Le faible rendement du procédé ETM...
...oblige à pomper de grandes quantités d’eau de mer pour alimenter l’évaporateur en eau de mer de surface et le condenseur en eau froide profonde. La construction de tuyauteries adaptées relève-t-elle de technologies existantes ?
Michel Gauthier
L’exploitation de l’énergie solaire conduit généralement à des installations de grandes dimensions. L’ETM ne déroge pas à cette règle. C’est plus particulièrement à la réalisation, à l’installation et à la tenue à la mer des conduites d’eau froide que sont confrontés les promoteurs du procédé ETM.
Depuis la pose réussie en 1930 de la conduite de 1,6 m de diamètre (et de 2 km de longueur!) en tôle d’acier pour l’expérience ETM de G.Claude à Cuba, de nombreuses entreprises étrangères ont installé et opéré avec succès des installations expérimentales de petite puissance équipées de conduites en polyéthylène, disponibles aujourd’hui en diamètres jusqu’à 1,6 m fabriquées industriellement pour des besoins autres que ceux de l’ETM.
En 1985 le GIE français ERGOCEAN avait répondu à un Appel d’Offre International lancé par le Ministère de l’Énergie américain (DOE) et la firme Ocean Thermal Corporation pour la réalisation d’une centrale de 50 MW à Kahe Point sur la côte de l’île d’Oahu à Hawaï. La solution proposée pour l’alimentation en eau froide était un ensemble de 3 tuyaux en FRP (Resine Reinforced Plastic) de 4,5 mètres de diamètre capable d’assurer un débit de 122 mètres cubes par seconde (nota).
D’autres projets de centrales ETM flottantes de grande puissance ont suscité aux États-Unis et au Japon l’étude et des essais partiels de conduites d’eau froide de diamètres supérieurs à 10 mètres dont la réalisation emprunterait aux technologies pétrolières off-shore.
Les débits et le dimensionnement en diamètre et en longueur des conduites d’aspiration d’eau froide dépendent de compromis subtils pour minimiser les coûts de l’énergie produite. À notre connaissance aucun constructeur ne dispose aujourd’hui de suffisamment d’expérience pour garantir la durée de vie de conduites d’aspiration d’eau froide répondant aux exigences de l’exploitation commerciale d’usines ETM de puissance supérieure à quelques dizaines de MW.
Nota : « Proposal for Ocean Thermal Energy Conversion 50 MW Power Plant at Kahe Point-OAHU-Hawaii ; document ERGOCEAN/IFREMER July 1986.
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Quelle proportion de l’énergie produite par une usine ETM?...
...est utilisée pour le pompage des eaux de mer chaude et froide destinées respectivement à l’alimentation de l’évaporateur et du condenseur?
Michel Gauthier
Dès l’énoncé de son principe par d’Arsonval en 1881 les détracteurs du procédé ETM prédisaient qu’il faudrait dépenser plus d’énergie pour faire fonctionner les usines qu’elles ne pourraient en produire. Le résultat des travaux de G. Claude dans les années 1930 démontrèrent qu’il n’en était rien et que le bilan énergétique du procédé était positif.
À titre indicatif, la puissance brute aux bornes de l’alternateur de la centrale de 5 MW net électrique étudiée par ERGOCEAN pour Tahiti était estimée à 6,6 MW (nota). Ceci correspond à une puissance « parasite » totale de 1,6 MW ( 24 %) dont 0,85 MW ( 13%) pour le pompage de l’eau froide et 0,55 MW (8% ) pour le pompage de l’eau de surface.
Un projet japonais donne une puissance nette voisine de 80 MW nette pour une puissance brute de 100 MW électrique. ( Avery 1994- page 328).
Nota : Dossier de fin d’étude Avant projet de Tahiti – Page 16/23 Tome 3 ; document IFREMER/ERGOCEAN,1986.
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De quand datent les derniers travaux français sur l’ETM?
ETM ou OTEC en anglais (Ocean thermal energy conversion).
Michel Gauthier
En 1982, après une étude de faisabilité destinée à actualiser les connaissances tant du point de vue technique qu’économique sur l’ETM, le CNEXO (qui deviendra IFREMER en 1984) confia à un Groupement d’Intérêt Économique, l’étude d’un avant-projet de centrale ETM de démonstration.
Ce Groupement, baptisé ERGOCEAN, était constitués des sociétés: Alsthom, SGE BTP, C.G Doris, FRAMATOME, Jeumont Schneider, SPIE Batignoles et SGTE appartenant aux deux groupes : CGE et Empain Scheiner.
En 1986, au terme de ces travaux, l’IFREMER proposa la réalisation d’une usine pilote ETM de 5 MW électrique pour la Polynésie Française.
Le gouvernement ne donna pas de suite à cette proposition et la France abandonna l’étude de la filière ETM en 1987.
En 2012 DCNS s'intéresse à l'ETM. Des études sont menées sur un prototype à terre dans l'île de la Réunion.
En 2014 DCNS et Akuo Energy sont lauréats du fonds européen NER 300* pour la mise en place d'une centrale pilote Energie Thermique de Mers en Martinique.
En 2021 Naval Group met fin à ses activités "Energies renouvelables". Les travaux concernant l'ETM sont abandonnés.
Mise à jour décembre 2022
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Que doit-on comprendre quand on parle de “l’énergie de la mer”?
Ou des "énergies marines"?
Michel Gauthier
Cette expression désigne les phénomènes marins naturels et susceptibles d’être “exploités” pour produire de l’énergie utile aux activités humaines. L’expression anglaise “to harness marine energy” exprime bien l’idée qu’il faut “harnacher” les phénomènes comme on le fait pour les animaux de trait.
La figure ci-après tente de représenter l’ensemble de ces phénomènes mais dans l’expression telle qu’utilisée couramment aujourd’hui quand on parle “d’énergies marines” cet ensemble est réduit aux phénomènes physiques des marées, des courants, des vagues et des différences de températures. Certains conviennent d’y inclure l’énergie éolienne non pas pour rappeler l’utilisation du vent par les navires à voiles mais pour différencier les problèmes posés par les “éoliennes” selon qu’elles sont implantées en mer (offshore) ou à terre.
L’utilisation de l’énergie des marées est très ancienne. Les “moulins mers” bretons en sont des vestiges. L’usine EDF construite sur la Rance produit 0,7% de l’électricité générée en France. La technologie est éprouvée. Les obstacles au développement de cette “filière” marémotrices sont: un nombre limité de sites littoraux propices à l’installation des usines, des impacts lourds sur l’environnement local et des coûts de construction élevés.
À part les marées tous les autres phénomènes sont les résultats des transformations successives de l’énergie émise par le soleil et absorbée puis stockée sous forme de chaleur dans l’atmosphère et les océans. Ainsi, les échanges d’énergie entre l’océan et l’atmosphère créent les vents qui créent les vagues puis la houle et aussi les grands courants moteurs de la circulation océanique. Ces transformations successives entraînent une dégradation à la fois en quantité et en qualité du potentiel énergétique initial; on conçoit que c’est au niveau le plus haut, c’est-à-dire au niveau de la ressource thermique stockée dans l’eau océanique, que le potentiel exploitable est maximum.
De nombreux procédés ont été proposés, construits et expérimentés pour évaluer la viabilité de l’exploitation de ces ressources: houlomotrices pour exploiter l’énergie des vagues, hydroliennes pour exploiter celle des courants, procédé ETM (Energie Thermique des Mers) pour exploiter la ressource thermique, etc. Aucun n’a atteint un stade de développement industriel car leurs coûts de production sont plus élevés que ceux des filières brûlant des combustibles fossiles ou nucléaires. L’introduction de certains coûts dits sociaux et environnementaux, actuellement “externalisés”, dans les calculs des prix de l’énergie, serait a priori favorable au développement de ces énergies de type renouvelables. Donner un “coût à ce qui n’en a pas“, («Pricing the priceless»), est une entreprise politiquement lourde. Le projet "ExternE" de la Commission Européenne constitue un pas dans le bon sens; il reste a vérifier que cette démarche est appliquée avec la rigueur nécessaire.
Voir plus de détail sur les énergie marines dans les articles suivants :
L’énergie des courants de marée
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