolus_fiery_demise_to_set_standard_for_safe_reentry Retour
[3] https://www.space.com/esa-aeolus-satellite-reentry-fiery-end Retour
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- Écrit par : Raymond Zaharia
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L'écart entre l’énergie que reçoit la Terre et celle qu’elle émet, à l'origine du réchauffement climatique est difficile à estimer avec précision. L'accéléromètrie spatiale, une technique prometteuse!
Yves Dandonneau et François Barlier - Août 2021 - Mis à jour octobre 2021
Résumé en langage courant
La Terre reçoit le rayonnement du Soleil, et elle rayonne aussi vers l’espace. Pour que le climat terrestre soit stable, ce bilan radiatif devrait être équilibré, mais ce n’est pas le cas : l’énergie qu’elle rayonne vers l’espace est inférieure à celle reçue du Soleil, et cette différence est la cause du réchauffement climatique en cours. Elle est difficile à estimer, du fait de la très forte variabilité du système climatique terrestre dans l’espace et dans le temps. Pour y parvenir, on utilise des satellites qui mesurent le rayonnement émis et le rayonnement reçu, et divers systèmes d’observations qui permettent de suivre l’accumulation de chaleur dans l’atmosphère, les océans, les terres émergées et les glaces. Différente dans son principe, l’expérience CACTUS a permis dès 1975 de mesurer les accélérations subies par une sphère en orbite autour de la Terre sous l’influence combinée des rayonnements solaire et terrestre, et par là, sous certaines conditions, d’estimer directement la différence entre le flux radiatif reçu par la Terre et le flux émis. Compte tenu des progrès techniques accomplis depuis cette première expérience, cette technique pourrait s’avérer prometteuse.
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