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Les emballages et autres déchets de plastique dont nous nous débarrassons finissent pour une grande partie dans les océans. Selon une idée très répandue, la circulation océanique les rassemblerait en surface au centre des grands bassins tropicaux. Mais beaucoup coulent, et se fragmentent.

Où aller pour fuir les nuisances du monde industrialisé et trouver un environnement vierge de l'influence humaine ?

Sur l'Ile Henderson, par exemple. Située dans le Pacifique sud, sous le tropique du Capricorne, à l'écart des principales lignes de navigation, inhabitée, n'est elle pas le refuge idéal ?
En 2019 pourtant, ses plages ont été recouvertes par une accumulation de déchets – bouteilles en plastiques, lambeaux de filets de pêche, boules de flottaison et autres – telle qu'on ne l'imagine même pas sur les côtes de France. De nombreux articles dans la presse en ont fait état. Cela validait, hélas, la prophétie de Charles Moore, qui, en 1997, avait expliqué comment le transport des déchets flottants par les courants conduisait à la concentration de ces déchets au centre des grands tourbillons des bassins océaniques tropicaux, aussi appelés «gyres», où se trouve justement l'île Henderson. Tous ces déchets accumulés, plusieurs millions de tonnes, dont la dégradation est très lente, formeraient un «septième continent».

ile henderson  2019

La côte nord de l'Ile Henderson en 2019

 

 

Des photos de ce septième continent sont nombreuses dans les reportages, plus révoltantes les unes que les autres, mais rarement localisées. Lorsqu'un souci d'exactitude prévaut, les chiffres nous ramènent à des niveaux de pollution moins alarmants : 200 000 débris / km2, soit en tout environ 1 000 tonnes dans le gyre de l'Atlantique nord, d'après des chercheurs affiliés à la Woods Hole Oceanographic Institution.
Interviewé, François Galgani de l'IFREMER, co-Auteur de cette étude, évalue ces quantités à 115 000 débris / km2, soit en tout environ 600 tonnes pour la Méditerranée avec un poids moyen des débris de l'ordre de 1,8 mg. C'est une taille très petite – environ celle d'un confetti -, qui résulte d'une dégradation et d'un fractionnement sous l'effet du rayonnement solaire et de l'eau salée. Ces estimations sont entachées d'une forte incertitude, à cause principalement du trop faible nombre d'observations, et de leur répartition focalisée principalement sur les gyres des grands bassins océaniques tropicaux sensés héberger les plus fortes concentrations. Pour élevés que soient ces chiffres, ils sont très inférieurs aux quantités de plastique déversées chaque année dans les océans. Ainsi, une étude parue en 2015 (1) estime que la masse totale de plastique flottant dans les océans se situe entre 93 000 et 236 000 tonnes, mais que ceci ne représente qu'environ 1% des 8 à 12 millions de tonnes de plastique déversées dans l'océan au cours de la seule année 2010. Avec un tel taux de dégradation, on peut se poser la question de la réalité du 7ème continent, le transport de particules par les courants depuis la côte jusqu'au centre des gyres nécessitant plusieurs années.

 microparticules plastique

Microparticules de plastique récoltées en mer avec un filet et triées

Plutôt que des étendues des gros débris tels qu'on peut en voir à proximité des décharges, il faut donc se représenter cette pollution comme une omniprésence près de la surface de microdéchets, tandis que la majorité des gros déchets rejetés dans l'océan coulent et s'accumulent sur les fonds marins (les sédimentologues en trouvent souvent lors des dragages profonds qu'ils réalisent). Ces microdéchets peuvent être ingérés par la faune marine, et notamment par le zooplancton. Des études ont montré que les copépodes – un composant important du zooplancton – les ingéraient et les excrétaient mais ne les gardaient pas. Ce n'est peut être pas le cas général : les nombreuses sortes de matières plastiques et leurs additifs, et la diversité des organismes marins, offrent une infinité de situations dont il sera très long de faire l'étude.

Mais une évidence s'impose : vouloir nettoyer les océans à l'aide de filets tractés par divers engins est insensé. D'une part l'effort de traction pour des filets de maille de l'ordre du millimètre serait énorme, et d'autre part ces particules sont partout, et elles ont la même taille que le plancton de sorte que les enlever retirerait en même temps le plancton. La solution généralement préconisée est de limiter les rejets en mer ainsi que dans les fleuves d'où provient une grande part de cette pollution, à défaut de pouvoir les arrêter totalement (une catastrophe comme le tsunami au Japon en 2011 a entraîné en mer environ cinq millions de tonnes de débris, soit presque autant que l'apport de l'année précédente).

Si ce sujet fait souvent l'objet d'articles dans les médias, les études scientifiques progressent peu. Une récente approche par télédétection pourrait cependant changer la situation : des chercheurs du Plymouth Marine Laboratory en Angleterre ont en effet développé une technique (2) qui permettrait de détecter les déchets de plastique dans les océans à partir de l'analyse des données multispectrales des deux satellites Sentinel-2 de l'Agence Spatiale Européenne. Bien entendu, il ne s'agit pas là d'estimer la quantité de microparticules là où rien ne vient alerter un navigateur. Un ordre de grandeur de la surface présentée par ces microdéchets est de seulement 2,5 cm2 par km2. Mais cette technique permettrait de détecter et suivre les principaux apports de macrodéchets, ce qui constituerait un gros progrès.

1) Erik van Sebille, Chris Wilcox, Laurent Lebreton, Nikolai Maximenko, Britta Denise Hardesty, Jan A van Franeker, Marcus Eriksen, David Siegel, Francois Galgani and Kara Lavender Law (2015) A global inventory of small floating plastic debris. Environmental Research Letters, 10, 12

2) Biermann, L., Clewley, D., Martinez-Vicente, V. et al. Finding Plastic Patches in Coastal Waters using Optical Satellite Data. Sci Rep10, 5364 (2020). 

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