avec des suggestions de Katia Laval et de Bernard Pouyaud, ainsi qu’une relecture par Yves Dandonneau.
Ce concept, né au début des années 2000 aux États-Unis sous l’expression critical zone, désigne la couche continentale, imparfaitement définie, où se concentrent les échanges physiques, chimiques, énergétiques et biologiques à l’interface de l’atmosphère, de l’hydrosphère, de la biosphère et de la géosphère. Cette zone englobe la surface et ses aménagements, la végétation naturelle ou cultivée, les différents horizons du sol, ainsi que les roches et ses minéraux en interaction, avec la microfaune et l’eau.
Schéma général de la zone critique (source : https://www.ozcar-ri.org/fr/la-zone-critique/quest-zone-critique/)
C’est un objet de recherche sur lequel se retrouvent de nombreuses disciplines scientifiques et autour duquel la communauté se rencontre pour un partage multidisciplinaire. Le concept de zone critique a permis de favoriser et de structurer des plateformes de recherche environnementales en rapprochant les laboratoires et en synthétisant les échanges et les travaux entre des spécialités sur des observatoires de terrain communs.
Ces observatoires sont souvent les héritiers des petits bassins versants représentatifs et expérimentaux (BVRE), largement développés dans la communauté des hydrologues et des pédologues au siècle dernier. Ce concept, qui avait démarré là encore aux États-Unis dans les années 1930, avait progressivement été élargi à d’autres disciplines comme la climatologie, l’hydrogéologie, la biogéochimie, la biologie végétale, etc. Le rôle de la France est significatif dès les années 1950 ; certaines équipes universitaires (Paris, Rennes, Strasbourg, Montpellier, Grenoble, entre autres) et certaines institutions (tout particulièrement l’ORSTOM-IRD, le CNRS, le CEMAGREF et l’INRA*) ont été à l’origine de nombre de ces BVRE sur le territoire national ou à l’Étranger. Plusieurs ont évolué vers des observatoires de la zone critique et sont toujours actifs.
La dénomination d’observatoire de la Zone Critique inclut désormais d’autres entités que les petits bassins versants en s’intéressant par exemple aux systèmes karstiques, à la cryosphère (glacier, neige, pergélisols), aux aquifères, aux zones humides, aux villes, etc.
Ces observatoires ont pour principe un fonctionnement sur le temps long qui nécessite un soutien financier en conséquence. Outre l’identification, la quantification et la modélisation des mécanismes physiques, chimiques ou biologiques, ils sont des lieux privilégiés pour étudier les impacts et l’adaptation aux rapides changements globaux, qu’il s’agisse du climat, de la variabilité naturelle ou de l’aménagement du territoire.
En France, une infrastructure de recherche nationale a été établie en 2015 organisant en réseau les observatoires opérés par des équipes françaises sur le territoire national ou à l’Étranger en partenariat. C’est le réseau OZCAR (Observatoires de la Zone Critique : Application et Recherche). Ce réseau, outre les échanges entre laboratoires et disciplines, permet de gérer un parc d’équipement (CRITEX) et de mettre les données observées en commun dans le cadre de la plateforme Theia.
Certains observatoires métropolitains sont opérationnels depuis plusieurs dizaines d’années. Par exemple : le site forestier du Strengbach dans le Haut-Rhin, les bassins de l’Orgeval près de Paris, le bassin de Roujan dans l’Hérault, le Réal Collobrier dans le Var ou les sites bretons Agrhys dans le Sud-Finistère et le Morbihan.
Plus récemment (2020) un projet européen (eLTER, Integrated European Long-Term Ecosystem, critical zone and socio-ecological Research) a émergé pour organiser une infrastructure européenne ajoutant au concept de zone critique décrit plus haut une dimension socio-écologique.
Voir aussi Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Zone_critique_(sciences_de_la_Terre)
et la recension de l'ouvrage de Jérôme Gaillardet "la Terre habitable ou l'épopée de la zone critique" sur ce site.
* Ces deux derniers aujourd’hui regroupés au sein de l’INRAE.