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Propos d'Argonautes (octobre 2023)

(Temps de lecture: 7 - 13 minutes)

Sur notre site web

L’une des dernières nouvelles publiées dans notre blog concerne des artefacts qui apparaissent parfois sous forme de Radars de précipitation : étranges rayons de vélo dans les cartes des échos des radars de pluie.

Ces anomalies sont dues à des émissions liées à l’activité humaine dans des bandes de fréquence qui débordent sur celles des radars de pluie. Elles se manifestent par des rayons de plus d’une centaine de kilomètres autour des radars. Elles peuvent apparaître partout dans le monde et sur tous les sites web où les échos des radars sont livrés au public sans nettoyage préalable, On en a observé en particulier en Espagne, mais aussi en Argentine ou en Mer Baltique. 

Bientôt sur notre site web

Des événements survenus à la fin de la dernière période glaciaire, faisant alterner des phases de réchauffement avec de brusques refroidissements, impliquant des modifications profondes de la circulation océanique dans l’Atlantique nord (ainsi, que l’abracadabrant scénario du film « le jour d’après ») attirent l’attention des chercheurs, et aussi celle du public, sur la réponse des courants de l’Atlantique nord au changement climatique. Les ramifications nombreuses de la circulation marine dans cette région complexe, et la difficulté d’y effectuer des observations, donnent lieu à une forte activité de recherche, que nous nous efforçons de suivre avec l’objectif de, prochainement, rédiger une synthèse à destination du public. Actuellement l’Atlantique apporte beaucoup de chaleur à l’Arctique, qui reçoit par ailleurs de l’eau douce du Canada et de Sibérie ; l’équilibre entre les deux sources est peu documenté. On observe actuellement une "atlantification de l'Océan arctique" liée au dipôle atmosphérique de l’Arctique, qui, positif de 2007 à 2021, a fait pénétrer moins d’eau de l’Atlantique vers l’Arctique. Si ce dipôle devient négatif, la pénétration des eaux de l’Atlantique vers l’Arctique y favorisera la réduction de la banquise. Caractéristique intéressante et peu connue des hautes latitudes : les eaux denses (et à ces températures proches de zéro, très salées) ont tendance à être attirées vers les pôles.

Consultation Citoyenne sur la Trajectoire de Réchauffement de Référence

Le Club des Argonautes a répondu à la Consultation Citoyenne sur la Trajectoire de Réchauffement de Référence, lancée au printemps dernier par le gouvernement. Les concepts de préservation du bien commun et de juste besoin doivent constituer le fil directeur de l’action publique. Il nous a paru essentiel de déployer les moyens à l’échelle locale, tout en recherchant la cohérence avec les réglementations nationales et européennes. Un grand nombre de dispositions réglementaires mises en place antérieurement sans considération de la menace que constitue le changement climatique, devront être systématiquement réexaminées en vue de supprimer les obstacles qu'elles constituent trop souvent. L’efficacité des mesures prises devra être évaluée en permanence. Le Haut Conseil pour le Climat (ou une structure équivalente) devrait être doté de compétences élargies pour cette évaluation permanente, et pour l’animation de toutes les réflexions stratégiques. La formation des fonctionnaires décidée récemment par la gouvernement sera très utile pour la mise en application des décisions.

Demain des fonctionnaires qui parlent «climat»

Le Club des Argonautes salue la décision du gouvernement français de former les fonctionnaires à la transition écologique. Nous espérons que ce projet sera doté de moyens humains et financiers suffisants et prendra de l’essor. Un niveau de connaissances adapté est en effet nécessaire pour que la conduite de cette transition ne soit pas encombrée par des réglementations anciennes, inadaptées, voire contradictoires : il doit s’agir d’une formation, et non d’une information.

Bravo Copernicus!

Le service Copernicus sur le changement climatique (C3S) a tenu sa sixième assemblée générale du 12 au 14 septembre. Copernicus, qui vient d’avoir 25 ans (au départ identifié sous les initiales GMES (Global European monitoring service), est resté pratiquement inconnu du grand public jusqu’à cette année où, les événements liés à des conditions extrêmes se bousculant partout dans le monde, les médias y ont quotidiennement fait référence. Copernicus est ainsi devenu le principal service d’observation et d’analyse du climat vers lequel on se tourne chaque fois que se produit une inondation, une vague de chaleur, ou tout évènement extrême, rôle qui était jusqu’à présent dévolu aux puissantes organisations américaines que sont la NASA ou la NOAA. Les Français ont joué un rôle moteur dans la mise sur pied de Copernicus, et il y a lieu de s’en féliciter.

Comme Jules Verne dans «Sans dessus dessous» mais sans le faire exprès

L’humanité a change l’inclinaison de la terre a force de pomper l’eau souterraine. Le réarrangement des masses d’eau conduit à une redistribution des masses et la rotation de la Terre en est affectée. Un article de Christian Bizouard explique que le pôle se déplace dans un cercle de 15 à 20 m de diamètre en réponse aux variations saisonnières de l’étendue des calottes polaires. Le mouvement de rotation de la Terre ralentit peu à peu, de telle sorte qu’il faut, de temps en temps, ajouter une milliseconde au temps passé. Surprise cette année : ce mouvement de rotation s’est accéléré ! Il faudrait donc retirer une milliseconde à cette échelle. On pense à la danseuse qui tourne sur elle même de plus en plus vite si elle rapproche ses bras de son corps… l’explication pour cette récente accélération de la Terre reste à trouver.

2023, année terrible

La multiplication en 2023 des épisodes caniculaires, des sécheresses, des incendies et des pluies diluviennes interpelle les scientifiques : que se passe-t-il avec le climat ? Est-ce à cause de l’événement El Niño qui a débuté au printemps dernier ? Ou à cause de l’énorme quantité de vapeur d’eau injectée dans la stratosphère lors de l’éruption du volcan Hunga Tonga ? Ce dernier point doit être minimisé, les émissions concomitantes de poussières et de composés sulfurés étant plutôt de nature à refroidir le climat. Les plus alarmistes parlent d’un climat qui deviendrait hors de contrôle, très au-delà des prévisions élaborées par les modèles climatiques. Il existe une forte variabilité interannuelle, et il y a une dizaine d’années, au contraire, la hausse de la température moyenne globale a marqué une pause, qu’on a nommée le «hiatus», dont l’explication a demandé un gros travail de recherche. Il faudra du temps pour analyser cette période et la comprendre, mais sans en attendre les résultats, il faut admettre que le changement climatique est bel et bien en cours, et que ce n’est pas anodin. Les processus complexes de la formation des nuages pourraient y jouer un rôle. Le déséquilibre du bilan énergétique de la Terre (c’est à dire : le réchauffement) semble avoir augmenté cette année, passant de moins de 1 W/m² à plus de 1,5 W/m² ! A suivre.

Fumée blanche pour les cargos

La mise en application des régulations interdisant l’usage de fuel riche en soufre dans le trafic maritime a conduit à une réduction des aérosols réfléchissants dans l’atmosphère, notamment dans le très fréquenté Atlantique nord, et par conséquent à une augmentation du rayonnement solaire incident contribuant au réchauffement du climat. Il faut toutefois noter que la plus grande partie des aérosols soufrés ne provient pas du trafic maritime, mais plutôt de la combustion du charbon. Les gaz de combustion émis par les centrales qui utilisent des hydrocarbures sont désulfurés. Le soufre ainsi récupéré fournit la plus grande partie de cet élément pour l’industrie, en particulier pour la production de plâtre.

La géo-ingénierie, miroir aux alouettes de la finance

On entend souvent parler de projets visant à retirer du gaz carbonique de l’atmosphère. Ces projets sont toujours extrêmement coûteux en énergie, et reposent évidemment sur des énergies non émettrices de gaz carbonique. Ils laissent hélas croire que le remède viendra de la technologie, et de la géo-ingénierie, plutôt que de la décroissance : retrait du gaz carbonique, ou décroissance? Le premier se prête à des projets industriels et à des financements importants, la seconde non : la partie n’est pas équilibrée.

La pluie sur commande ?

Alors que les essais de déclenchements artificiels de pluie dont nous avons eu connaissance (ou auxquels certains d’entre nous ont participé) ont tout au plus fait tomber la pluie en un endroit A plutôt qu’en B. On entend de plus en plus parler de l’usage de cette pratique en Chine, en Thailande, au Moyen Orient. Toutefois, il est très souvent question d’essais, moins souvent de résultats.

Qui prend les décisions en cas de sécheresse ?

Une des conséquences liées à la crise climatique est les épisodes récurrents de sécheresse. Que fait la puissance publique dans ce domaine ? Ce sont les SAGE (Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux) qui gèrent localement les ressources en eau. Ils doivent se doter d’une gouvernance qui doit trancher entre, par exemple, la priorité des besoins urbains et celle de l’agriculture : pas facile, les prises de décisions sont souvent houleuses.

Un Argonaute au Kirghistan

Profond et doté de rives abruptes, le lac Issyk-Kul au Kirghiztan est vaste, endoréique, et sa surface varie peu. Il constitue un site de qualité pour la calibration du satellite SWOT (Surface Water and Ocean Topography) lancé il y a un an. Pierre Chevallier, Argonaute, a participé à son étude. Bien que situé à 1600 mètres d’altitude, il ne gèle jamais. Il ne reçoit pas d’eau de l’Océan Indien, étant majoritairement alimenté par les pluies associées aux vents d’ouest qui transportent l’humidité depuis l’Atlantique et la Méditerranée. Son étude hydrologique doit prendre en compte des aspects mal connus : la géologie des nappes phréatiques, et la part que joue l’irrigation des zones cultivées sur une partie de ses rives. Un suivi du lac a été réalisé du temps de l’empire soviétique, mais les données archivées sont éparses et non numérisées pour la plupart.

Inquiétude pour les forêts

Longtemps considérées comme un puits de carbone, les forêts soumises aux incendies, aux vagues de chaleur, aux attaques par les insectes xylophages aux coupes pour le bois de chauffage et aux épisodes de sécheresse, pourraient dès 2026 émettre davantage de gaz carbonique qu’elles n’en capturent. En France, la majorité des feux sont causés par la négligence humaine ou une action volontaire. Ce n’est pas le cas au Canada où ils sont la plupart du temps causés par la foudre. Les incendies au Canada ont fait reculer les forêts et émis de grandes quantités de CO2 dans l’atmosphère (290 MT à la mi juillet, certainement davantage à venir). C’est peut-être pire chaque année en Sibérie. Ces feux exceptionnels pourraient à eux seuls en 2023 représenter près de 10 % des émissions totales de carbone.

Les sources naturelles d’hydrogène

Des progrès du côté de l’hydrogène : on découvre de plus en plus d'émissions naturelles d'hydrogène. On en a découvert en grande quantité en Lorraine à 1000 mètres de profondeur, sous une couche de charbon, dans les mines de fer. La difficulté est de parvenir à le capter. Par ailleurs, on travaille sur le stockage de l’hydrogène dans des métaux, et particulièrement dans de l’hydrure de magnésium. Des équipes travaillent aussi sur une photolyse de l’eau qui produit de l’hydrogène.

«Donnez moi un tanker plein de rouille et je vous donne une glaciation» (John Martin, 1988)

Parmi les projets de géo-ingénierie destinés à extraire du gaz carbonique de l’atmosphère, on trouve l’idée de saupoudrer avec du fer certaines zones de l’océan où, bien que les nitrates soient abondants, le manque de fer limite la photosynthèse. C’est ce qui se passe naturellement dans la région des îles Tonga où le volcanisme sous marin apporte le fer nécessaire à la croissance des cyanobactéries diazotrophes. Le fer, très peu abondant dans l’eau de mer, est en effet indispensable pour la diazotrophie. Il est habituellement fourni par les retombées de poussières terrestres, et, dans cette zone éloignée des continents, par l’activité volcanique. La diazotrophie en mer ne donne pas lieu à des poussées de plancton rapides car son coût métabolique est élevé. En agriculture, les légumineuses (soja, haricots, luzerne…) ont sur leurs racines des bactéries diazotrophes et on les utilise dans les rotations de cultures pour enrichir les sols en azote.

Rouspétons !

On souhaiterait bien sûr que l’accès aux articles scientifiques publiés soit gratuit. C’est le cas pour les revues de l’European Geophysical Union, mais là, ce sont les auteurs qui paient, et fort cher. Une telle décision se heurte aux intérêts des éditeurs. Pourtant les reviewers font leurs évaluations sans être rétribués (une rétribution poserait d’ailleurs des problèmes de neutralité !). Les éditeurs commerciaux profitent du «publish or perish» qui devient de plus en plus réel avec la tendance qui s’est généralisée de joindre des articles aux thèses. On peut bien sûr choisir de publier des articles dans des revues bon marché, mais les auteurs souhaitent évidemment publier dans des revues à fort impact. Le «publish or perish» aboutit à une pléthore de publications mais n’augmente pas le nombre de celles qui apportent vraiment des connaissances nouvelles.

Avec l’IA, la fin de la météo ?

Plusieurs signalements ces dernières semaines font état de développements visant à appliquer l’intelligence artificielle à la prévision météorologique. Ceci est symptomatique de l’irruption de l’intelligence artificielle dans la prévision météorologique, où elle promet une rapidité de calcul accrue. L’intelligence artificielle peut compléter, plutôt que remplacer les systèmes utilisés jusqu’à présent. En effet elle nécessite une assimilation des données qui précèdent l’instant de la prévision, et ces données sont fournies par la prévision numérique classique. Les réseaux de neurones sont entraînés sur des sorties de modèles, et donc, le changement climatique impose que l’apprentissage soit fait en permanence pour tenir compte du changement en cours : on ne peut pas prévoir le temps qu’il fera en se basant sur les statistiques d’un climat qui change. Par ailleurs, peut on mettre dans les réseaux de neurones des contraintes physiques (conservation de la masse, de l’énergie, vorticité potentielle… ? Ce n’est pas encore au point. Il pourrait devenir utile de représenter des phénomènes à petite échelle dont la résolution demande beaucoup de calculs par des réseaux de neurones dédiés, qui seraient ensuite intégrables dans des modèles à grande échelle. Le même principe pourrait être appliqué à des opérateurs d’observation. Un risque tout de même est qu’avec ces outils on perde de vue et oublie ce qu’on a mis dans la «boite noire». Il est donc indispensables de ne pas perdre dans ces développements l’oeil du physicien.

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