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GIEC

  • Processus d'élaboration et de publication des rapports du Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC)

    Michel Petit

    Les rapports du groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sont publiés et consultables sur le site http://www.ipcc.ch

    Tout le monde peut constater que des estimations et des barres d’incertitude sont clairement fournies. Bref, ils n’ont rien de “ la bouillie pour les chats ” qu’on pourrait redouter au terme d’un consensus diplomatique. Cependant, ils sont effectivement approuvés à l’unanimité par tous les pays membres dont le nombre approche 200. 
    Les rapports du GIEC sont rédigés bénévolement par des chercheurs et seules quelques personnes assurant un support technique sont rémunérées. Le groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat, plus connu dans le monde sous son nom anglais, Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) est une création conjointe de l’organisation météorologique mondiale (OMM) et du programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Il regroupe tous les états-membres de l’une ou l’autre des ces deux organisations. Sa mission est d’évaluer l’état des connaissances (y compris les incertitudes et les controverses scientifiques) sur les questions politiquement pertinentes pour l’élaboration des actions possibles face au changement climatique, en se gardant soigneusement de suggérer quelque décision que ce soit. Le GIEC comprend actuellement trois groupes de travail qui se consacrent respectivement :

    1. au phénomène du changement climatique, 

    2. aux conséquences de ce changement et à ce qu’on peut faire pour s’y adapter, 

    3. aux possibilités de maîtriser les émissions de gaz à effet de serre qui en régissent l’amplitude. 

    Son assemblée générale est composée des représentants des états-membres et décide de la structure des grands rapports qui rythment la vie du groupe. Le troisième d’entre eux a été approuvé en 2001, les deux précédents l’ayant été en 1990 et 1995. 

    Des rapports spéciaux intermédiaires sur des sujets limités peuvent également être décidés. L’assemblée générale élit, pour la durée de la préparation de chacun des rapports majeurs, un Bureau qui, outre un président et quatre vice-présidents, comprend les bureaux des trois groupes de travail qui travaillent indépendamment pour l’essentiel. Chacun de ces bureaux de groupe comprend deux co-présidents, l’un d’un pays développé, l’autre d’un pays en développement et six membres représentant les diverses régions du monde. Les membres de ces bureaux sont des scientifiques reconnus et les deux co-présidents sont des personnalités de stature internationale. Le pays développé qui présente un candidat à la présidence d’un groupe s’engage, en cas d’élection, à financer une unité de soutien technique de quelques membres, qui assistera le bureau dans l’exercice de ses responsabilités. Ces dernières consistent tout d’abord à proposer à l’approbation de l’assemblée générale le plan détaillé du rapport du groupe de travail qui est divisé en chapitres. Après l’obtention d’un consensus sur ce plan, les états ont quelques semaines pour proposer des noms de personnes susceptibles de prendre une responsabilité dans la rédaction de chacun des chapitres. Le Bureau choisit pour chaque chapitre une équipe de deux coordinateurs assistés de quelques « auteurs principaux » qui ont la responsabilité d’écrire les diverses parties du chapitre. Ces auteurs sont choisis dans des listes proposées par les états-membres. Ces équipes, une fois choisies, sont entièrement responsables du contenu de leur chapitre et engagent donc leur réputation vis-à-vis de leurs pairs. Il en ira ainsi tout au long du processus jusqu’à l’approbation du rapport de chacun des trois groupes de travail au cours d’une assemblée plénière. Cette dernière est composée de représentants des états, mais ce sont les deux scientifiques co-présidents du groupe concerné, qui orientent les débats, en assurant la présidence des sessions et recueillent l’aval des responsables d’un chapitre, avant toute modification.
    On en arrive à cette étape finale qu’après une double procédure de relecture critique. Une première version est soumise à la revue par des experts du domaine abordé, désignés par les états-membres et par les organisations non gouvernementales (ONG) concernées par le changement climatique, qui ont un statut d’observateur. Certaines de ces ONG sont d’obédience écologiste, d’autres représentent les vues des pétroliers et des autres lobbies de producteurs d’énergie. Toutes les sensibilités sont donc présentes et, de plus, la liste des experts n’est pas fermée : toute remarque scientifique est prise en compte, quel qu’en soit l’auteur. 

    Ainsi, en France, tout scientifique qui le désire peut obtenir l'accès au texte proposé et faire parvenir au secrétariat du GIEC France toutes les remarques qu'il voudrait faire, ou les amendements qu'il désirerait voir apporter à ce texte .

    Les commentaires reçus sont regroupés ligne par ligne et utilisés pour produire une deuxième version. Cette deuxième version est envoyée, pour avis, à tous les experts ayant commenté la première, ainsi qu’à tous les gouvernements qui sont invités à envoyer chacun une liste unique de remarques. A ce stade, on voit l’influence politique reprendre un certain poids, limité par le caractère scientifique obligatoire des commentaires. Cette deuxième série de critiques est traitée exactement comme la première. C’est le résultat de cet exercice qui sera soumis à l’approbation de l’assemblée générale. 
    En outre, le bureau de chaque groupe de travail organise la rédaction d’un sommaire pour décideurs, soumis lui aussi à une double revue. Ce sommaire qui résume les résultats les plus pertinents de tous les chapitres en une dizaine de pages de texte et autant de pages de figures et de tableaux, est adopté mot à mot par l’assemblée générale qui lui apporte des amendements jugés par les auteurs comme compatibles avec la vérité scientifique. Avec un léger retard par rapport aux rapports des trois groupes de travail, un rapport de synthèse présentera la réponse à quelques questions générales clefs et comprendra lui aussi un sommaire pour décideurs approuvé mot à mot par l’assemblée générale. 

    Ce processus rigoureux et lourd, nécessitant plusieurs années de travail, permet au GIEC de produire des rapports qui sont considérés comme fidèles par la communauté scientifique et comme objectifs par tous les états sans exception, quels que soient leurs intérêts propres. Cette alchimie miraculeuse est obtenue en donnant à chacune des deux parties prenantes un poids qui varie au cours des diverses étapes : les politiques choisissent collectivement des équipes scientifiques compétentes et équilibrées, puis laissent quartier libre aux scientifiques pour rédiger leur rapport et reprennent la main lors de l’adoption finale, tout en restant à l’écoute des scientifiques et sous la présidence de scientifiques qui maintiennent le débat sur le plan de l’objectivité de la rédaction proposée.

    Voir aussi : "Réponses aux arguments de ceux qui doutent de la réalité d’un changement climatique anthropique" de Michel Petit.

  • Évolution par rapport au troisième rapport.

    Jean Labrousse 

    1 - Que montre l’analyse des données disponibles ?
    2 - Quel est le poids relatif des différentes composantes du forçage radiatif ? 
    3 - Comment s’explique et à quoi doit-on attribuer le changement du climat ?
    4 - Qu’en est-il pour le climat du futur? 
    5 - Note complémentaire sur les 6 scénarios

    Groupe de travail I : Bilan 2007 des changements climatiques: les bases scientifiques physiques»

    Environ tous les quatre ans le Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat, GIEC, créé en 1988 par l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), publie un rapport sur l’état des connaissances sur le changement climatique.
    Par changement climatique, contrairement à la définition de la Convention Cadre des Nation Unies sur le Changement Climatique, CCNUCC, le GIEC entend les évolutions du climat de notre planète qu’elles qu’en soient les causes, naturelles ou résultant de l’activité humaines.

    Ce rapport comprend trois parties, correspondant aux trois groupes de travail qui constituent le GIEC:

    • Le Groupe de travail I qui évalue les aspects scientifiques du système climatique et de l’évolution du climat. 

    • Le Groupe de travail II qui s’occupe des questions concernant la vulnérabilité des systèmes socio-économiques et naturels aux changements climatiques, les conséquences négatives et positives de ces changements et les possibilités de s’y adapter.

    • Le Groupe de travail III qui évalue les solutions envisageables pour limiter les émissions de gaz à effet de serre ou atténuer de toute autre manière les changements climatiques. 

    Lors de sa réunion tenue à Paris du 29 janvier au 2 février, le Groupe I a adopté son rapport dont nous faisons ici l’analyse.

    Le rapport complet intitulé: 

    «Quatrième rapport d’évaluation - Groupe de travail I: Bilan 2007 des changements climatiques: les bases scientifiques physiques», fait le point sur les connaissances scientifiques concernant l’état du climat et son fonctionnement. Il a été adopté par consensus par l’ensemble de la Communauté scientifique. Il représente un volume d’un millier de pages.

    Ce rapport est résumé sous la forme d’un document de 15 pages, intitulé « Résumé à l’intention des décideurs», adopté mot par mot par l’ensemble des scientifiques représentants les États Membres parties à la CCNUCC.

    1. Que montre l’analyse des données disponibles ?

      Le quatrième rapport confirme et amplifie les résultats du troisième.

      Pour ce qui concerne l’évolution constatée, l’exploitation des données existantes, que ce soit des mesures directes ou des valeurs reconstituées par différentes méthodes, en particulier par analyse des carottages de glaciers, confirme et précise l’accroissement des températures, la fonte accélérée des glace et son corollaire, l’augmentation du niveau des océans.

      Onze des douze dernières années sont parmi les plus chaudes depuis que l’on dispose de mesures directes, soit depuis 1850. Pour la période 1906-2005, la croissance moyenne de la température à été de 0,74°C, contre 0,6°C pour la période 1901-2000. Si l’on ne considère que les cinquante dernières années ce taux est presque double de celui des cent dernières années.

      Les doutes qui existaient lors du troisième rapport sur l’évolution des températures dans la basse et moyenne troposphère ont été levés et le taux d’accroissement dans cette partie de l’atmosphère est comparable à celui constaté en surface.

      L’accroissement de la quantité de vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère est conforme à celle déduite du réchauffement, ce qui au passage implique un accroissement corrélatif de l’effet de serre.

      Les océans ont capturé la majeure partie de l’augmentation de l’énergie, ce qui s’est traduit par un accroissement de leur température moyenne jusqu’à -3000 mètres. Ce réchauffement a entraîné leur expansion et a ainsi contribué à l’augmentation du niveau des mers de 1,6 mm/an pour la période 1993-2003 contre 0,42 pour 1961-2003.

      Dans chacun des deux hémisphères la couverture neigeuse et l’épaisseur des glaces ont diminués, entraînant un accroissement du niveau des océans de 0,77 mm/an pour la période 1993-2003, alors qu’il n’avait été en moyenne que de 0,50 mm/an entre 1961 et 2003.

      Au total l’accroissement du niveau des océans a été de 3,1 mm/an entre 1993 et 2003 contre 1,8 mm/an pour 1961-2003. Il faut cependant noter que de tels taux d’augmentation ont été observés pour d’autres périodes depuis 1950. Il n’est pas clair de savoir si ces taux sont significatifs d’une tendance à long terme ou s’ils relèvent de la variabilité décennale. Il est cependant quasiment certain que l’accroissement du niveau moyen des océans a été de 0,17 m au cours du 20ème siècle.

      En plus de ces changements un grand nombre d’autres paramètres ont évolué toujours dans le sens du réchauffement. Par exemple:

    • La température de l’Arctique a cru deux fois plus vite au cours des 100 dernières années que pour le reste du globe, et la surface glacée a diminué de 2,7 % par décennie depuis 1978.
    • La température au sommet du pergélisol dans l’Arctique a augmenté de 3°C, au cours des années 80, et l’extension maximale de la surface du sol gelée pendant la saison froide, dans l’Hémisphère Nord, a diminué d’environ 7 % au cours du 20ème siècle. Au cours de la période 1990-2005 la quantité des précipitation a tendu à s’accroître sur la partie est de l’Amérique du Nord et du Sud, sur le nord de l’Europe et le nord et le centre de l’Asie, tandis que la sécheresse a augmenté sur le Sahel, la Méditerranée, le sud de l’Afrique et de l’Asie. Il faut cependant noter que, compte tenu de la forte variabilité spatiale et temporelle des précipitations, il n’est pas à ce stade possible de détecter une tendance générale pour d’autres régions significativement grandes.
    • Dans les régions tropicales et sub-tropicales les périodes de sécheresse ont tendu à être plus intenses et plus longues, depuis 1970, liées à des températures plus élevées et à des précipitations plus faibles. De même on a pu relier les sécheresses à l’augmentation de la température de surface des océans, à la modification de la circulation générale de l’atmosphère et à la décroissance des surfaces des glaces et de la couverture neigeuse.
    • On peut citer aussi l’augmentation: de la fréquence des vagues de chaleur, des températures maximales et des températures minimales, des précipitations intenses, etc. 
    • On notera cependant que l’on n’a pas détecté un accroissement de la fréquence des cyclones tropicaux. L’exploitation des enregistrements de cyclones par les satellites semble montrer un accroissement de leur intensité. On ne peut cependant rien dire de la période antérieure à 1970, car il n’existait pas de mesures satellitales et que les mesures directes sont douteuses.
    Enfin, la ré-analyse des données paléo climatiques, ainsi que l’obtention de nouvelles données permettant de remonter dans le temps au delà de 650 000 ans, montrent que le réchauffement de l’atmosphère a pour effet d’accroître la concentration des gaz à effet de serre, laquelle provoque à son tour une augmentation de température. La température moyenne des cinquante dernières années est très probablement supérieure à celle des cinq cents dernières et, vraisemblablement, des derniers mille trois cents ans. Pendant la dernière période interglaciaire, il y a environ 125 000 ans, le réchauffement des régions polaires, de 3 à 5°C au dessus de la température moyenne du 20ème siècle, (et lié à la variation des paramètres de l’orbite terrestre), a conduit à un accroissement du niveau de la mer de l’ordre de 4 à 6 mètres, par rapport au niveau actuel. L’impact de la fonte des glaces du Groenland et des régions Arctique n’intervenant que pour moins de 4 mètres, il est très probable que la différence ait été due à la fonte des glaces de l’Antarctique. 
    1. Quel est le poids relatif des différentes composantes du forçage radiatif ? 

      La concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère a continué à s’accroître. Depuis le troisième rapport, l’amélioration des connaissances scientifiques a conduit à une meilleure compréhension de l’influence des activités humaines sur le bilan thermique. Ceci a conduit au fait que l’on peut aujourd’hui, avec une très haute probabilité, affirmer que les activités humaines ont conduit, depuis le début de l’ère industrielle vers 1750, à un accroissement du forçage radiatif de 1,6 watt/m2, soit environ cinq fois plus que celui lié au variation du rayonnement solaire qui atteint le sommet de l’atmosphère.

      Les chiffres du forçage radiatif que l’on peut retenir aujourd’hui sont les suivants:

    • Accroissement de la concentration des gaz à effet de serre: +2,30 W/m2.
    • Aérosols d’origine humaine: -0,50 W/m2.
    • Variation de l’albédo lié aux nuages: -0,80 W/m2.
    • Accroissement de l’O3 du aux activités humaines: +0,35 W/m2.
    • Hallocarbones: +0,34 W/m2.
    • Variation de l’albédo du à la modification de l’usage des sols: -0,20 W/m2.
    • Variation de l’albédo du aux retombées des suies sur la neige: +0,10 W/m2.
    • Variation du rayonnement solaire atteignant l’atmosphère: +0,12 W/m2.
    1. Comment s’explique et à quoi doit-on attribuer le changement du climat ?

      Le troisième rapport concluait que l’accroissement des températures, au cours des cinquante dernières années, pouvait de manière quasi certaine être attribué à l’accroissement de la concentration en gaz à effet de serre.

      L’étude de séries de mesures, plus complètes et plus longues, ainsi que l’amélioration de la qualité des modèles de simulation et du nombre des simulations, permettent d’affirmer aujourd’hui que la majeure partie du réchauffement observé depuis le milieu du 20ème siècle peut, avec une très haute probabilité, être attribuée à l’action humaine.

      Les modèles de simulation qui prennent maintenant en compte les aérosols, qu’ils soient d’origine volcanique ou dus à l’action de l’homme, donnent, pour la période qui va de 1100% à 2000, des résultats qui coïncident remarquablement bien avec les observations. 

      La seule prise en compte dans les modèles des variations naturelles ne peut en aucune façon expliquer le réchauffement constaté et la fonte des glaces.

      La coïncidence ne se résume pas aux températures de surface mais aussi aux variations dans la troposphère et dans les quelques premiers milliers de mètres des océans. De la même façon les changements dans la circulation générale de l’atmosphère, tels que le décalage vers les pôles du lit des perturbations, se trouvent vérifiés.

      Enfin le réchauffement, croissant de l’équateur vers les pôles et plus important pour les surfaces continentales que pour les océans, correspond bien à ce qui est observé. 

      Par contre, il est bon de noter, qu’au stade actuel, les modèles sont non conclusifs pour ce qui concerne les modifications aux échelles sous continentales ou locales. De même, les changements dans la circulation générale qui apparaissent dans les simulations, sont plus faibles que ceux observées.

      En conclusion on peut dire que les résultats des modèles de simulation, confortés par les observations, donnent pour une concentration en gaz carbonique de 550 ppm, un réchauffement, par rapport à la période préindustrielle, compris entre 2°C et 4,5°C la meilleure estimation étant de 3°C. 

      Un réchauffement inférieur à 1,5°C est très improbable, alors qu’une valeur supérieure à 4°C n’est pas à exclure, bien qu’ici les résultats des modèles ne soient pas soutenus par les observations. Le rôle dominant de l’accroissement du contenu en vapeur d’eau de l’atmosphère dans ce réchauffement est maintenant mieux compris, tandis que celui des nuages fait encore partie des incertitudes à éclaircir.

    2. Qu’en est-il pour le climat du futur?

      Pour projeter ce que pourrait être le climat du futur, il faut connaître la façon dont évolueront les émissions de gaz à effet de serre, évolution qui ne dépend que de la volonté humaine. Aux incertitudes d’ordre scientifique s’ajoutent donc celles qui relèvent du comportement humain.

      D'un point de vue scientifique, ce quatrième rapport bénéficie d'un plus grand nombre de simulations effectuées avec des modèles fortement améliorés, et qui ont été confrontés aux observations existantes. (Par exemple, les estimations faites depuis le premier rapport, qui donnait un réchauffement compris entre 0,15°C et 0,3°C par décennie, se comparent favorablement avec la valeur observée de 0,2°C par décennie). 

      Le quatrième rapport donne le résultat de ces simulations, effectuées en utilisant, pour l’évolution de la concentration des gaz à effet de serre, celles fournies par six scénarios d’évolution des émissions en fonction des activités humaines. Ces 6 scénarios ont été définis par le groupe spécial du GIEC chargé de cette tâche. Il sont contenus dans le SRES (Special Report on Emission Scenarios).

      Les simulations utilisent les concentrations fournies par les différents scénarios sur la période 2000-2100 ; ces concentrations étant supposées constantes au delà de 2100.
      Dans ces conditions, pour les vingt ans à venir, le taux du réchauffement pourrait être de 0,2°C par décennie. Même si la concentration restait limitée à son niveau de 2000, ce taux serait encore 0,1°C.

      Par rapport à la période 1980-1999, le réchauffement pourrait, à la fin du 21ème siècle et selon le scénario choisi, être compris entre 1,7°C et 4,0°C. (Valeur moyenne "Terre entière", qui peut masquer des écarts géographiques de 1 à  3, notamment dans la zone arctique). A chacune des six valeurs moyennes  correspondant aux six scénarios, est attachée une fourchette d’incertitude qui, pour les 2 exemples cités, est respectivement: [1,0 à 2,7] °C et [2,4 à 6,3] °C. 

      Par rapport au troisième rapport, le quatrième sépare donc bien les incertitudes scientifiques liées à la simulation du climat de celles liées au comportement humain.

      Le réchauffement entraîne une diminution de la quantité de CO2 capturée par les océans et les sols ce qui, ajouté à un plus grand nombre de modèles, explique l’élargissement des fourchettes d’incertitude données dans le troisième rapport.

      Pour le niveau moyen des océans, et selon les scénarios déjà décrits pour les températures, l’accroissement irait de 0,28 m [0,19 à 0,37] m à 0,48 m [0,28 à 0,58] m. L’expansion thermique serait responsable pour 60 à 70% de cet accroissement.

      Les valeurs plus faibles que celles qui figuraient dans le troisième rapport tiennent à une meilleure estimation de l’énergie capturée par les océans et à une meilleure appréciation de la fonte des glaces. Si cependant la fonte des glaces du Groenland se poursuivait de manière linéaire par rapport à la situation actuelle, on devrait augmenter de 10 à 25% les valeurs données pour chacun des scénarios.

      Il faut enfin noter que l’accroissement de la quantité de gaz carbonique dissous dans les océans conduit à un accroissement de son acidité et, à terme, à une dissolution des carbonates contenus dans les sédiments des eaux peu profondes et les récifs coralliens.

      Au delà des deux paramètres que sont la température et le niveau des océans, le rapport note les points suivants:

    • Réchauffement croissant avec la latitude, plus important sur les continents que sur les océans.
    • Diminution des glaces dans l’Antarctique et l’Arctique, cet océan pouvant en fin de période être presque totalement libéré en fin d’été.
    • Diminution du nombre de cyclones tropicaux, mais accroissement de leur intensité.
    • Si le réchauffement de l’ordre de celui projeté se poursuivait sur quelques millénaires, la fonte totale des glaces du Groenland pourrait conduire à un accroissement du niveau des océans de quelques 7 m. Les températures projetées, comparables à celles ayant régné il y a 125 000 ans, avaient alors conduit à un niveau 4 à 6 m plus élevé que l’actuel.
    • La température de l’Antarctique devrait rester suffisamment froide pour qu’il n’y ait pas de fonte généralisée des glaces de surface et, par ailleurs, l’accroissement des précipitations devrait plutôt conduire à une augmentation de l’épaisseur de glace.
    Enfin, il faut noter la longueur du cycle du gaz carbonique qui fait que les émissions du 21ème siècle devraient conduire à un réchauffement de l’atmosphère, et à une élévation du niveau des océans, qui se poursuivront au delà de mille ans.
    1. Note complémentaire sur les 6 scénarios

      Les scénarios se répartissent en quatre familles, certaines d’entre elles présentant des variantes. Il est important de noter qu’aucun de ces scénarios ne suppose que l’on impose une contrainte aux émissions, comme par exemple celle résultant de l’application du protocole de Kyoto. Il ne donne aucune estimation de la probabilité de chacun d’entre eux.

      On distingue:

      A1. Le développement économique est très rapide, la population mondiale passe par un maximum vers le milieu du 21ème siècle, et décroît ensuite, et des technologies nouvelles et plus efficaces sont introduites. Cette évolution est véritablement mondiale, le développement des différents États convergent. Cette famille est elle même subdivisée en trois variantes qui dépendent de l’évolution des technologies:

    • A1FI: Utilisation intensive des énergies fossiles
    • A1T: Utilisation d’énergie non fossile
    • A1B: Utilisation mixte.
    A2. Le monde reste très hétérogène et le développement se fait sur la base des ressources régionales et locales.
    B1. L’évolution mondiale de l’économie et des population sont les mêmes qu’en A1 mais se produit une évolution rapide des structures économiques vers des activités de services.
    B2. Le développement est basé sur des solutions locales qui mettent l’accent sur les problèmes sociaux et sur la durabilité. L’accroissement de population a un taux plus faible qu’en A1 et B1, et le développement est moins rapide de même que l’évolution des technologies. Bien que basé aussi sur des préoccupations environnementales et d’équité sociale l’aspect régional et local domine.
  • Commentaires sur les résultats présentés dans le 4ème rapport du GIEC (2007).

    Jacques Merle

    Deux propriétés de l'océan sont essentielles dans le changement climatique d'origine anthropique actuel :

    • Sa capacité d'absorber une fraction importante de la chaleur résultant de l'effet de serre additionnel induit par les émissions de gaz à effet de serre (principalement le gaz carbonique) d'origine humaine. 

    • Sa capacité d'absorber une partie de ce gaz carbonique additionnel injecté dans l'atmosphère.

    Absorption de la chaleur par l'océan 

    Les milieux terrestres ne sont plus en équilibre radiatif du fait de l’impact des activités humaines :

    • injection continue de Gaz à Effet de Serre (GES) et d’aérosols dans l'atmosphère,

    • utilisation des surfaces terrestres qui modifient l’albedo etc…. . 

    Le forçage radiatif résultant de la somme des termes positifs (ou des apports radiatifs principalement par les GES et l'Ozone stratosphérique), et des termes négatifs (absorption radiative par les aérosols et leurs effets sur la couverture nuageuse et l'albedo, utilisation des terres), est appelé le "forçage". Il est de 1,6 W/m2 sur l'ensemble de la surface de la Terre.
    Ces 1,6 W/m2 supplémentaires servent à accroître le contenu thermique de l'atmosphère donc sa température moyenne (accroissement mesuré de 0,8 °C depuis le début du XXème siècle). Cet accroissement de température de l'atmosphère est l'effet le plus visible du changement climatique et le plus sensible pour l'humanité. 
    Mais une fraction importante de ces 1,6 W/m2 est également absorbée par la fonte des glaciers polaires, des glaciers continentaux et des glaces de mer, ainsi que par les continents et les océans. L'accroissement du contenu thermique de l'océan au cours du siècle passé peut être estimée avec une assez bonne précision à l'aide des mesures de températures réalisées régulièrement dans l'océan, au moins dans ses couches supérieures (0 - 3 000 m). L'estimation de la chaleur absorbée par la fonte des glaciers est également assez précise. Il n'en est cependant pas de même pour le changement du contenu thermique des continents (sols, couvert végétal) encore mal connu mais considéré comme non majoritaire. 

    Ainsi les chiffres, fournis par le 4ème rapport du GIEC pour la période 1961 - 2003, montrent sans contestation possible que c'est l'océan qui de très loin a réabsorbé le plus de chaleur :

    Accroissement du contenu thermique de la planète entre 1961 et 2003. Les unités sont en 1022Joules.

     

    Océan 14,10
    Glacier 0,45
    Atmosphère 0,50
    Continents 0,75
    Total 15,8

     

    L'océan a donc réabsorbé près de 90 % du réchauffement induit par le forçage radiatif dû aux GES anthropiques. 

    Sans l'océan, le réchauffement que nous subissons serait plus rapide, sans que la valeur
    finale de la température d'équilibre ne soit en rien changée

    Par ailleurs ce réchauffement océanique induit des effets secondaires qui pourraient être très importants voire catastrophiques et que l'on connaît encore mal. 

    Parmi ceux-ci, il y a évidemment l'élévation du niveau des mers qui est actuellement de 3.3 mm/an. 

    Le réchauffement de l'océan modifie aussi sa dynamique et les transports de chaleur et de sel en son sein perturbant ainsi localement les échanges énergétiques avec l'atmosphère à sa surface. La circulation thermohaline profonde peut être aussi perturbée et affecter le climat à une échelle globale en diminuant significativement les transports de chaleur vers le nord par l’océan dans l’Atlantique. Le GIEC estime très probable un ralentissement de 25% de cette circulation au cours du 21ème siècleinsuffisant cependant pour induire un refroidissement dans les régions de l’Atlantique nord. 

    La vie océanique peut aussi être très profondément perturbée par ces changements. Elle est en effet très dépendante de l’état physique de l’océan et de sa dynamique qui conditionnent la disponibilité des éléments nutritifs dans les couches productives superficielles. Ces perturbations biologiques entrent aussi dans des boucles d'interactions affectant le climat lui-même à travers le cycle du carbone qui intervient dans la capacité de l’océan d’absorber le CO2.

    Absorption du gaz carbonique par l'océan

    Le GIEC nous dit que le contenu en carbone total de l'océan s'est accru de 118 Giga tonne de C entre 1750 et 1994. Cet accroissement représentait encore 42 % du CO2 émis par l'homme au début de l'ère industrielle (moyenne entre 1750 et 1994). Depuis une vingtaine d'années on constate une diminution notable de cette capacité de l'océan de réabsorber le CO2 anthropique (entre 1980 et 2005 ce taux d'absorption est tombé à 37 %). Ceci semble indiquer que l'océan approche de sa limite de saturation; néanmoins le rapport du GIEC indique que ces estimations sont encore très incertaines et ne permettent pas de tirer des conclusions définitives. Quelles que soient les inconnues qui demeurent concernant cette capacité de l'océan de réguler une partie du CO2 anthropique, cette absorption a des effets secondaires, qui pourraient être graves à long terme notamment sur la vie marine. L'un de ces effets secondaires parmi les plus remarqués, évoqué récemment dans la littérature scientifique et la grande presse, est l'acidification de l'océan qui réduit sa capacité de former des carbonates et donc entraînerait une perturbation de sa fonction de dépositoire ultime du carbone au fond des océans et perturberait ainsi durablement le cycle du carbone La construction des récifs coralliens pourrait être aussi gravement affectée.

    Plaidoyer pour l'étude et l'observation permanente de l'océan

    Comme on le voit l'océan joue un rôle majeur dans le climat; et son changement à long terme, qui se déroule sous nos yeux, marquera profondément et pour longtemps cette enveloppe fluide essentielle de la Terre qui en retour affectera l'évolution futur du climat. En effet, comparée à l'atmosphère, l'océan présente deux caractéristiques qui lui confère un rôle essentiel dans le climat : 

    1. Sa capacité thermique est énorme, plus de 1 000 fois celle de l'atmosphère; ainsi il stocke et transforme en chaleur l'essentiel du flux radiatif solaire. 

    2. Il est affecté d'une dynamique beaucoup plus lente que l'atmosphère; il est donc susceptible de mémoriser plus longtemps, à des échelles de temps compatibles avec la variabilité climatique, les perturbations (ou anomalies) qui l'affectent.

    Mais cet océan est encore mal connu. Ses interactions avec l'atmosphère et le climat sont très complexes. On vient de voir que de nombreuses inconnues demeurent concernant son implication dans le changement climatique anthropique. Réduire ces inconnues et ces incertitudes est indispensable pour prévoir avec plus de sécurité cette évolution future du climat. Observations et mesures sont les sources irremplaçables de nos connaissances. Il faut donc mettre en place un système pérenne d'observation de grande ampleur, coordonné internationalement. en une Veille Mondiale des Océans et Climat, comme il existe une Veille Météorologique Mondiale pour l’atmosphère.

    Mis à jour novembre 2007

  • les bouleversements seront négatifs pour la grande majorité des hommes ainsi que pour le monde végétal et animal.

    Les marges d'erreurs de la prévision se resserrent, il est essentiel d'agir, et sans tarder.

    Michel Petit

    À l’opposé des scénarios non-interventionnistes, on peut décider, comme s’y sont engagés les états signataires de la Convention de Rio sur le climat, mise au point lors du sommet des chefs d’état en 1992, d’adopter une politique visant à limiter le changement de la composition de l’atmosphère à des valeurs plafonds. La figure 19-a montre une évolution des émissions permettant de stabiliser la concentration du gaz carbonique dans l’atmosphère à diverses valeurs : 450, 550, 650, 750 et 1000 ppm, l’évolution de cette concentration (figure 19-b) et celle de la température (figure 19-c). Les barres d’erreur sur ce dernier panneau indiquent l’incertitude sur la température calculée pour 2100, tandis que les losanges indiquent la température d’équilibre qui sera atteinte après des centaines d’années et se maintiendra pendant des milliers d’années.                                 

    Figure 19a

       

    Figure 19b                                                                            Figure 19c 

    ppm : partie par million - Gt C : Milliard de tonnes équivalent carbone

    La figure 20 montre par exemple, que pour le scénario conduisant à un niveau de stabilisation de 800 ppm vers 2100, en 2100 (courbe verte), le réchauffement global serait compris entre 1,9 et 3,4°C.

    A l'équilibre (courbe bleue), le réchauffement serait compris entre 3,1 et 7,6°C.

    Figure 20 : Variation de température par rapport à 1990 en °C Niveau de stabilisation éventuelle du CO2 en ppm    

    Mais répétons le, la principale source d'incertitude est : comment l'humanité réagira-t-elle à l'avertissement des chercheurs ? 

    Une seule chose est sûre: il est encore temps de réagir si on veut éviter le pire, mais le temps presse ! 

    Dernière mise à jour Mars 2008

  • Michel Petit

    Dans diverses hypothèses, les chercheurs ont fait "tourner leurs modèles". 

    Températures:

    L'image ci-dessous montre que l'air se réchauffe plus sur les continents  que sur les océans, et que le réchauffement serait plus fort aux hautes latitudes, surtout Nord ( 2 à 3 fois la valeur moyenne du Réchauffement Global).

    Des signaux précurseurs de ce réchauffement planétaire peuvent d'ailleurs être constatés en Sibérie et au Canada, où la température "moyenne" s'est déjà élevée de plusieurs degrés, ce qui n'empêche pas les hivers de battre des records de froid, comme c'est la cas au Canada en 2003-2004.

    Figure 15 : Répartition mondiale de l’augmentation de température pour 3 scénarios (en lignes) et trois périodes (en colonnes)

    Pluviosités

    Les profils annuels de température et de pluviosité déterminent les climats des diverses régions du globe.

    Face à une demande accrue due à la croissance de la population,les changements de ces climats auraient évidemment des conséquences importantes sur l'agriculture, les ressources en eau, la santé, et finalement sur le développement des sociétés humaines et la biodiversité. 

    Les chercheurs travaillent sur ces effets du changement climatique

    La moyenne mondiale des précipitations devrait croître. La figure ci-dessous montre que certaines régions comme le nord de l’Europe seront plus arrosées tandis que le Bassin méditerranéen sera confronté à une sécheresse accrue. On observera davantage de phénomènes pluvieux intenses, même dans les régions plus sèches. 

    Certaines régions devraient devenir plus humides, d’autres plus sèches avec des précipitations accrues en moyenne mondiale.

    Figure 16 : Changements des précipitations en pourcentage pour la période 2090–2099, par rapport à 1980–1999. Ces valeurs correspondent à la moyenne des modélisations pour le scénario moyen d’émissions A1B pour les mois de décembre à févier (à gauche) aux mois de juin à août (à droite) . Les zones blanches sont celles où moins des deux tiers des modèles donnent un changement de même signe et les zones pointillées sont celles où plus de 90% des modèles donnent des changements de même signe.

    Voir les FAQs

    Comment mesure-t-on la température?

    Comment peut-on évaluer les températures pour la période antérieure à 1860?

    Peut-on parler de température moyenne mondiale?

    Quelles observations pour estimer la température à la surface de la Terre?

    Dernière mise à jour Février 2012

  • Michel Petit

    Dans diverses hypothèses, les chercheurs ont fait "tourner leurs modèles".

    Comme les rapports du Giec l’ont bien établi, l’évolution du climat de la Terre dépendra de celle de la concentration dans l’atmosphère des gaz absorbant le rayonnement infrarouge, dits gaz à effet de serre.
    Cette concentration sera fonction des émissions nettes résultant des activités humaines, que les lois physiques ne permettent pas de prévoir.

    Les concentrations de CO2 attendues à la fin du XXI° siècle sont deux à quatre fois plus élevées que celles de l'ère préindustrielle. Elles dépendent essentiellement des développements démographiques et des politiques énergétiques.

    Il s'agit de l'un des principaux facteurs d'incertitude sur la sévérité du Réchauffement Global  qui va se produire. Les scientifiques qui cherchent à simuler par des modèles numériques le comportement futur du climat doivent faire des hypothèses sur cette évolution de la composition de l’atmosphère.

    Les scénarios du "Rapport spécial" sur les scénarios d’émission, formellement approuvé en 2000, ont servi de base aux modélisations dont ont rendu compte les troisième (2001) et quatrième (2007) rapports du Giec. Les émissions supposées étaient déduites de scénarios de développement socio-économique, élaborés par les prospectivistes. Les concentrations de gaz à effet de serre, calculées à partir de ces émissions servaient de base à l'évaluation du changement climatique.

    Quatre grandes familles de scénarios ont été définies : A1, A2, B1 et B2, lesquelles se déclinent en variantes selon des hypothèses retenues.

    Le scénarios A1 décrit un monde futur dans lequel la croissance économique sera très rapide, la population mondiale atteindra un maximum au milieu du siècle pour décliner ensuite et de nouvelles technologies plus efficaces seront introduites rapidement. Elle se scinde en trois groupes qui décrivent des directions possibles de l’évolution technologique dans le système énergétique. 

    Les trois groupes A1 se distinguent ainsi: forte intensité de combustibles fossiles (A1FI), sources d’énergie autres que fossiles (A1T) et équilibre entre les sources (A1B) («équilibre» signifiant que l’on ne s’appuie pas excessivement sur une source d’énergie particulière, en supposant que des taux d’amélioration similaires s’appliquent à toutes les technologies de l’approvisionnement énergétique et des utilisations finales).

    Le scénario A2 prévoit un monde très hétérogène. Le thème sous-jacent est l’autosuffisance et la préservation des identités locales. Les schémas de fécondité entre régions convergent très lentement, avec pour résultat un accroissement continu de la population mondiale. Le développement économique a une orientation principalement régionale, et la croissance économique par habitant et l’évolution technologique sont plus fragmentées et plus lentes que dans les autres canevas.

    Le scénario B1 correspond à un monde convergent avec la même population mondiale culminant au milieu du siècle et déclinant ensuite, comme dans le canevas A1, mais avec des changements rapides dans les structures économiques vers une économie de services et d’information, avec des réductions dans l’intensité des matériaux et l’introduction de technologies propres et utilisant les ressources de manière efficiente. L’accent est placé sur des solutions mondiales orientées vers une viabilité économique, sociale et environnementale, y compris une meilleure équité, mais sans initiatives supplémentaires pour gérer le climat.

    Le scénario B2 décrit un monde où l’accent est placé sur des solutions locales dans le sens de la viabilité économique, sociale et environnementale. La population mondiale s’accroît de manière continue mais à un rythme plus faible que dans A2, il y a des niveaux intermédiaires de développement économique et l’évolution technologique est moins rapide et plus diverse que dans les canevas et les familles de scénarios B1 et A1.

    À titre d'exemple, la figure ci-dessous montre les prévisions d'augmentation de la température moyenne de surface du globe par rapport à la période 1980-1999. Les courbes colorées montrent, en continuité avec les simulations relatives au 20ème siècle les variations pour les scénarios A2, A1B et B1, ainsi que pour un scénario irréaliste où les concentrations seraient restées constantes à leur valeur de 2000 et qui présente l’intérêt de montrer le réchauffement auquel nous condamnent les émissions passées. Les zones colorées donnent une indication de la dispersion des simulations. Dans les barres de droite, le trait horizontal indique la valeur la plus probable pour le scénario d’émissions considéré et l’étendue des barres indique la gamme des valeurs vraisemblables.

     fig12

    Figure 12a

    Les modèles ne sont pas parfaits, ils sont en particulier incapables de simuler en des temps de calcul raisonnables des phénomènes de taille inférieure à 300 km. Il en résulte que les températures prévues par rapport au présent sont entachées d’une incertitude. Les barres à droite de la figure sont relatives à la température prévue en 2100. 

    On voit que si un mélange d'actions volontaristes et... de chance permet d'associer la concentration la plus faible et la partie basse de la barre correspondante, l’augmentation de température prévue peut se limiter à 1°, et que si, à l’opposé, la concentration la plus forte est associée à l'extrémité haute de la barre, on peut avoir 6,4° de plus en moyenne (sachant que d'après les observations, l'augmentation de température dans l'hémisphère nord est toujours supérieure à la moyenne Terre entière). C’est donc dans cette fourchette que l’on peut s’attendre à trouver l’augmentation de la température moyenne mondiale à la fin du siècle. 

    Les conséquences de telles variations de la température moyenne mondiale ne sont pas négligeables puisque c'est un écart de 5° qui sépare une ère glaciaire et un optimum interglaciaire, c’est-à-dire les périodes les plus froides et les périodes les plus chaudes des grands cycles climatiques naturels.

    Les quatre grandes familles de scénarios d'émission, A1, A2, B1 et B2 décrits dans cette page qui ont servi de base aux modélisations des 3ème et 4ème  rapport du Giec ont été remplacées, pour l'élaboration du cinquième rapport, par une approche différente.

    Pour prendre en compte des scénarios d’émission correspondant à des mesures volontaristes de réduction des émissions envisagées, cette nouvelle approche est fondée sur le choix d’un nombre limité d’évolutions des concentrations, prises parmi celles utilisées par des scénarios existants qui intègrent de façon cohérente une évolution socio-économique, les émissions, les concentrations, les évolutions du climat et leurs conséquences.
    Un travail important de chercheurs de toutes disciplines concernées a permis de choisir quatre d’entre eux dont les concentrations seront utilisées par les modèles pour permettre des comparaisons. Ces quatre scénarios, référencés conventionnellement par la valeur du forçage radiatif en 2100 calculés par le modèle de référence (2,6 ; 4,5 ; 6 et 8,5 W/m²), sont appelés en anglais «Representative Concentration Pathways (RCPs)» qu’on peut traduire par «Évolutions représentatives des concentrations».

    L’évolution la plus modérée des concentrations correspond aux politiques les plus volontaristes des réductions d’émission et la plus forte correspond au contraire au maximum des émissions envisagées dans la littérature. Les deux autres RCP correspondent à des hypothèses intermédiaires.

    Les quatre « Évolutions représentatives des concentrations » incluent tous les facteurs susceptibles d’influencer le climat. Elles ne sont ni des prévisions ni des recommandations politiques. Leur seule ambition est d’être un outil de travail permettant d’explorer la gamme des évolutions possibles du climat.
    Elles sont utilisées en parallèle comme point de départ par les modélisateurs du climat et comme objectif par les chercheurs qui cherchent à déterminer l’influence des évolutions socio-économiques sur les émissions. Les résultats de ces modélisations du climat sont présentés dans la figure ci-dessous, tirées du 5ème rapport du Giec. On voit que seul le scénario RCP 2,6 permet d'espérer un accroissement de température de 1° qui correspond aux 2° par rapport à l'ère préindustrielle, valeur retenue par la COP 21.

    Figure 12b :Evolution dans le temps de la différence entre la température moyenne mondiale de la surface et sa valeur au début du XXIe siècle.
    Les simulations pour le futur sont traduites pour chaque RCP par la moyenne des modèles considérés (lignes continues), ainsi que par la dispersion entre ces modèles (zones colorées correspondant à une dispersion entre modèles allant de 5 à 95 %). La discontinuité des courbes en 2100 n'a aucune signification physique, elle est due au fait qu’un certain nombre de modèles n'ont pas fait de projection au-delà de 2100. Les nombres au milieu de la figure sont ceux du nombre de modèles pris en compte.

    Voir la FAQ :

    Les modèles climatiques ont-ils une valeur prédictive?

    Voir News :

    Janvier 2012 :  Representative Concentration Pathways » : La nouvelle approche du Giec.   

    Avril 2013 :  Le protocole de Kyoto : de belles paroles ne suffisent pas à éviter un bouleversement du climat de notre planète  

    Février 2015 :   La COP 21 Paris - décembre 2015. Le seuil de 2°C : un artifice ?

    Dernière mise à jour Mars 2016

  • Le GIEC a publié le 9 août 2021 le premier volet de son sixième rapport d’évaluation
  • En 2007, le 4ème rapport du GT I du GIEC, (sur les bases scientifiques de l'étude de la perturbation en cours du climat),

  • Le Groupe Intergouvernemental pour l’Étude du Climat (GIEC) est perçu comme un groupe de scientifiques

     

    de Kari De Pryck ((postdoctorante, boursière du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS), et chercheuse associée au laboratoire PACTE de l'Université Grenoble Alpes)

    Édition : Presses de Sciences Po

    Recension d'Yves Dandonneau.

    Le Groupe Intergouvernemental pour l’Étude du Climat (GIEC) est perçu comme un groupe de scientifiques qui fournissent périodiquement aux décideurs une analyse, la meilleure possible, sur les connaissances que l’on a du climat et de son évolution, en particulier celle liée aux rejets de gaz à effet de serre. L’ouvrage écrit par Kari de Pryck est consacré au fonctionnement de cette institution et ne commente pas les résultats mis en avant par ses trois groupes de travail. Il décortique sa composition, son mandat, son articulation avec ses tutelles, l’adéquation de ses rapports avec l’attente de celles ci, son évolution, et les complexités sous-jacentes à tous ces aspects. C’est donc une vision politique du GIEC et de son articulation avec le monde de la recherche, les états et les organisations internationales. Après un rappel du pourquoi et des conditions qui l’ont conduite à écrire ce livre, elle détaille les principes qui doivent être respectés pour le choix des membres qui composent l’assemblée générale et les groupes de travail, au sein desquels figurent des scientifiques et aussi des représentants des états, et les contraintes qui résultent de la nécessité de respecter autant que possible une variété correspondant aux grandes régions du globe et au partage entre pays développés et pays en développement. Présenter de manière objective, claire et précise l’ensemble des connaissances sur l’état du climat est une tâche inédite pour un groupe aussi large et diversifié que l’est le GIEC. La polémique née par exemple autour d’une erreur sur une disparition prochaine des glaciers de l’Himalaya publiée dans la littérature grise et reproduite dans le rapport final (l’Himalaya Gate) montre bien la difficulté de la tâche. Les rapports des trois groupes sont le reflet des connaissances publiées dans des revues à comité de lecture au moment où ils sont rédigés. Depuis sa création, le GIEC n’a pas cessé d’améliorer les procédures d’élaboration et de correction collective des rapports afin d’aboutir au meilleur résultat possible tout en restant neutre sur les éventuels sujets de désaccord. Les assemblées du GIEC ne comprennent pas que des scientifiques, mais aussi des représentants des états qui discutent parfois certaines conclusions qui seraient mal acceptées dans leur pays. L’approbation des rapports fait donc l’objet de négociations et d’une recherche de consensus sur ces points litigieux. Les travaux du GIEC sont étroitement coordonnés avec les activités de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) qui indique d’éventuels points à approfondir, adresse des demandes particulières aux groupes de travail du GIEC (rapport sur un réchauffement de 1, 5°C, rapport sur les océans et la cryosphère), et qui définit l’ordre du jour des COP annuelles (Conférences des parties), où les états s’appuient sur les conclusions du GIEC pour définir leur politique en matière de Climat. Compte tenu de l’interaction de plus en plus forte du GIEC avec la politique de lutte contre le changement climatique, et du caractère non prescriptif de ses conclusions, la communication auprès des médias doit être contrôlée. Cette tâche est de plus en plus difficile à mesure que la question du changement climatique devient de plus en plus préoccupante. Le livre se termine par une réflexion sur la possibilité pour le GIEC de répondre à des problèmes qui se ramifient dans des particularités régionales et sont perçus différemment selon les groupes sociétaux. Tous ces enjeux sont expliqués en détail avec une compétence aiguë. La masse de documents consultés, le grand nombre d’interviews de personnalités du monde scientifique impliquées dans l’activité du GIEC, sont impressionnantes, et font de ce livre une source très utile pour prendre conscience de la complexité à laquelle l’humanité est confrontée face au changement climatique.

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