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Qu'est-ce que l'eau bleue ? et l'eau verte ?

(Temps de lecture: 2 - 4 minutes)

(avec des suggestions d’Yves Dandonneau, Katia Laval et Jean Pailleux)

C’est l’hydrologue suédoise Malin Falkenmark qui introduit le concept d’eau bleue et d’eau verte lors d’un atelier de la FAO en 1993 (Land and water integration and river basin management). Elle le précise dans une publication de 2006 avec son collègue Johan Rockström (The new blue and green water paradigm).

Cette nouvelle approche consiste à mettre en valeur la partie de l’eau précipitée disponible pour la production végétale, qualifiée d’eau verte.

Elle est rapidement adoptée par les scientifiques qui travaillent sur les ressources en eau et leurs usages, au point que plusieurs dizaines de publications scientifiques par an s’intéressent à la question : le site Web of Science donnait en octobre 2025 près de 700 références depuis 1993 pour l’entrée "blue water" + "green water". Il existe même depuis 2019 une revue scientifique éditée par la respectable International Water Association (IWA) consacrée au sujet : Blue-Green Systems.

La figure ci-dessous adaptée de Falkenmark and Rockström (2006) schématise cette conceptualisation qui s’inscrit au cœur du fonctionnement de la zone critique.

eau verte bleue

Sur les continents la ressource en eau renouvelable est apportée par les précipitations. L’eau interceptée circule alors à la surface et dans les sols :

  • L’eau bleue s’écoule, sous l’effet de la gravité et de transferts mécaniques (pompages), en surface ou dans les nappes.
  • L’eau verte qui transite dans le sol est celle qui est susceptible d’être utilisée pour la production végétale au travers de la photosynthèse et de la transpiration.

En terme de ressource, elles se répartissent selon :

  • l’eau bleue dans les nappes profondes non exploitées par la végétation, dans les lacs artificiels ou non, dans les retenues naturelles, les zones humides et les cours d’eau ;
  • l’eau verte dans la zone du sol le plus souvent non saturée directement utilisable pour le développement végétal naturel ou cultivé.

Les réservoirs ne sont pas figés. Une eau bleue peut devenir verte, par exemple dans le cas de l’irrigation ; réciproquement une eau verte peut devenir bleue, par exemple dans le cas du drainage agricole.

Les chercheurs qui ont introduit ce concept sont des spécialistes d'une branche relativement récente de l'hydrologie, la gestion intégrée des ressources en eau. Dans un monde en rapide changement, c'est à ce domaine que s'adressent prioritairement les acteurs de la société pour lesquels la préoccupation majeure est l'usage de cette ressource, incluant une analyse de la demande et des besoins.  Dans la pratique, l’intérêt de la distinction entre eau bleue et eau verte est de préciser de quoi on parle lorsqu’on discute des prélèvements d’eau dans le cycle hydrologique continental.

Une fois retournée à l’atmosphère, soit qu’elle ait servi à la croissance végétale, soit qu’elle ait été reprise directement en surface, le devenir de la masse d’eau est de re-précipiter sans présumer de sa nature ultérieure, bleue ou verte.

Le tableau ci-dessous donne des ordres de grandeurs de flux à l’échelle des continents (d’après Paolo D’Odorico et al. ; 2019). Voir aussi le tableau des masses d’eau planétaires.

 

 

(en km³/an)

Précipitation sur les continents

 

113 000

Eau bleue

Écoulement global,
dont prélèvement pour l’irrigation
et pour les usages domestiques  et industriels

46 000
2 400 à 2 600
800

Eau verte

Évapotranspiration globale
dont terres cultivées

73 000
6 100 à 6 800

Dans un article remarqué de 2009, Rocktröm et Falkenmark, avec des collègues, insistent sur le potentiel des eaux vertes pour la résilience au changement climatique. En effet lorsqu’on examine la sécurité alimentaire à l’échelle planétaire, il apparaît que l’agriculture irriguée, transformant de l’eau bleue en eau verte, est significativement plus menacée par le changement global qu’une agriculture locale raisonnée, fondée sur l’eau verte. Dès lors, cette question de l’eau bleue et de l’eau verte est centrale dans la réflexion sur les infrastructures adaptées au changement climatique.

Le milieu urbain, en particulier, est aujourd’hui une plateforme d’application de ces développements, avec - entre autres – une refonte des espaces verts, l’aménagement de jardins de toit ou un encouragement des façades végétalisées (voir Almaaitah et al. ; 2021).

Attention ! On qualifie souvent d’eau grise, les eaux domestiques usées non-traitées. Cette appellation n’est pas du même ordre que l’eau bleue ou verte. De fait, les eaux grises relèvent des eaux bleues !

Références : Des liens dans le texte permettent d’accéder aux références de cet article. Elles sont toutes en accès libre.

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